Alors, chers parents, allez-vous envoyer vos enfants à l’école dans une semaine ou deux ?

Pour ma part, je n’en sais rien. Je ne sais plus.

Un jour, c’est oui, le lendemain, c’est non. Mon cœur balance au gré des reportages tantôt rassurants, tantôt alarmants que je lis à la chaîne, question de me « faire une tête ».

Le problème, c’est que plus je lis, plus je sens ma tête sur le point d’exploser. Mes certitudes se désagrègent, mes idées s’embrouillent.

On voudrait prendre une décision éclairée alors que le brouillard s’épaissit autour de cette pandémie.

On voudrait suivre l’exemple, mais Justin Trudeau lui-même admet qu’il ne sait pas encore s’il serait prêt à envoyer ses propres enfants à l’école.

François Legault, lui, prévient qu’il n’a pas de « guide des opérations » pour rouvrir les écoles en temps de pandémie. « C’est la première fois qu’on fait ça, donc on va essayer de le faire le mieux possible. »

Ça vous rassure, vous ?

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C’est clair, je fais une surdose aiguë d’infos contradictoires à propos de la COVID-19.

Prenez le masque. Pas nécessaire, nous avait-on assuré. Dangereux, même, puisque nous risquions de le mettre tout croche et de nous autocontaminer.

Et voilà qu’on nous dit que le masque est indispensable. Lundi, le gouverneur de l’État de New York, Andrew Cuomo, a prévenu d’un ton grave que les gens pourraient « littéralement tuer quelqu’un » en refusant de le porter.

C’est comme ça partout dans le monde. Après nous avoir patiemment expliqué que nous étions un peu trop cons pour savoir comment porter un masque, on nous suggère désormais… d’en fabriquer nous-mêmes.

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Vous êtes perdus, vous aussi ?

Voici tout ce que vous avez toujours voulu savoir (ou pas) sur la COVID-19. Ne me remerciez pas, j’ai tellement lu à ce sujet, autant vous en faire profiter.

Alors. Restez à la maison, c’est très important. Mais bougez, c’est très important aussi.

Profitez du soleil, c’est bon pour votre moral, mais préparez-vous à vous faire fusiller du regard par ceux qui vous considèrent comme des assassins parce que vous profitez dudit soleil, au parc.

Restez chez vous à tout prix. Sortez pour qu’on puisse atteindre l’immunité collective. Euh, non, restez chez vous, parce que le truc de l’immunité, finalement, on ne sait plus trop si ça fonctionne ou pas…

Contractez le virus, qu’on en finisse. De toute façon, il n’y aura pas de vaccin avant deux ou quatre ans, ou pas, et vous l’attraperez, ou pas, tôt ou tard. Mais surtout, faites bien attention de ne pas contracter le virus, parce que vous risquez de tomber très, très malade.

Vous risquez la mort. C’est très sérieux.

Ne vous inquiétez pas, la plupart des gens n’ont pas de symptômes. Rappelez-vous qu’on fait tout ça pour protéger les personnes âgées. Ou pour ne pas surcharger le système de santé. Ou pour protéger les personnes âgées.

En tout cas, ça ne touche que les vieux, cette maladie, mais aussi les adultes « avec des conditions », et les autres également, des quinquagénaires en pleine forme, des trentenaires, même les enfants y goûtent.

Non, vraiment, pas de quoi s’alarmer, mis à part le fait que la COVID-19 ne s’attaque pas qu’aux poumons, comme on le croyait au départ, mais aussi au cœur, aux vaisseaux sanguins, au foie, aux intestins et au système nerveux. On vient même de découvrir que les pieds d’enfants infectés virent au bleu. Charmant.

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Voyez-vous, on a réussi à aplatir la courbe, au Québec, ça va bien aller, bien mieux que prévu, sauf dans les CHSLD, mais ça, c’est un autre monde, sauf aussi dans la région de Montréal, où la réouverture des commerces vient d’être reportée d’une semaine, parce que ça ne va pas si bien que ça.

Mais, hé, ça va bien aller.

Pas de panique, les enfants ne contamineront pas leurs parents, à moins qu’ils les contaminent. À ce propos, ils devraient éviter de côtoyer leurs grands-parents. Alors cet été, pas de réunions familiales, pas de déplacements d’une région à l’autre, mais la saison touristique n’est pas foutue. Au contraire !

Non, vos enfants ne seront pas des cobayes, l’école est absolument cruciale pour eux, mais ce n’est pas grave s’ils n’y vont pas, faites donc ce que vous voulez, après tout, c’est vous qui savez.

Justement… on ne sait plus trop bien, là.

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On n’a jamais su, en fait.

« Il ne faut pas que les gens pensent qu’on est dans une situation au Québec où on va annuler des évènements ou faire ce que fait la Chine pour contenir la maladie. »

C’est le Dr Horacio Arruda qui a dit ça, le 29 janvier. Le directeur national de santé publique du Québec ne voyait pas de problèmes à l’horizon. Arruda Matata.

Trois jours plus tôt, le grand immunologiste américain Anthony Fauci avait déclaré que le virus représentait un « risque très, très bas pour les États-Unis ».

Ces retours en arrière, fascinants quoique peu constructifs, démontrent à quel point on ignore tout de ce virus qui a fait le saut chez les humains il y a six mois à peine.

En janvier, c’est vrai, les experts avaient tout faux. Mais ils basaient leurs estimations sur les infos qu’ils avaient à ce moment-là. C’est-à-dire pas grand-chose.

Ce n’est pas la faute du Dr Arruda, qui affirmait hier l’inverse de ce qu’il affirme aujourd’hui.

Ce n’est pas la faute du premier ministre, qui multiplie les volte-face depuis le début de la crise.

Ce n’est pas la faute des journalistes ni même des gérants d’estrade qui pullulent sur les réseaux sociaux.

Tout ce chaos, toute cette confusion, c’est la faute d’un vulgaire microbe : le SARS-CoV-2.

On ne sait encore à peu près rien de lui, malgré les milliers d’études publiées à son sujet depuis le début de la pandémie.

On ne connaît pas vraiment son origine, ni la vitesse à laquelle il se propage, ni même à quel point il est mortel.

On ne sait rien et on est submergés d’infos.