Alina Main a avalé son café de travers mardi matin lorsqu’elle a lu l’article de La Presse voulant que la police de Laval ait distribué ces derniers jours une quarantaine de constats à elle et son mari, propriétaires du café Bellerose, et à leurs clients, pour non-respect des mesures de la santé publique contre la COVID-19.

Le café de la rue du même nom, dans le quartier Vimont à Laval est resté ouvert depuis l’imposition des consignes visant à empêcher la propagation du coronavirus. Sa propriétaire dit qu’elle sert du café et de la nourriture.

> Pluie de constats dans un repaire de la mafia

Le Bellerose est un café connu par la police comme étant fréquenté par des individus liés à la mafia depuis au moins une dizaine d’années.

La semaine dernière, les policiers de l’Escouade Équinoxe de la police de Laval, spécialisée dans la surveillance des établissements licenciés et dans la collecte de renseignements sur les individus liés au crime organisé, ont passé deux jours à observer l’établissement. Il faisait beau mercredi et jeudi derniers.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Des policiers de Laval ont passé deux jours à observer le café Bellerose, la semaine dernière.

Ils ont vu plusieurs individus liés à la mafia, dont Leonardo Rizzuto, fils cadet du défunt parrain de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto, sortir ou entrer dans l’établissement.

« J’ai donné un café à Leo Rizzuto la semaine dernière », admet Mme Main.

« Vous savez que ce n’est pas tout le monde qui peut faire ça » ? a renchéri La Presse.

« Pourquoi pas » ?, a répondu du tac au tac Mme Main, selon qui les policiers lui ont dit avoir croqué une photo de la scène, alors qu’elle sert le fils du défunt parrain.

Mme Main admet que les policiers ont dû voir plusieurs clients sortir du café avec « rien dans les mains » et leur avoir envoyé des constats d’infraction. « C’est vrai qu’ils n’avaient pas de tasse dans les mains mais c’est parce qu’ils avaient pris un espresso et qu’ils avaient fini leur café », les défend-elle.

Mme Main nie qu’elle et son mari aient quoi que ce soit à voir avec la mafia.

« On ne connait pas tous nos clients. Plusieurs ne savent même pas qui est le propriétaire. Ils n’ont rien à voir avec nous et nous, nous n’avons rien à voir avec eux. Ils se tiennent et discutent dans le stationnement », dit-elle.

Elle affirme qu’elle et son mari ont acheté l’établissement en 2014 et que le mafioso Vincenzo Spagnolo n’a jamais été un partenaire silencieux du café Bellerose entre l’acquisition et l’assassinat de Spagnolo en octobre 2016.

« Il n’y a jamais eu d’autres propriétaires fantômes à part nous. On n’a rien à voir avec l’historique de l’établissement avant que l’on arrive. Cela fait six ans que l’on travaille et que l’on essaie de faire une différence. Les policiers sont contre nous en raison des clients qui viennent ici. La police nous vise car nous sommes un café italien », accuse Mme Main.

Pas pire que le Tim Hortons

La propriétaire a reçu un constat de 1546 $ des mains d’un policier la semaine dernière, car son établissement ne respecterait pas les consignes de santé publique selon la police.

Mais elle persiste et signe. Alors que le Romcafé, autre endroit connu de la police, est fermé, Mme Main garde son établissement ouvert, en se croisant les doigts pour ne pas recevoir une deuxième amende encore plus salée, qui pourrait aller jusqu’à 6000 $ comme le prévoit le décret, en cas de récidive. Elle dit qu’elle sert des cafés et des repas au comptoir. Elle assure que ses clients respectent la distanciation de deux mètres.

« Il y a beaucoup de travailleurs qui viennent ici pour prendre un café et les policiers leur disent d’aller au Tim Hortons. J’ai des clients réguliers qui ne veulent pas aller au Tim Hortons. Le Tim Hortons est ouvert et moi, pourquoi je devrais fermer ? Est-ce que vous pensez que c’est juste pour nous d’être fermés et pas le Tim Hortons », questionne la propriétaire du café Bellerose.

« Tim Hortons non plus n’est pas un commerce essentiel. Ça devrait être la même loi pour tout le monde », conclut-elle.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le (514) 285-7000, poste 4918, ou écrivez à drenaud@lapresse.ca