Avec l’arrivée de certaines livraisons, Québec a désormais assez d’équipement médical de protection pour encore une semaine. Mais à Ottawa, le gouvernement fédéral n’est pas en mesure de « garantir » qu’il y en aura assez au pays pour traverser la pandémie de COVID-19. Entre-temps, le bilan s’alourdit au Québec, où 4611 Québécois sont atteints du coronavirus. Bilan dans les deux capitales.

Pas de pénurie avant une semaine

François Legault avait prévenu les Québécois, mardi, que certains équipements critiques pour soigner les patients atteints de la COVID-19 – dont les masques de protection – seraient en pénurie d’ici trois à sept jours. Or, mercredi, il a annoncé que la province avait finalement « quelques commandes [de] rentrées », ce qui lui permet d’avoir les stocks nécessaires pour au moins une semaine. « On continue de travailler fort à essayer de confirmer des commandes […] en Asie et de fournir des transports cargo pour aller [les] chercher », a-t-il affirmé. Les quatre équipements pour lesquels le Québec craint une pénurie sont les masques N95, les masques de procédure, les blouses et les gants. « Il y a peut-être une période qui est un peu plus critique, disons, passé la prochaine semaine, mais assez rapidement, dans les prochaines semaines, on va commencer à avoir des entreprises québécoises qui vont nous fournir du matériel », a assuré le premier ministre Legault.

Québec sera ravitaillé

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Chrystia Freeland, vice-première ministre du Canada

Le gouvernement fédéral entend aussi aider le Québec face à la pénurie de certains équipements. Avec cinq petits mots en point de presse mercredi – « je peux confirmer que oui » –, la vice-première ministre du Canada, Chrystia Freeland, a rassuré le réseau de la santé québécois, qui criait famine. Avant elle, le premier ministre Justin Trudeau avait aussi affirmé, mais très vaguement, que le Québec pourrait puiser dans la réserve d’équipement de protection individuelle (EPI) du fédéral. Mais bien que des millions de masques N95 et chirurgicaux s’apprêtent à être livrés au Canada, Justin Trudeau n’est pas prêt à promettre que le pays est à l’abri d’une pénurie de matériel de protection. « Dans cette situation, on ne peut rien garantir. On est en train de travailler extrêmement fort pour combler les différents besoins », a-t-il dit mercredi, ajoutant que « tellement de pays dans le monde sont en train d’essayer de courir après le même équipement ».

Sa ministre de la Santé, Patty Hajdu, a par la suite candidement reconnu que les stocks d’urgence du fédéral ne suffiraient « probablement » pas pour répondre à la demande. « En avons-nous assez ? Non, selon moi », a-t-elle laissé tomber en conférence de presse. Le gouvernement canadien, à l’image des autres gouvernements dans le monde, a négligé d’année en année de se préparer adéquatement pour affronter une crise sanitaire d’une telle ampleur, a-t-elle dit.

Toujours stable aux soins intensifs

Entre-temps, au Québec, le nombre de nouveaux cas de COVID-19 a continué d’augmenter, mercredi, quoiqu’à un rythme moins soutenu qu’au début de la semaine. Ainsi, 4611 Québécois ont désormais reçu la confirmation qu’ils étaient atteints de la COVID-19, une augmentation de 449 cas en une journée. De ce nombre, 307 personnes sont hospitalisées, dont 82 aux soins intensifs. Cette dernière statistique est stable au Québec, ce qui a fait dire mercredi au premier ministre François Legault que c’était « vraiment une bonne nouvelle ». Au cours des prochains jours, a-t-il promis, le gouvernement rendra public le scénario « le plus probable » afin que les citoyens estiment à quel moment on prévoit arriver au sommet des nouveaux cas déclarés par jour. Cela permettra aussi aux experts en santé publique d’émettre des hypothèses quant au moment où cette première vague de COVID-19 devrait se terminer dans la province. « Mais ça reste des probabilités, là. Je pense qu’il n’y a pas personne dans le monde qui est capable de dire avec précision quand va arriver ce sommet », a toutefois prévenu le premier ministre Legault mercredi.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

« Des semaines, sinon des mois »

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Le premier ministre Justin Trudeau n’est pas prêt à promettre que le pays est à l’abri d’une pénurie de matériel de protection.

Après avoir refusé pendant des jours de se prononcer sur les scénarios envisagés par le fédéral quant à la durée de la crise de la COVID-19, Justin Trudeau s’est finalement fait forcer la main par la publication, dans le National Post, d’un document gouvernemental voulant que les mesures de lutte contre la pandémie durent jusqu’en juillet. « C’est un scénario réaliste », a-t-il concédé mercredi. « Je pense que les gens doivent s’attendre à ce qu’on soit dans cette situation pendant bien des semaines encore, sinon des mois. […] Si on regarde à travers le monde, on voit que même dans des pays comme la Corée du Sud ou à Singapour, où ils ont pu assez bien gérer cette crise, les mesures continuent pendant longtemps », a illustré le premier ministre. Ultimement, il revient aux citoyens de remplir ce qui constitue une « obligation morale » et civique, a insisté Justin Trudeau. « Rester à la maison est votre façon de servir. […] C’est comme ça que vous servez votre pays », a-t-il plaidé dans un passage de son discours qui n’était pas sans rappeler celui d’un certain John F. Kennedy.

Restrictions de circulation dans quatre nouvelles régions

Le gouvernement Legault a également limité l’accès, mercredi, à certains territoires de quatre nouvelles régions sociosanitaires (l’Outaouais, les Laurentides, Lanaudière et la Mauricie–Centre-du-Québec) aux travailleurs qui offrent des services essentiels. Des points de contrôle sont opérés par les forces policières. Ces nouvelles mesures « visent à limiter les déplacements non essentiels », a déclaré Québec dans un communiqué. Pour la région des Laurentides, seuls les travailleurs essentiels pourront aller dans les municipalités régionales de comté d’Antoine-Labelle, d’Argenteuil, des Pays-d’en-Haut et des Laurentides. Dans Lanaudière, les secteurs visés sont les territoires d’Autray, de Joliette, de Matawinie et de Montcalm. En Mauricie, il s’agit de l’agglomération de La Tuque.

Au cours des derniers jours, le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, avait souligné que la région d’Ottawa-Gatineau était particulière, puisqu’elle s’étend sur deux provinces et que les citoyens traversent la frontière pour y obtenir, entre autres, des soins médicaux. La Sûreté du Québec (SQ) a confirmé mercredi qu’il y aura désormais des points de contrôle aléatoires (et non systématiques) à la sortie des ponts qui relient Gatineau à la capitale du Canada. D’autres barrages pourraient être érigés ailleurs dans la région. « Cette décision était devenue une étape nécessaire dans le contexte de notre réalité géographique. Chaque déplacement implique potentiellement des arrêts qui multiplient les risques de contagion. Ces mesures vont avoir pour effet d’octroyer aux forces de l’ordre une plus grande capacité d’intervention pour limiter les déplacements non essentiels », a déclaré le maire de Gatineau, Maxime Pedneaud-Jobin.