Avec l’état d’urgence décrété à Montréal, la Ville a augmenté ses ressources destinées aux sans-abri. Samedi, deux centres de jour extérieurs assuraient la distribution de nourriture, au square Cabot et au parc Émilie-Gamelin. L’hôpital Royal-Victoria devrait ouvrir ses portes sous peu pour permettre le confinement des sans-abri infectés ou présentant des symptômes.

Si elle se réjouissait de l’aide de la Ville, qui a fourni des abris, des chaises, des toilettes et des stations de lavage de mains au square Cabot, où Résilience Montréal assurait un service extérieur depuis jeudi, Nakuset, la codirectrice de l’organisme, espère obtenir davantage d’aide dans un avenir rapproché.

« Nous voulions des tentes chauffées, des endroits de repos avec des chaises longues, des couvertures », a-t-elle souligné, précisant que pour plusieurs femmes dans la rue, les centres de jour comme Résilience Montréal offraient un endroit où se reposer après être restées alertes toute la nuit dans un environnement dangereux.

Le manque de protection des intervenants et des bénévoles l’inquiète aussi. « Nous aimerions avoir un médecin sur place, pour que les gens puissent poser des questions, a indiqué Nakuset. Pour les personnes qui passent la journée dans la rue, avoir mal à la gorge et tousser, ce n’est pas quelque chose qui les préoccupe. Mais ça fait partie des symptômes. »

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Nakuset, codirectrice de l’organisme Résilience Montréal

À la Direction de santé publique de Montréal, on n’a pas pu confirmer si l’idée était à l’étude.

Trois autres sites externes seront aménagés au cours des prochains jours pour répondre aux besoins des sans-abri, a dit la responsable de la sécurité publique au comité exécutif de la Ville de Montréal, Rosannie Filato. « On va pouvoir accueillir environ 1000 personnes par jour, a-t-elle précisé. Ils vont pouvoir aller chercher de la nourriture, des choses à boire, et des travailleurs sociaux seront présents. »

Des chaises ont été fixées aux poteaux des tentes pour assurer la distance entre les personnes sur place. Au centre-ville, 24 « îlots sanitaires », composés de toilettes chimiques et de stations pour se laver les mains, ont été installés. « Plusieurs sans-abri allaient dans les cafés, les restaurants, pour se laver et utiliser les toilettes, mais maintenant c’est fermé », a expliqué Mme Filato.

« À mon âge, c’est sûr que j’ai peur de l’attraper », a dit Jean-Marc, 63 ans, rencontré samedi au square Cabot. L’homme estime que la distanciation de 2 m entre les personnes dans la rue risque d’être particulièrement difficile. « Ça, c’est le principal défi », a-t-il dit.

Information

Résilience Montréal offre sur place déjeuners, dîners, cafés et collations d’après-midi, en plus de l’information sur la COVID-19, aux sans-abri.

« Plusieurs personnes ici sont aux prises avec des problèmes de dépendances et au moins, si on offre un endroit plus sûr, ça va éviter qu’ils se retrouvent dans des endroits pires », a lancé M.  Chapman.

L’endroit offre aussi l’avantage de pouvoir contrer la désinformation dans la rue.

Parmi les gens auxquels Résilience Montréal vient en aide se trouvent de nombreuses personnes des Premières Nations. Leur méfiance envers les institutions augmente les défis, selon David Chapman, coordonnateur de projets de l’organisme. « Il y a une relation difficile historique, a dit M.  Chapman. Le Canadien moyen entre à l’hôpital en s’attendant à ce qu’on s’occupe de lui. Ce n’est pas nécessairement la même chose pour les gens de la communauté, qui se demandent s’ils vont être la dernière priorité. »

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Parmi les gens auxquels Résilience Montréal vient en aide se trouvent de nombreuses personnes des Premières Nations.

« Où est [le ministre des Services aux Autochtones] Marc Miller ? a demandé Nakuset. Il devrait être ici. »

Elle s’est adressée directement à son ministère pour obtenir de l’aide dans la gestion de la crise de la COVID-19 auprès de la clientèle qu’elle dessert, a-t-elle dit. « C’est toute une population qui est oubliée », a-t-elle dénoncé.

Le ministre des Services aux Autochtones a annoncé jeudi la mise sur place d’un fonds de 305 millions de dollars pour répondre aux besoins immédiats des communautés des Premières Nations en lien avec la COVID-19. De cette enveloppe 15 millions sont destinés aux groupes autochtones régionaux et urbains qui aident les personnes vulnérables.