François Legault a lancé un appel à l’unité mercredi : la pandémie de COVID-19 « risque d’être la plus grande bataille de notre vie ». À ce jour, le Québec compte trois nouveaux morts, portant le bilan à sept. Et même si la province demeure la plus touchée au pays, avec maintenant 1339 cas confirmés de la maladie, les résultats « sont encourageants », selon le premier ministre.

Une guerre à gagner

François Legault a confirmé mercredi que deux nouvelles personnes âgées qui habitent des régions rurales, dont l’une revenait de voyage ou avait été en contact avec un voyageur, sont mortes de la COVID-19. Un troisième décès – le premier à Montréal –, a été annoncé plus tard en après-midi. Au moment de publier, le Québec comptait 1339 cas confirmés, en augmentation de 326 cas en une journée ; 78 personnes sont désormais soignées dans les hôpitaux en raison du coronavirus, dont 35 aux soins intensifs. Parmi ceux qui ont subi un test pour la COVID-19, 26 600 cas se sont avérés négatifs et 3000 tests sont toujours en attente de résultat. « On a actuellement une espèce d’armée de 8,5 millions de personnes pour combattre le virus. Ça risque d’être la plus grande bataille de notre vie. On va en parler longtemps. Nos petits-enfants, dans 20 ans, dans 50 ans, vont se rappeler comment le peuple québécois a réussi, ensemble, à gagner la bataille », a déclaré d’un ton solennel le premier ministre du Québec.

Peut-on se comparer avec les autres provinces ?

Le Québec se classe en position de tête du nombre de cas de COVID-19 au pays. Il est toutefois difficile de comparer les provinces sur cette base, a prévenu mercredi François Legault. « Même moi, avec les ressources que je peux avoir pour avoir des statistiques, je ne suis pas capable de faire cette comparaison », a-t-il dit. D’abord, les provinces n’appliquent pas les mêmes critères avant de faire un test. Le Québec teste depuis mercredi les citoyens qui présentent des symptômes, alors qu’il ne testait avant que ceux qui revenaient de voyage et leurs proches. Chaque province ne teste pas non plus à la même vitesse. « L’hospitalisation, les cas sévères, c’est un bon indice de comparaison [entre les provinces], parce que c’est les gens qui finissent par se retrouver à l’hôpital, qu’ils soient en Ontario ou ici, ils finiraient par se retrouver à l’hôpital », a précisé le directeur national de santé publique, Horacio Arruda. M. Legault soutient que le Québec, « toute proportion gardée », a effectué plus de tests que la moyenne canadienne.

Appel aux snowbirds

François Legault avait un mot mercredi pour les milliers de snowbirds québécois qui reviennent de la Floride : « Vous devez vous isoler pour deux semaines. C’est très, très important. Vous êtes à risque, donc vous restez à la maison. » M. Legault a par ailleurs affirmé qu’il n’était pas permis pour eux de sortir faire une marche. À Ottawa, le gouvernement a invoqué la Loi sur la mise en quarantaine qui ordonne aux voyageurs de se mettre en isolement 14 jours. Des arrangements ont été pris avec des hôtels des quatre villes canadiennes, dont Montréal, où atterrissent encore des vols internationaux afin que les voyageurs fassent leur quarantaine sur place si nécessaire.

De l’équipement médical suffisant

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

La ministre de la Santé, Danielle McCann

Devant l’inquiétude du personnel de la santé, le gouvernement Legault doit revenir constamment sur la question de l’approvisionnement du matériel médical lors de ses points de presse quotidiens. Mercredi, il a une fois de plus assuré que le matériel était disponible en quantité suffisante pour les prochaines semaines. Il a toutefois admis qu’il y avait eu des « petites difficultés » dans la distribution et « peut-être dans les directives » aux établissements de santé. « On y a vu, on va corriger. On corrige la situation, puis on veut le savoir », a affirmé la ministre de la Santé, Danielle McCann. Elle a aussi assuré qu’il sera possible pour les infirmières de faire laver leurs uniformes à l’hôpital pour éviter de rapporter des vêtements contaminés à la maison.

De la patience pour les loyers

Avec l’économie qui tourne au ralenti et la majorité des entreprises qui ont cessé leurs activités jusqu’au 13 avril, François Legault a demandé un peu d’empathie aux propriétaires de logements locatifs. « Il y a le loyer qui s’en vient, le 1er avril, puis les chèques du gouvernement fédéral devraient arriver à compter du 6 avril. Je veux faire un appel aujourd’hui à tous les propriétaires, d’être compréhensifs, d’être capables d’attendre quelques jours avant de recevoir le loyer », a-t-il plaidé mercredi. Pour les sans-abri qui passent la nuit dans des dortoirs, le premier ministre a reconnu qu’il y avait un enjeu pour freiner la transmission du virus. Québec tentera au cours des prochains jours de les loger à l’extérieur de ces salles communes, notamment dans l’ancien hôpital Royal Victoria à Montréal.

De l’aide avant le 6 avril ?

Ottawa a confirmé mercredi que le nouveau système pour gérer le fort volume de demandes de prestation d’assurance-emploi sera bel et bien en place autour du 6 avril. Or, le gouvernement Legault évalue ce qui peut être fait, en collaboration avec le ministre du Travail, Jean Boulet, pour venir en aide aux Québécois qui ne seront pas en mesure de tenir financièrement jusqu’à cette date. « On est en train de se préparer effectivement à ce qu’il y ait des cas, d’ici le 6 avril, qui vont avoir besoin d’argent pour de la nourriture, pour le loyer […] », a indiqué M. Legault mercredi. « On essaye de voir ce qu’on peut faire pour aider les cas exceptionnels. »

Pas d’amendes aux récalcitrants… pour l’instant

Si les règles pour les entreprises sont strictes et que l’isolement des Canadiens rentrant de voyage est obligatoire, François Legault ne compte pas demander aux policiers d’appliquer des dispositions législatives qui leur permettraient d’imposer des amendes aux récalcitrants. « Ce que j’ai dit à [la ministre de la Sécurité publique] Geneviève Guilbault, c’est que nous voulons informer la population [des règles en vigueur]. Nous ne sommes pas encore rendus à l’étape où l’on doit donner des amendes », a-t-il affirmé. Québec sera également attentif ces prochaines semaines à l’évolution du nombre de nouveaux cas confirmés de COVID-19. Si la courbe ne s’aplanit pas, le gouvernement pourrait être « obligé de poursuivre » ses mesures draconiennes au-delà de la mi-avril.

« La vie continue »

Sur une rare note un peu plus personnelle, le premier ministre François Legault a indiqué mercredi qu’il « se sent bien » physiquement et qu’il fait « attention à [lui] » et à ceux qui l’entourent. Il a par ailleurs précisé qu’il s’accordait une journée de congé samedi et que la vice-première ministre Geneviève Guilbault prendrait la relève. « La vie continue. Il y a de bonnes nouvelles. J’en ai eu moi aussi comme des naissances dans ma famille. Il faut essayer de voir après la crise. Notre défi sera de raconter tout ça un peu comme une grosse anecdote. […] On est capables de passer au travers. C’est sûr que je ne vois pas mes deux fils qui sont à Montréal, mais je me sens bien », a-t-il expliqué.

16 cas à la résidence EVA

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

La résidence EVA de Lavaltrie

Le Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Lanaudière a confirmé, mercredi après-midi, que la résidence EVA de Lavaltrie comptait maintenant 16 cas confirmés de COVID-19. Sept de ces résidants sont hospitalisés. Le premier décès lié à la COVID-19 au Québec, survenu la semaine dernière, concernait une résidante de cet établissement. Trois autres occupants de la résidence EVA sont aussi morts des suites de la maladie la semaine dernière. Plusieurs ressources ont été mises en place pour éviter la propagation de la maladie et assurer la sécurité des résidants, explique le CISSS dans son communiqué. Deux agents de sécurité sont entre autres sur place en tout temps « afin de voir au respect des consignes et du contrôle des portes ». Un patrouilleur de la Sûreté du Québec est aussi stationné à l’entrée du stationnement et peut venir prêter main-forte aux agents de sécurité. Alors que les résidants sont censés être confinés, certains ne respectent pas les règles. « Une démarche a été réalisée auprès des instances concernées afin de connaître l’identité de ces personnes. La Direction du CISSS pourra procéder à une intervention personnalisée auprès de ces personnes, s’il y a lieu », est-il écrit dans le communiqué.