Au moins deux ambulanciers paramédicaux contaminés à la COVID-19. Des équipes en quarantaine préventive après avoir été en contact avec un patient porteur « qui n’avait pas fourni toute l’information ». Les services d’urgence déplorent que des patients ne donnent pas l’heure juste quand ils appellent le 9-1-1, mettant leurs équipes en danger.

« Il faut dire la vérité », martèle Claude Lemay, directeur des opérations chez HRH services préhospitaliers, dans le secteur de Repentigny. « Quand on demande à quelqu’un s’il a voyagé ou s’il a des symptômes, il faut nous le dire. »

Deux de ses ambulanciers paramédicaux ont appris ce week-end qu’ils sont positifs au nouveau coronavirus. La manière dont ils ont été infectés n’a pas encore été établie. « La Santé publique est en train de faire une enquête [pour retracer les déplacements des deux travailleurs d’urgence]. C’est des gens qui travaillent sur la route, qui rencontrent des patients, des médecins. C’est compliqué. » M. Lemay assure qu’ils ont cessé de travailler dès l’apparition des premiers symptômes.

Six de ses équipes sont aussi en quarantaine préventive après être intervenues auprès de gens qui n’avaient pas tout dit. Les équipes n’ont donc pas revêtu l’équipement de protection, qui est rationné de peur de pénurie.

« Pendant ce temps, ils ne peuvent pas aider d’autres gens qui en ont besoin, rage Claude Lemay. On ne vous jugera pas. On est là pour servir les gens. Mais si on le sait d’avance [que vous êtes à risque] et qu’on peut se protéger, on ne devrait pas être malade. »

Même son de cloche aux Services Préhospitaliers Laurentides-Lanaudière. « Ce que nos équipes remarquent, c’est que les gens ne donnent pas nécessairement la bonne date d’arrivée au pays ou s’impatientent quand les paramédicaux leur posent des questions », dit le directeur des opérations, Stéphane Maillet, dont l’entreprise recense environ 20 appels par jours liés à la COVID-19.

« Des patients qui ne nous disent pas toute la vérité, c’est notre quotidien. On est capable de gérer ça. Mais là, la différence, c’est que notre sécurité est en jeu », indique pour sa part David Gagnon, de la Fraternité des travailleurs et travailleuses du préhospitalier du Québec, qui représente 1000 membres au Québec.

Le syndicat fait état de quelques dizaines de membres en isolement préventifs. Certains reviennent de voyage, d’autres ressentent des symptômes grippaux et d’autres encore ont eu des contacts non protégés avec des personnes à risque.

« Je pense que les gens ne nous disent pas la vérité parce qu’ils ont peur de ne pas être servis. Je les rassure. On va y aller quand même. Ils n’attendront pas plus ou moins. C’est juste qu’il faut avoir l’info pour mettre l’équipement », dit M. Gagnon.

« Les gens ne réalisent pas. Ils sont catastrophés. Il y en a pour qui c’est volontaire [de cacher des choses], mais d’autres n’y pensent juste pas. On fait face à beaucoup d’anxiété. »

Urgence-Santé, qui dessert en ambulances Montréal et Laval, parle de « quelques cas » du type. « Ce n’est pas une situation qui est alarmante pour nous, mais on a eu quelques cas. On a aussi, dans des situations normales, des gens qui ne répondent pas correctement à nos questions. Évidemment, ces questions sont là pour les aider. Dans le cas du coronavirus, il y a probablement des inquiétudes que les gens ont par rapport à leur santé ou à comment ils pourraient être stigmatisés. »

L’organisme a d’ailleurs jugé nécessaire d’envoyer un communiqué le 17 mars appelant les citoyens à « déclarer leur état de santé lorsqu’ils appellent au 9-1-1 pour assurer la protection de tous ».

Manque d’équipement

Chaque fois qu’ils soupçonnent que le patient auprès duquel ils interviennent risque d’être contaminé à la COVID-19, les paramédicaux enfilent un équipement complet de protection. Gants, masque, visière ou lunettes, et combinaison.

« L’impact des patients qui ne nous disent pas toute la vérité, ça fait qu’on utilise plus souvent l’équipement et que les stocks vont baisser. Les équipes vont se protéger plus. Elles entendent des histoires. Elles ne veulent pas vivre ou revivre une quarantaine. »

Claude Lemay de HRH services préhospitaliers a la même inquiétude. Si ses équipes sont méfiantes, elles ne prendront aucune chance. « On va brûler l’équipement plus vite », craint-il.