(Washington, New York) Le président américain Donald Trump a déclaré vendredi l’état d’urgence pour faire face à la pandémie de coronavirus qui a mis la première puissance mondiale au ralenti, entre fermetures d’écoles et transports en commun désertés.

Cette décision exceptionnelle, traditionnellement utilisée pour les catastrophes naturelles plutôt que les crises sanitaires, a immédiatement provoqué un spectaculaire rebond à Wall Street au lendemain de sa pire séance depuis le krach boursier d’octobre 1987.

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« Pour déclencher la pleine puissance des ressources du gouvernement fédéral, je déclare officiellement une urgence nationale », a déclaré M. Trump, évoquant ce dispositif qui permettra à l’État fédéral de débloquer jusqu’à 50 milliards de fonds pour lutter contre le virus.

« J’appelle chaque État (du pays) à mettre immédiatement en place des centres d’urgence » et les hôpitaux à activer leurs plans de préparation d’urgence « pour répondre aux besoins des Américains », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse dans les jardins de la Maison-Blanche.

Interrogé sur les ratés de la réponse américaine, en particulier sur la lenteur de la mise à disposition des tests, Donald Trump a été catégorique : « Je ne me sens en aucune manière responsable », a-t-il lancé, affirmant avoir hérité d’un système qui n’était pas adapté pour faire face à une épidémie d’une telle ampleur.

Scène surprenante au moment où les tous les professionnels de santé de la planète soulignent l’importance de la « distanciation sociale » pour endiguer la propagation du virus, le président américain a serré les mains d’une demi-douzaine de dirigeants de grandes entreprises américaines qui se sont succédé au pupitre.

Donald Trump, 73 ans, qui a été en contact la semaine dernière avec un membre de la délégation du président Jair Bolsonaro testé positif au coronavirus, a expliqué ne pas avoir lui-même fait de test, car, a-t-il assuré, il ne présente « aucun symptôme ». Il a cependant ajouté qu’il se ferait probablement tester « prochainement ».

Times Square anormalement calme

PHOTO JOHANNES EISELE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un touriste traverse la 7e avenue de Times Square alors que l’endroit est anormalement peu fréquenté.

En quelques jours, les États-Unis ont spectaculairement changé de rythme.  

La plupart des secteurs ont été contraints de mettre un coup de frein brutal à leurs activités, même si le nombre de cas confirmés de coronavirus reste faible (environ 1700 cas vendredi, dont 41 morts), en raison notamment d’un gros retard pris dans la capacité à tester la population.  

Les autorités s’attendent à ce que le nombre de cas explose dès que les tests seront largement disponibles : des projections transmises au Sénat parlent de 70 à 150 millions d’Américains qui pourraient être infectés, sur un pays de près de 330 millions d’habitants.

La ville de New York, capitale financière et culturelle du pays, illustre bien la façon dont l’épidémie s’est brutalement emparée de la première puissance économique mondiale.

Les rassemblements de plus de 500 personnes sont interdits depuis jeudi, éteignant les théâtres de Broadway et l’intense vie culturelle de cette métropole de 8,5 millions d’habitants, une des principales destinations touristiques mondiales.

Times Square, aimant touristique de Manhattan, semblait anormalement calme vendredi à la mi-journée.  

« Quand on est arrivé hier soir, on ne savait pas que tout serait fermé. On est déçu, on essaie de déterminer ce qu’on peut voir ou non », a indiqué à l’AFP Sue Taylor-King, une Londonienne venue avec une amie pour cinq jours.

La mairie a démenti les rumeurs de fermeture du métro, mais les rames se sont vidées, même aux heures de pointe.  

Dans l’État le plus peuplé, la Californie, le gouverneur Gavin Newsom a interdit les rassemblements de plus de 250 personnes.   Le parc de Disneyland, à Los Angeles, a été fermé. Les écoles publiques de Los Angeles et San Diego – soit quelque 750 000 élèves – ont annoncé leur fermeture, sans fixer de date de réouverture.  

Plusieurs États, dont la Pennsylvanie, l’Ohio et le Maryland, tout comme la capitale Washington, ont aussi annoncé la fermeture des écoles publiques pour plusieurs semaines.  

Campagne présidentielle au ralenti

PHOTO CARLOS BARRIA, REUTERS

Le candidat à l’investiture démocrate, Joe Biden

Les grandes universités américaines ont cessé les cours physiques pour passer à l’enseignement en ligne, un casse-tête pour des centaines de milliers d’étudiants étrangers dont les visas interdisent en principe les cours en ligne.

L’industrie du sport, qui génère des dizaines de milliards de dollars par an, est également durement frappée. Après la suspension ou le report des saisons des grandes ligues que sont la NBA (basket), LNH (hockey), MLB (baseball) et MLS (soccer), le marathon de Boston, prévu en avril, a été reporté à septembre.

Même la campagne pour la présidentielle 2020 est ébranlée.  

Les rassemblements électoraux des deux candidats démocrates encore en lice pour défier Donald Trump en novembre, Joe Biden et Bernie Sanders, ont été suspendus, et le premier débat en face à face qui doit les opposer dimanche se déroulera sans spectateurs.  

Et la Louisiane a été le premier État à annoncer vendredi qu’il reportait à juin ses primaires en vue de la présidentielle, prévues début avril.