(Ottawa) Voulant montrer l’exemple, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, renoue avec Rideau Cottage, d’où il recommencera à travailler et à tenir ses conférences de presse, alors que de nouvelles projections évoquant le scénario de 20 000 cas quotidiens de COVID-19 ont été dévoilées.

« Je ne veux pas être ici, vous ne voulez pas que je sois ici – nous en avons tous marre de la COVID-19. Mais ce virus ne disparaîtra pas de sitôt », a-t-il lancé d’un ton las devant sa résidence d’Ottawa, d’où il prononçait ses discours pendant la première vague de la pandémie, le printemps dernier.

« On est en train de voir une montée fulgurante de cas », s’est inquiété Justin Trudeau.

« Ce n’est pas une bonne idée de planifier une soirée avec des amis. Ce n’est pas le temps de faire des partys ou des soupers. On connaît tous quelqu’un qui ne respecte pas les règles, et c’est frustrant, et ce n’est pas juste. Ces gens, ce sont eux qui rendent ça plus difficile pour les autres », a-t-il enchaîné à son lutrin.

Selon des informations qui ont circulé en coulisse, on n’a guère été enchanté, à Ottawa, d’entendre le premier ministre du Québec, François Legault, affirmer jeudi – la veille de la publication de la modélisation fédérale – que les rassemblements d’un maximum de 10 personnes seraient permis du 24 au 27 décembre.

Le premier ministre du Canada a toutefois assuré que, pour sa part, il n’était « pas du tout » mécontent du plan québécois qui prévoit « un moment de répit », que son homologue au Québec était « en train de faire tout ce qu’il peut » et qu’il reste par ailleurs « des semaines » avant que ne sonnent les cloches de Noël.

De toute manière, le fédéral n’est pas celui qui dicte les règles aux provinces et aux territoires, a-t-il plaidé. Son rôle « n’est pas de juger ou de critiquer les provinces », et celles-ci ont pris des mesures qui ont donné des résultats, a-t-il dit, citant en exemple la « bulle Atlantique » créée pour contrôler la propagation.

Le premier ministre Trudeau a indiqué qu’il travaillerait de la maison autant que possible dans les prochains jours, et qu’il serait de retour la semaine prochaine devant la porte de Rideau Cottage, maintenant décorée d’une couronne, pour s’adresser à la population canadienne.

S’éloignant à plusieurs reprises de ses notes écrites préparées, il a vigoureusement exhorté la population à avoir une pensée pour les travailleurs du réseau de la santé, qui ont « été des héros » alors que la première vague les submergeait, et qui sont aux prises avec la deuxième.

« Ils repoussent leurs propres limites pour nous protéger. Alors, faisons notre part pour les aider à protéger les plus vulnérables », a-t-il martelé en invitant de nouveau les Canadiens à télécharger l’application Alerte COVID, ce qu’ont déjà fait quelque 5,3 millions de personnes.

De nouvelles projections inquiétantes

Quelques heures auparavant, Ottawa avait dévoilé de sombres projections quant à la progression du virus.

Si l’administratrice en chef de l’Agence de la santé publique que Canada (ASPC), la Dre Theresa Tam, disait vendredi dernier que le Canada se dirigeait vers un nombre de 10 000 cas quotidiens de COVID-19, elle a présenté un scénario laissant présager une explosion du nombre de cas d’infection dans les prochains jours.

Car vendredi, en se fiant à la plus récente modélisation fédérale, la patronne de la Santé publique a prévenu que l’on pourrait atteindre 22 000 nouveaux cas quotidiens à l’échelle du pays, et ce, même si les Canadiens maintenaient le même niveau de contacts.

TABLEAU FOURNI PAR L’AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA

Et si le nombre de contacts augmentait, le nombre de cas quotidiens monterait en flèche en décembre pour atteindre les 60 000. En ce moment, la moyenne quotidienne est de près de 4800 nouveaux cas par jour, au pays.

TABLEAU FOURNI PAR L’AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA

« Avec la saison des Fêtes qui approche, ce ne sera pas facile », a affirmé la ministre fédérale de la Santé, Patty Hajdu, présente aux côtés de la Dre Tam. « Mais je sais que nous pouvons être créatifs », a-t-elle fait valoir.

Le document des autorités fédérales souligne que l’on a observé « un nombre accru de grandes éclosions (plus de 50 personnes) touchant à la fois les établissements de soins de longue durée et les milieux de soins » et que « les communautés autochtones voient maintenant leur nombre de cas augmenter rapidement ».

Pour ce qui est des prévisions à court terme, l’ASPC calcule qu’il y aura de 366 500 à 378 600 cas d’ici le 30 novembre, et de 11 870 à 12 120 morts liées à COVID-19 à l’échelle nationale.

CARTE FOURNIE PAR L’AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA

Invité à commenter le relâchement à venir au Québec pour les Fêtes, le sous-administrateur de l’ASPC, le DHoward Njoo, a indiqué qu’il était « d’accord » avec le calendrier Legault, et que « c’est vraiment les autorités de la province qui sont les plus au courant, qui connaissent mieux la réalité sur le terrain ».

— Avec La Presse Canadienne