La COVID-19 sévit dans le monde depuis neuf mois, et si elle demeure un mystère à maints égards, on commence à mieux la comprendre. Que nous ont appris la pratique et les études ? Quel est l’état actuel des connaissances alors que les statistiques à la hausse font aussi monter une certaine tension ambiante ?

Pendant un bref moment, les Centres pour le contrôle des maladies (CDC) américains (l’équivalent de Santé Canada) ont publié ces derniers jours sur leur site – avant de la retirer rapidement – une note voulant que la COVID-19 se transmette aussi de façon importante par voie aérienne – les fameux aérosols. C’était un « brouillon » transmis « prématurément par erreur », ont fini par dire les CDC américains. Que penser de cette valse-hésitation ?

David Kaiser, médecin responsable de la santé environnementale à la Direction de santé publique de Montréal, explique :

« Chaque fois que l’on parle du virus aéroporté, ça cause beaucoup d’émoi. On ne peut pas dire que la maladie se transporte uniquement par gouttelettes, mais les gouttelettes continuent de demeurer à notre avis le mode de transmission prépondérant. Ce n’est donc pas comme le virus de la rougeole qui, lui, peut bel et bien rester dans l’air très longtemps. À noter aussi qu’une gouttelette peut être projetée plus loin dans certains contextes, comme lorsque quelqu’un chante, parle ou éternue. »

Les chiffres sont à la hausse dans tout l’hémisphère Nord. Pourquoi maintenant ?

DKaiser : « Peut-être les rayons du soleil ont-ils offert un effet protecteur ? Avec le déconfinement, on avait prévu que les chiffres remonteraient. Ça, c’est la contrepartie inévitable à une certaine vie sociale, que l’on a souhaitée, collectivement. Par contre, on a une prise sur plusieurs autres cas, qui sont plutôt attribuables à des comportements à éviter : des gens malades qui ne s’isolent pas, des partys à 50 personnes… »

Avec le temps frais qui revient, les parents en perdent leur latin. Quand faut-il garder ses enfants à la maison ? Y a-t-il un symptôme-clé à surveiller plus que les autres ?

DKaiser : « Si l’enfant a une toux, un nez qui coule, une fièvre ou des symptômes gastro-intestinaux – un seul de ces symptômes –, on le garde à la maison 24 heures. Après 24 heures, si l’enfant a des symptômes qui s’apparentent davantage à la COVID-19 – de la fièvre, notamment –, on recommande un dépistage. (Mais bien sûr, si l’enfant est connu pour de l’asthme et qu’il tousse comme d’habitude, ce n’est pas la même chose.) Nous sommes conscients que les enfants sont nombreux à ce temps-ci de l’année à avoir toutes sortes de symptômes, mais on recommande vraiment de les garder 24 heures à la maison et de les surveiller lorsqu’un des symptômes mentionnés apparaît. »

S’il y a un cas à l’école – ou dans notre entourage adulte –, à quel moment devrait-on faire le test ?

DKaiser : « On attend que l’incubation fasse son œuvre. On recommande un test au jour 5, puis au jour 12. »

Quand l’enfant revient de l’école, faut-il changer ses vêtements, les mettre au lavage ?

DKaiser : « L’important, au retour de l’école, c’est un bon lavage de mains. Inutile de laver les vêtements, mais le couvre-visage, oui, tous les jours. Cela fait neuf mois que la COVID-19 circule dans le monde et on est de plus en plus sûrs que la transmission indirecte n’est pas importante. On ne peut pas dire qu’elle n’existe pas du tout, et c’est la raison pour laquelle dans un CHSLD qui a eu 100 cas ou dans un hôpital, on ne prend pas de risque et on nettoie à fond les surfaces. Mais à la maison, dans la vie quotidienne, rien dans les données ne nous indique que ce soit problématique. »

Inutile, donc, de nettoyer tous les jours l’ordinateur qui est commun à toute la famille ou la télécommande ?

DKaiser : « On peut choisir d’être prudent, notamment parce que la saison des rhumes et de la gastro approche, mais non, ce n’est pas une source de transmission importante, pas plus que les achats faits à l’épicerie ou au magasin. »

Et à l’école ? Des enseignantes confessent être devenues des « mesdames Blancheville » très dépendantes du « push-push » à tout vent ! Ont-elles raison de laisser les devoirs, dictées et livres en quarantaine lorsqu’ils ont transité par de petites mains ? De nettoyer sans cesse les tableaux et autres objets ?

DKaiser : « Cela a été une rentrée très exigeante pour les enseignants, alors s’ils se sentent plus en sécurité en y allant de précautions supplémentaires, aucun problème. Mais ce n’est pas le sac d’école ou le devoir qui est contagieux, mais bien l’enfant atteint. »

Les personnes vulnérables, qu’elles soient âgées ou malades, doivent-elles éviter de se rendre à l’épicerie ou d’aller au restaurant ?

DKaiser : « Si le restaurant n’est pas bondé, ce peut être une bonne affaire de sortir de chez soi. Mais si on peut aller à l’épicerie une seule fois par semaine plutôt que deux, c’est mieux, tout comme d’envoyer quelqu’un d’autre faire ses courses. »

On a craint à un moment donné que des anti-inflammatoires puissent donner une grosse erre d’aller au virus. Qu’en est-il finalement ? Des classes de médicaments doivent-elles être évitées ?

DKaiser : « Les gens ne doivent pas cesser de prendre un médicament dont ils ont besoin sans en parler à leur médecin ou à leur pharmacien. À ce jour, pour les anti-inflammatoires comme pour toute autre classe de médicaments, on n’a pas de réponse claire quant à une possible interaction. Mais par pure précaution, si votre enfant a de la fièvre, on peut choisir de lui donner du Tylenol ou du Tempra plutôt qu’un anti-inflammatoire. »

Si un proche, dans notre maison, est atteint de la COVID-19, comment faut-il se protéger ?

La Dre Elisabeth Lajoie, médecin spécialiste à la Direction de santé publique de la Montérégie, nous répond.

« À la maison, si quelqu’un est atteint de la COVID-19, la personne malade n’a pas à porter de couvre-visage si elle est bien isolée. Mais si elle se déplace dans le domicile et qu’elle risque de se rapprocher de ses proches sains, tous devraient le porter, tout en respectant une bonne distanciation et une bonne hygiène des mains », a indiqué lundi la Dre Elisabeth Lajoie, coauteure d’une étude toute fraîche de l’Institut national de santé publique sur l’efficacité relative de diverses mesures barrières.

Quel couvre-visage faut-il porter ?

Selon la Dre Lajoie, le masque chirurgical ou le masque de procédure de qualité médicale « peut prévenir de 4 à 8 infections sur 100 personnes qui pourraient être exposées au virus ». « Là-dessus, les résultats sont clairs, il n’y a pas de doute sur l’efficacité » des masques de procédure, dit-elle.

D’un point de vue de la santé publique, cette diminution du risque d’infection est importante, poursuit la Dre Lajoie, parce que « chacune de ces infections qui peuvent ainsi être prévenues vont éviter de multiples infections subséquentes ».

Pour ce qui est du masque artisanal – dont l’usage est tout récent –, il manque présentement d’études sur son efficacité, mais l’Institut national de santé publique insiste : ce n’est pas parce qu’il manque actuellement de données scientifiques fiables sur son efficacité pratique dans la population générale qu’il ne l’est pas.

A-t-on raison de se sentir plus en sécurité dehors ?

La Dre Parisa A. Ariya, professeure au département de chimie et des sciences atmosphériques et océaniques de l’Université McGill : « À mesure que le temps se refroidit, l’extérieur ne sera plus aussi sûr que nous l’avons supposé pendant l’été pour des raisons de ‟piégeage de particules” et de densité de l’air. Dehors, ça demeurera préférable qu’à l’intérieur, mais tant qu’on n’aura pas un vaccin fiable, le port du masque, y compris quand il y a des gens autour de soi, est important. »

Les voyages en avion devraient-ils reprendre ?

Contrairement à la Santé publique québécoise, la Dre Ariya considère que la transmission de la COVID-19 sous forme d’aérosols est importante, « que les particules sous forme d’aérosols peuvent rester en suspension dans l’air et être respirées par autrui ». Cela étant, les voyages en avion ne devraient selon elle n’être effectués « que lorsque cela est absolument nécessaire » pendant cette pandémie.

Les enfants transmettent-ils autant la COVID-19 que les autres maladies respiratoires ?

En juillet, Valérie Lamarre, spécialiste des maladies infectieuses au CHU Sainte-Justine, indiquait à La Presse que « les enfants sont un vecteur moins important de transmission pour la COVID-19 que pour les autres virus respiratoires. Les enfants sont moins malades et ont moins de symptômes. Il y a moins de nez qui coulent avec la COVID-19 […] et ils toussent moins », ce qui émet moins de ces gouttelettes problématiques avec la COVID-19.

Les Montréalais – qui sont en zone orange – peuvent-ils aller au chalet ?

La Dre Mylène Drouin, directrice régionale de santé publique à Montréal, a indiqué que les déplacements non essentiels doivent être limités au maximum entre Montréal et les autres régions. Les déplacements entre Montréal et les couronnes nord ou sud (qui sont toujours en zone jaune) – sont permis pour aller au travail ou pour aller s’occuper d’un proche, par exemple.