Une étude émanant de Californie indique que le virus responsable de la COVID-19 est peut-être arrivé aux États-Unis dès décembre, plusieurs semaines avant qu’un premier cas ne soit officiellement détecté par les autorités sanitaires du pays, à la mi-janvier.

La recherche, menée par une équipe de chercheurs de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), a permis de constater que le nombre de patients se plaignant de toux en clinique ou aux urgences avait bondi à partir du 22 décembre et qu’il était demeuré supérieur d’environ 50 % à la moyenne des années précédentes jusqu’à la fin février.

Le nombre de personnes souffrant de difficultés respiratoires aiguës à l’hôpital a aussi augmenté sensiblement durant cette période.

Les résultats, obtenus à partir de l’examen de dossiers électroniques, suggèrent que le virus a pu circuler dans la communauté avant même que le public ne prenne véritablement conscience des risques posés par la pandémie et que des mesures de dépistage appropriées ne soient mises en place.

« Il faut se souvenir qu’on n’a pas eu de test fiable aux États-Unis avant mars, voire avril, à certains endroits », explique en entrevue la professeure de médecine de l’UCLA responsable de l’étude, la Dre Joanne Elmure.

Faute de tests, il est impossible de conclure catégoriquement, dit-elle, que la hausse observée durant la période considérée était imputable à des cas de COVID-19 non diagnostiqués.

D’autres facteurs, dont l’apparition de difficultés respiratoires associées au vapotage ou une fluctuation anormale du nombre de cas de grippe, ont pu contribuer à l’écart statistique observé par rapport aux années précédentes.

Il serait cependant surprenant que le nouveau coronavirus ne soit pas en cause, si l’on considère l’ampleur de l’écart en question, souligne la DElmure.

Le fait que les résultats cadrent avec des recherches faites dans plusieurs autres pays tend par ailleurs à renforcer cette conclusion, dit-elle.

En Italie, des chercheurs de l’Institut supérieur de la santé ont repéré cet été des traces du virus dans des échantillons d’eaux usées de Milan et Turin qui avaient été prélevés le 18 décembre.

Le SARS-CoV-2 a aussi été retrouvé dans un échantillon prélevé à Bologne le 29 janvier, alors que le premier cas officiel dans le pays datait de la fin février.

En Espagne, des traces du virus ont été retrouvées dans des eaux usées datant de la mi-janvier, plus d’un mois avant la détection formelle d’un premier cas.

En France, l’infection à la COVID-19 d’un patient a été confirmée en mai à partir d’un échantillon prélevé en décembre, là encore bien avant la détection officielle d’un premier cas.

Scénario « peu probable » au Québec

L’Institut national de santé publique du Québec a cherché cet été à voir s’il était possible que le virus soit aussi arrivé plus tôt qu’on ne le croyait dans la province en réexaminant des échantillons qui avaient été prélevés notamment durant l’hiver dans le cadre du programme de surveillance de l’influenza.

L’exercice n’a pas permis de découvrir de cas de COVID-19 antérieurs au premier cas officiellement recensé par le ministère de la Santé et des Services sociaux à la fin février.

Le DHugues Charest, qui chapeautait l’exercice, a indiqué vendredi par courriel qu’il est « peu probable », à la lumière de ces résultats, que le SARS-CoV-2 ait pu être en circulation dans les semaines ou les mois précédents.

Des Québécois demeurent malgré tout convaincus d’avoir contracté le virus avant la fin février. Emmanuelle Francœur, qui réside depuis plusieurs années à Los Angeles, a connu de graves difficultés respiratoires lors d’un séjour au Québec fin décembre avant de rentrer aux États-Unis. Elle a eu la confirmation plusieurs mois plus tard, en passant un test sérologique, qu’elle avait développé des anticorps contre la COVID-19.

Mme Francœur a relevé vendredi que l’étude de l’UCLA évoquant la circulation possible du virus dès décembre à Los Angeles suggère qu’elle a bel et bien pu être infectée dans sa ville d’adoption avant de visiter le Québec.

Il est aussi possible, comme l’ont suggéré des chercheurs à La Presse, que son infection à la COVID-19 soit survenue à son insu plusieurs mois plus tard sans qu’elle présente de symptômes et que ce soit cet épisode qui ait mené au test sérologique positif.

La Québécoise, qui participe à une étude sur l’utilisation du plasma convalescent, relève que les chercheurs ont confirmé une concentration importante d’anticorps dans son sang, ce qui tendrait, selon elle, à écarter la possibilité d’une infection mineure.

La Dre Elmure note que le manque de données concluantes quant à la production d’anticorps en cas d’infection et le temps pendant lequel ils demeurent dans le sang rend hasardeuse toute hypothèse quant au moment où Mme Francœur a pu contracter la COVID-19.

« Je ne pourrai peut-être jamais savoir », dit cette dernière.