(QUÉBEC) Votre région sera-t-elle « jaune » ou « verte » ? Attention, si c’est « rouge », tout fermera comme en avril ! Pour baisser la tension dans les régions où la COVID-19 est moins présente, le gouvernement Legault se prépare à annoncer la mise sur pied d’un système de « niveaux d’alerte » permettant de classer dans quatre groupes les régions du Québec. Les étiquettes passeront du rouge, dénotant un haut risque, au vert, des éclosions mineures, en passant par le jaune et le bleu.

Les règles quant à la distanciation et les fermetures de commerces et de lieux publics varieront selon la dangerosité estimée dans votre région. Au gouvernement, on est soucieux de ne pas donner l’impression, à nouveau, de freiner l’économie. Dans les régions qui ont présenté peu de cas, l’opposition au port du masque est palpable, et les scénarios de « refermeture » associés à une seconde vague ne passent pas la rampe dans l’opinion publique.

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Barrage routier à Val-David, dans les Laurentides, en pleine crise de COVID-19, le 20 avril dernier

La volte-face récente du gouvernement sur les programmes sport-études et les activités parascolaires illustre cette sensibilité. Devant le tollé des parents, François Legault a vite jeté du lest sur la mesure que venait d’annoncer son ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge.

Les derniers seront les premiers

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a publiquement tracé une ligne très basse en plaçant le seuil d’alerte à 20 cas positifs à la COVID-19 par million d’individus. Chaque jour, on s’en rapproche, on dépasse régulièrement les 100 cas par jour, et les spécialistes entrevoient le moment où on atteindra 200 cas. En coulisses, on entend que le ministre souhaitait placer la barre plus haut, mais que la Santé publique a imposé son veto.

Dans les coulisses, à Québec, on fait le pari qu’au printemps 2021, un vaccin aura été trouvé ou que, à tout le moins, on aura déterminé quels médicaments contribuent à stopper la pandémie qui frappe le Québec et son économie depuis mars dernier. Fruit de discussions entre la Santé publique, le ministère de la Santé et les conseillers politiques, un système de classement sera prévu, pour évaluer les risques de flambées de contagions.

À Québec, on tient à garder une « approche modérée » parce qu’on s’attend à devoir vivre avec le virus plusieurs mois encore. Trop de fermeté multiplie le nombre de délinquants, observe-t-on.

Si la pandémie réapparaît, de nouvelles fermetures seront décrétées. Elles surviendront dans l’ordre inverse des ouvertures ; les restaurants, les bars et les gymnases ont été les derniers à rouvrir, ils seraient les premiers à cesser leurs activités. Chez François Legault, semble-t-il, on commence à s’impatienter sérieusement devant le laxisme dans certains bars – une quarantaine de cas prennent leur source dans un seul établissement de Québec. Un « signal fort » pourrait tomber vite dans certaines régions. La taille des assemblées à l’intérieur réduirait, comme elle a augmenté en mai et juin. On croise les doigts en soutenant que, pour l’heure, les écoles primaires et secondaires ne semblent pas des lieux fréquents d’éclosions.

Un peu comme pour le risque d’incendie de forêt, on évaluera les régions selon le nombre de cas constatés, les risques de diffusion dans la population et la situation sociosanitaire locale. On évaluera aussi le ratio de contacts par nouveau cas. C’est connu depuis le début, une région comme le Saguenay n’a guère été touchée. Si le système d’alerte était en place, la région serait verte, présentant peu de risques de propagation de la maladie. Les régions de Montréal et, plus récemment, de Québec seraient probablement étiquetées « jaune », pour rappeler à la population qu’elle doit toujours faire preuve de prudence. L’évaluation tiendra compte aussi de la disponibilité des lits de soins intensifs du côté des hôpitaux.

Ce qui est encore en évaluation, c’est la façon de délimiter les territoires. Le recours aux régions administratives a ses limites – distinguera-t-on les Hautes-Laurentides des Basses-Laurentides ? La fluidité des déplacements dans la région métropolitaine laisse prévoir qu’on optera pour une zone Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), plutôt que de se limiter à la ville ou à l’île. Il serait impensable de confiner Montréal tout en laissant ouverts Longueuil ou Laval.

Dans l’expectative

Vous avez hâte au printemps 2021 ? François Legault aussi probablement. Toute la machine administrative à Québec est dans l’expectative d’une seconde vague de la pandémie. Sera-t-on durement frappé ? Dans l’expectative, on n’a pas encore la moindre idée de la mise à jour économique du ministre des Finances, Eric Girard, prévue pour novembre. On sait toutefois qu’avec ses prévisions sur cinq ans, il n’aura pas à décréter des hausses de taxes ou d’impôts avant les prochaines élections.

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François Legault, premier ministre du Québec

Si la pandémie paraît résorbée en début d’année, Legault pourrait être tenté d’y aller d’un message inaugural, de démarrer une nouvelle législature avec un menu renouvelé. Si on nage encore dans la COVID-19, il faut s’attendre à ce que cette nouvelle mise en jeu soit reportée au printemps.

Chose certaine, le ministre responsable du dossier linguistique, Simon Jolin-Barrette, n’a pas fini de ronger son frein ; le plan de réforme linguistique susceptible de lui donner un peu de visibilité attendra l’an prochain. Dans ce qui tombera à court terme, il faut prévoir une décision quant à l’avenir de l’ancien patron de la Sûreté du Québec, Martin Prud’homme, et au fameux plan vert du ministre de l’Environnement, Benoît Charrette, qui misera sur l’électrification des transports.