Même dans les régions peu touchées par la pandémie, le déconfinement et le relâchement des mesures de précaution inquiètent les autorités sanitaires. La Côte-Nord, le Saguenay–Lac-Saint-Jean et l’Outaouais lancent des messages à leur population.

Avec seulement 120 cas confirmés à ce jour, la population de la Côte-Nord peut facilement avoir l’impression de vivre dans une bulle protégée. Faux, souligne le président-directeur général par intérim du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Côte-Nord, Claude Lévesque.

« Les frontières sont largement ouvertes au moment où on se parle, la Côte-Nord est très prisée sur le plan touristique, et je vous dirais que ça m’inquiète énormément », a déclaré M. Lévesque à sa première rencontre avec les médias, mardi.

Nommé le 23 juin et entré officiellement en fonction le 1er juillet, le nouveau PDG s’est dit surpris d’être l’un des rares à porter le masque dans les magasins de la région.

On constate que la population fait des regroupements assez surprenants. On constate que dans les bars ou dans les restaurants, bien que les proprios respectent une certaine forme de distanciation physique […], il en est tout autre de la part de notre population.

Claude Lévesque, président-directeur général par intérim du CISSS de la Côte-Nord

Avec la confirmation d’un nouveau cas mercredi, une personne qui n’est pas sortie de sa région (la Minganie) et qui ne présentait pas de symptômes au moment du dépistage, le CISSS a tenu un nouveau point de presse pour enfoncer le clou.

« Donc oui, on peut rester sur la Côte-Nord et être exposés à la COVID-19. C’est pour cette raison que nous devons adopter les mesures qui pourront nous permettre de vivre avec le virus », a martelé le DRichard Fachehoun, médecin-conseil en santé publique.

Claude Lévesque s’est donc attelé à un plan de communication « pour redonner un peu à la population l’image du risque ». « On veut pas être méchants, on veut juste être capables d’indiquer aux gens qu’il ne faut pas revenir en arrière », a expliqué celui qui dit vouloir procéder « le plus rapidement possible ».

Offensive au Saguenay–Lac-Saint-Jean

La Santé publique du Saguenay–Lac-Saint-Jean vient de lancer une vidéo dans laquelle une douzaine de personnalités locales se livrent à des activités en rappelant les mesures de prévention. On y voit notamment l’entraîneur des Saguenéens, Yanick Jean, sur un terrain de golf, la ministre responsable de la région, Andrée Laforest, faire son jogging, et la directrice générale du zoo de Saint-Félicien, Lauraine Gagnon, entourée d’ours.

« Ce qu’on cherche à faire, c’est démontrer que ça va durer encore un certain temps, la COVID […], mais il faut vivre à travers tout ça », a expliqué le directeur de santé publique du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Saguenay–Lac-Saint-Jean, le DDonald Aubin, en entrevue avec La Presse.

De l’affichage routier et des capsules radio s’ajouteront bientôt sur le territoire, où cinq nouveaux cas ont été enregistrés depuis le début de la semaine. « Un petit nombre », reconnaît le DAubin. Mais pour une région qui a passé des jours sans nouveau cas et qui en comptait seulement 330 auparavant, « ça représente quand même une surprise pour les gens ». D’autant que les enquêtes épidémiologiques n’ont trouvé aucun lien entre ces cinq personnes. « Ça inquiète aussi parce que ça veut dire que la circulation est probablement plus en sourdine qu’on peut l’imaginer », note le DAubin, qui est aussi directeur de santé publique par intérim du CISSS de la Côte-Nord.

De plus, le nombre moyen de contacts par personne infectée augmente : de 3,6 en mai, il est passé à 6,4 en juin et tourne actuellement autour de 20. « On voit que les gens ont plus de contacts, donc on peut voir que la capacité de se propager est plus importante. On est vraiment dans un autre contexte, on est dans un contexte où il y a eu de grosses fêtes », souligne le DAubin.

L’Outaouais aussi

L’Outaouais qui, jusqu’à tout récemment, avait enregistré seulement 598 tests positifs depuis le début de la pandémie, a vu le nombre de diagnostics recommencer à augmenter lundi. L’ajout de 11 cas en trois jours a convaincu le CISSS de tenir un point de presse mercredi.

« Ça a des conséquences quand le virus circule dans la communauté », a souligné Carol McConnery, médecin-conseil à la Direction de santé publique, en évoquant « des gens plus à risque qui peuvent être contaminés, des gens qui se font mettre en isolement ». Un isolement de 14 jours, « ça a des impacts aussi sur les milieux de travail. Vous avez vu, il y a des commerces qui ont été obligés de fermer, des familles qui ont perdu des revenus », a souligné la Dre McConnery.

Comme ses confrères des autres régions, la médecin de santé publique a réitéré l’importance des mesures de prévention. « Ça fait presque quatre mois qu’on le répète, mais c’est encore en vigueur. »

13 morts de plus

Le bilan de la province s’est alourdi de 13 morts depuis mardi, soit 6 enregistrées aux cours des 24 heures précédentes, et 7 autres survenues avant le 30 juin, a annoncé Québec mercredi. Un total de 5603 morts ont ainsi été attribuées à la COVID-19 à ce jour. De plus, 82 cas supplémentaires ont été diagnostiqués, portant le nombre de personnes infectées à 56 079. Parmi celles-ci, 331 sont toujours hospitalisées, dont 27 aux soins intensifs. Le nombre total de patients hospitalisés a diminué de 16 depuis la veille, mais on compte une personne de plus aux soins intensifs.

Vers une application

Le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale, Éric Caire, a lancé une consultation publique mercredi pour prendre le pouls de la population québécoise au sujet de l’éventuel déploiement d’une application de suivi des contacts.

« Si les Québécois nous disent, dans un nombre qui est significatif, ‟oui”, alors oui, on pourrait aller de l’avant », a expliqué le ministre Caire à Québec. « Mais si les Québécois nous disent, dans un nombre tout aussi significatif, ‟non”, à ce moment-là, on sait que c’est voué à l’échec. Alors pourquoi aller de l’avant ? »

Une telle application mobile exclurait toute forme de géolocalisation, d’utilisation de marqueurs biométriques et de stockage de renseignements personnels, a précisé M. Caire. L’application gratuite utiliserait plutôt la technologie Bluetooth afin d’échanger un identifiant aléatoire avec d’autres téléphones intelligents à proximité.

La consultation en format numérique est accessible jusqu’au 2 août.

– Avec La Presse canadienne