(Vancouver) Les cliniciens et les épidémiologistes ne savent pas encore si la COVID-19 a des effets sur la grossesse, reconnaît la responsable d’un réseau national récemment formé pour combler ces lacunes.

« Nous avons parcouru la littérature et trouvé une quantité vraiment limitée d’informations, bien sûr, au début, en provenance de Chine et un peu plus d’Europe », mentionne la Dre Deborah Money, de la faculté de médecine de l’Université de la Colombie-Britannique.

Ces renseignements étaient d’une grande variété et se contredisaient. « Des prédications assez affreuses sur ce qui pourrait arriver jusqu’à des lectures plus bénignes », dit cette spécialiste des maladies infectieuses liées à la reproduction.

La Dre Money dirige un groupe de médecins et des chercheurs qui étudient les répercussions de la COVID-19 chez les femmes enceintes.

Elle dit avoir obtenu la collaboration de toutes les provinces et de tous les territoires pour collecter des données.

« Nous espérons réellement obtenir des données de chaque femme enceinte ayant contracté la COVID-19, quel que soit le moment où elle a été atteinte par le virus. Nous voulons des données pendant toute l’évolution de la pandémie », explique la Dre Money.

Les chercheurs se concentrent sur des variables comme l’âge de la mère, l’âge du fœtus, la gravité de l’infection et si la mère a dû être hospitalisée ou envoyée aux soins intensifs. Ils examinent également ce qui se passe pendant l’accouchement et si la mère choisit d’allaiter, ainsi que le poids du nouveau-né, ajoute-t-elle.

Certains collègues de la Dre Money explorent les expériences des femmes enceintes pendant leur grossesse pendant l’ensemble de la pandémie, qu’elles aient contracté la maladie ou non.

La professeure siège également au comité des maladies infectieuses de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, dont les membres travaillent à fournir des lignes directrices pour les femmes enceintes et les nouveaux parents pendant la pandémie.

La Dre Money signale que les cliniciens canadiens ont adopté une approche différente de celle de leurs homologues chinois et américains en ce qui concerne les accouchements et les soins postnatals.

« Nous n’avons pas fait ce que d’autres endroits ont fait, c’est-à-dire séparer le bébé de la mère si celle-ci a contracté la COVID-19 », souligne-t-elle.

Les médecins canadiens, se basant sur les leçons apprises pendant les crises du SRAS et du H1N1, préfèrent favoriser les liens affectifs rapprochés. Les nouveau-nés et les mères atteintes par la COVID-19 sont généralement maintenus ensemble, sauf dans les cas les plus graves.

La Dre Money dit que les avantages de permettre le contact entre la mère et son bébé sont nombreux, pourvu que les parents portent un masque et respectent strictement un éventail de précautions.

La probabilité de transmission par le lait maternel est quasi nulle, signale-t-elle.

Elle conseille aux mères présentant des symptômes bénins de ne pas câliner ou de s’asseoir avec leur bébé quand elles n’allaitent pas. Elle leur recommande aussi de se laver souvent les mains.

« Nous n’avons pas vu un taux de transmission élevé dans ce contexte. Donc, si on fait super attention, cela semble raisonnablement sûr. »

Les précédentes recherches ont indiqué que les virus transmettant des maladies respiratoires ne traversent pas le placenta et ne provoquent pas d’infection chez les fœtus.

D’autres recherches sont en cours, mais les cliniciens pensent que c’est également le cas pour le nouveau coronavirus.

« Les bébés, pour la plupart, semblent aller bien, mentionne la Dre Money. Nous en sommes aux premiers jours et nous devons ajouter une certaine prudence à ce sujet jusqu’à ce que nous suivions pleinement ces nourrissons à plus long terme. Mais de manière générale, nous sommes très rassurants. »

Cependant, elle reconnaît que si la femme enceinte devenait gravement affectée par la COVID-19 et finissait en soins intensifs, cela pourrait nuire au fœtus.