(Ottawa) Tandis que la pandémie de COVID-19 continue d’infecter des gens à travers le pays, les autorités de la santé publique demandent aux Canadiens de faire des dons de sang, mais cet appel exclut les homosexuels qui ne sont pas abstinents depuis trois mois.

Cette norme de Santé Canada est décriée et un député néo-démocrate de la Colombie-Britannique, Randall Garrison, joint sa voix à celles qui s’élèvent pour demander au premier ministre Justin Trudeau d’honorer la promesse que les libéraux ont faite en 2015 pour lever cette interdiction.

Selon M. Garrison, la mesure est discriminatoire envers les hommes gais et bisexuels et entretient des préjugés envers les personnes transgenres. Il estime que « cette interdiction perpétue l’homophobie et la transphobie ».

PHOTO FRED CHARTRAND, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le député néo-démocrate Randall Garrison

Pour le député de la circonscription Esquimalt—Saanich—Sooke, cette mesure stigmatise des gens qui sont en couple depuis longtemps comme lui, qui a le même partenaire depuis 20 ans, sans pouvoir faire un don de sang.

Sur le site web d’Héma-Québec, on explique cette mesure par « la fréquence d’infection au VIH qui demeure aujourd’hui beaucoup plus élevée chez les hommes ayant eu une relation sexuelle avec un homme que dans la population générale. La prévalence du VIH se situe à près de 15 % chez ce groupe par rapport à bien moins de 1 % chez les hétérosexuels ou les lesbiennes. »

L’interdiction aux homosexuels de faire un don de sang ou de plasma a été mise en œuvre en 1992, dans la foulée du scandale de sang contaminé au Canada où des milliers de Canadiens ont été infectés par le virus du sida (VIH) ou par l’hépatite C après une transfusion sanguine ou avoir reçu des produits sanguins.

Les normes ont été assouplies au fil des ans pour réduire la période d’abstinence requise aux donneurs de sang homosexuels.

À l’élection de 2015, qui a permis à Justin Trudeau de prendre le pouvoir, les libéraux avaient promis de mettre fin à l’interdiction de don de sang visant les hommes ayant eu des relations sexuelles avec des partenaires du même sexe.

Depuis ce temps, les libéraux ont investi 3 millions dans la recherche et la mise en œuvre d’un modèle fondé sur le comportement des individus et non l’orientation sexuelle.

Lors de son point de presse quotidien pour faire le bilan de la pandémie de COVID-19, vendredi, M. Trudeau s’est fait demander pourquoi cette promesse n’a pas encore été tenue.

« Depuis le début, nous avons reconnu que nous avions besoin de changer les protocoles pour permettre des dons de sang de tout le monde. C’est pour ça qu’on a investi dans Héma-Québec et les services de sang canadiens des millions de dollars pour qu’ils puissent faire les recherches, faire les études nécessaires pour encrer dans la science et dans la sécurité les nouvelles mesures qu’ils pourraient adopter. »

La promesse électorale a refait surface avant le scrutin de 2019, mais il n’y a encore eu aucun progrès.

Une motion du député Randall Garrison déposée plus tôt cette semaine aux Communes exhorte le gouvernement fédéral à lever cette interdiction, notamment en raison des besoins en dons de sang durant la pandémie de COVID-19, la deuxième qu’il présente sur ce sujet depuis six ans.

Il souligne son incompréhension devant cette situation.

« Il y a des pénuries de sang. C’est la Semaine nationale du don de sang et la Société canadienne du sang est partout dans les médias à Victoria pour implorer les gens à donner du sang. Pourtant, l’une des façons d’augmenter les réserves de produits sanguins c’est en levant cette interdiction », a plaidé M. Garrison.

Le premier ministre Trudeau a reconnu que le processus actuel est discriminatoire envers la communauté LGBT.

« On espère qu’on aura de bonnes choses à annoncer d’ici peu, » a-t-il ajouté.

La Société canadienne du sang encourage aussi les Canadiens qui ont guéri de la COVID-19 à donner du plasma dans le cadre de la recherche et des essais cliniques au pays sur l’utilisation du plasma convalescent dans la lutte contre le nouveau coronavirus.