(Montréal) Des milliers d’églises à travers le Canada ont suspendu leurs célébrations en personne de l’eucharistie pour éviter la propagation du nouveau coronavirus et ces fermetures ont rendu une situation déjà difficile encore plus complexe, notamment au Québec, là où les églises sont de moins en moins achalandées depuis quelques décennies.

Habituellement, l’église Saint-Alphonse, à Thetford Mines, organise trois messes par week-end : une le samedi et deux le dimanche. Cependant, aucun service n’a été tenu depuis plusieurs semaines.

« Nous ne sommes pas en péril », insiste le curé de la paroisse Saint-Alexandre, Jean-Luc Laflamme, mais l’impact économique de la pandémie de la COVID-19 est réel.

M. Laflamme observe qu’entre 5000 $ et 6000 $ étaient amassés chaque mois au cours de la collecte pendant les messes hebdomadaires. Des dons sont aussi amassés pendant les funérailles, mais ces cérémonies ont aussi été interdites.

Pendant ce temps, l’église Saint-Alphonse doit continuer d’être chauffée, ce qui représente une dépense d’environ 25 000 $ par année, dit M. Laflamme. Il y a aussi d’autres dépenses comme les assurances et l’entretien de l’immeuble.

M. Laflamme souligne que des employés de soutien à temps partiel ont dû être mis à pied temporairement jusqu’à la reprise des activités régulières.

Certains employés ont demandé la Prestation canadienne d’urgence et le diocèse prévoit faire une demande pour la Subvention salariale d’urgence du Canada.

Andréanne Jalbert-Laramée est conseillère en patrimoine culturel au Conseil du patrimoine religieux du Québec, une organisation à but non lucratif qui a pour mission de soutenir et de promouvoir la conservation et la mise en valeur du patrimoine religieux québécois. Elle croit que même si l’impact de la pandémie de la COVID-19 sur les églises du Québec est encore inconnu, il est fort probable qu’il soit considérable puisque la situation était déjà difficile avant la crise.

Plusieurs églises géraient déjà des budgets limités et se fiaient à l’aide de bénévoles vieillissants pour les aider.

« Elles ont été capables de survivre avec des moyens limités, mais c’est souvent miraculeux », dit Mme Jalbert-Laramée.

La place de l’Église catholique dans le quotidien des Québécois est sur le déclin depuis des années. Selon l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011, près de 75 % des Québécois s’identifient comme catholique. Cependant, moins d’une personne sur 10 dit assister souvent à des services religieux, le plus faible taux au Canada, selon un sondage Léger effectué en mai 2019.

Sur la Rive-Sud, Paul De Leeuw mentionne que sa paroisse a connu une chute de 30 % de ses revenus depuis la fermeture en lien à la pandémie à la mi-mars.

Les chefs religieux hésitent à demander l’aide des membres de leur paroisse en raison de la situation financière de nombreuses familles pendant la crise.

« C’est difficile de demander de l’aide quand des gens perdent leur emploi », souligne M. De Leeuw.

Le diocèse St-Jean-de-Longueuil a déjà vendu 28 églises au cours des 15 dernières années en raison d’un manque de fonds, indique M. De Leeuw, et plus de la moitié de ses 45 paroisses ne peut couvrir ses opérations quotidiennes présentement.

M. De Leeuw dit espérer que les paroisses passeront à travers la pandémie sans subir de pertes économiques majeures. En attendant, le diocèse utilise ses réserves financières pour payer les prêtres et le personnel de soutien tout en évitant les mises à pied.

Et alors que le déconfinement a commencé la semaine dernière hors de la région montréalaise, on ne sait toujours pas quand les services religieux pourront reprendre au Québec.

« Je n’ai pas de boule de cristal, dit M. De Leeuw. Je veux être optimiste, mais c’est difficile. C’est une situation très difficile. »