(Montréal) Les soldats des Forces armées canadiennes sont arrivés en renfort vendredi dans un CHSLD de Ville Mont-Royal, l’un des plus touchés par la COVID-19 au Québec. Sans vraiment savoir ce qui les attend, ils se disent fiers d’aller aider des aînés pour une mission « à durée indéterminée ».

Ils sont débarqués en matinée sous une pluie fine dans le stationnement du CHSLD Vigi Mont-Royal, tout près de l’autoroute 40.

Il y avait des militaires en uniforme de camouflage et des réservistes en tenue civile, mais tous étaient armés d’un masque de protection.

Ce CHSLD comptait 186 résidants infectés par la COVID-19 en date de jeudi. Il s’agit du plus lourd bilan de contamination de la province.

Les soldats ont été informés de ce chiffre.

Ont-ils peur d’être contaminés ?

« Pas du tout », répond sans hésitation le caporal Nicholas Gagnon.

« On n’a pas de craintes. On est bien formés et on est très confiants », a répondu le grand gaillard, qui fait partie de l’unité médicale.

« La peur ne fait pas partie de ce que l’on ressent. »

Il parle plutôt de fierté. D’être heureux de pouvoir mettre la main à la pâte. « Ce qui se passe, c’est dramatique, c’est assurément difficile d’un point de vue humain », commente le caporal Gagnon, qui a une spécialité de technicien médical.

« Apporter de l’aide à la population, c’est notre mission. »

Plusieurs résidences pour aînés sont dépassées par la propagation fulgurante du virus et manquent de personnel : le premier ministre François Legault a ainsi demandé l’aide de l’armée canadienne.

C’est le 12e régiment blindé du Canada, basé à Valcartier, près de Québec, qui est responsable de la logistique au CHSLD Vigi de Mont-Royal.

Deux tentes du vert kaki de l’armée ont été installées dans le stationnement, en plus d’un chapiteau blanc. Une vision inhabituelle dans cette ville cossue nichée en plein cœur de Montréal.

« Les tentes, c’est temporaire », explique la sergente Crystal Diamond, qui est technicienne en médecine préventive. Lundi, des « hôpitaux de campagne » seront installés derrière le bâtiment de briques orange.

Des militaires sur place ont une formation médicale : c’est leur métier dans l’armée. Certains sont infirmiers et d’autres techniciens médicaux, un titre qui n’existe que dans l’armée. Parmi les réservistes présents, certains ont un emploi au civil qui fait en sorte qu’ils ont des qualifications en soins de santé et ont parfois même déjà travaillé en CHSLD. Ces derniers seront jumelés aux soldats dont c’est le métier.

Mais ils ont tous reçu une formation spécifique pour venir aider dans un CHSLD.

Pour eux, vendredi est une journée pour se familiariser avec les lieux, avec leurs tâches et les procédures spécifiques de l’endroit.

Puis, dès samedi, ils seront là pour soutenir les préposées et les infirmières. « On va beaucoup apprendre d’elles ce qui doit être fait », dit le caporal Gagnon, qui a déjà été bénévole dans un CHSLD.

Mais ce sera la première fois que l’armée l’amène à travailler dans l’un de ces centres de soins pour personnes âgées.

« On le fait avec grand cœur, dit-il avec un sourire qu’on ne peut voir sur ses lèvres, vu son masque de protection, mais qui se dessine au coin de ses yeux. Ce n’est pas juste une mission comme une autre. »

Près de lui, le caporal-chef Antoine Philion-Laliberté donnait des instructions à ses troupes.

« Là, vous allez commencer la vraie patente », avertit-il. « Si vous avez un malaise, n’hésitez pas à lever la main. Si vous avez besoin de sortir deux minutes, on va jaser jusqu’à ce que vous soyez prêts à rentrer. »

Peu après, la procédure de désinfection et de lavage des mains a été revue en détail avec les soldats.

Le premier groupe est entré, portant masque, visière, gants et blouses jaunes.

On sait qu’on peut voir des gens morts, a admis le caporal-chef Jean-Philippe Ménard.

« J’ai des papillons dans le ventre. C’est nerveux. »

Mais il n’a pas peur pour lui-même. « Non, on connaît les risques et on sait quoi faire », dit le soldat qui s’est porté volontaire comme bien d’autres pour aller aider en CHSLD.

Il se demande plutôt « ce qui les attend là-dedans ». « On s’est fait dire que c’est la pire place à Montréal. »

Le métier de l’homme est de « tirer de gros canons » depuis des véhicules blindés.

Mais vendredi, il va aller dans un CHSLD pour « donner des soins, laver des mains, des visages et aider des personnes âgées à manger », explique-t-il.

« On est très contents. On voulait aller aider bien avant d’avoir reçu l’appel. »

Les membres des forces armées ne savent pas combien de temps va durer ce déploiement hors de l’ordinaire. « C’est une mission à durée indéterminée », dit le caporal Gagnon.

Environ 1000 militaires doivent prêter main-forte dans 20 CHSLD au Québec.