Le drame des jeunes du secondaire, ce n’est pas de ne pas retourner en classe avant la fin de l’été, c’est d’être privés de leurs amis. Le confinement a plus d’avantages que d’inconvénients pour la plupart. Mais il y a quand même des perdants : les ados en difficulté d’apprentissage.

Jade Boivin

Jade Boivin n’a pas crié de joie en apprenant que son école resterait fermée. Au contraire, elle était vraiment déçue. « J’ai des problèmes d’apprentissage », dit l’adolescente de 15 ans, inscrite en adaptation scolaire à l’école de Mont-Bruno. « Je trouve que ça va être difficile de retourner en septembre et de me souvenir de ce que j’ai appris. » En attendant, Jade tente de faire ce que ses professeurs lui demandent. « Mais à distance, ce n’est pas facile. J’ai besoin d’être dans une classe avec une enseignante et mes outils. À la maison, ce n’est pas motivant. Il y en a qui vont dire que c’est le fun. Moi, je trouve ça important de continuer à aller à l’école. Et nous, les ados, on a besoin de voir du monde. »

Philippe Pilon

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Philippe Pilon

Philippe Pilon s’ennuie aussi de ses amis. En fait, il s’ennuie surtout de ses amis. Pour le reste, ça va plutôt bien. « Honnêtement, c’est vraiment mixte, nuance-t-il. Il y a beaucoup de positif et beaucoup de négatif. » Le positif, c’est qu’il n’y a pas d’examens et qu’il y a moins d’heures consacrées aux études par jour. « Avant, je passais six heures par jour à l’école et j’avais au moins une heure d’étude le soir. Là, j’ai beaucoup de temps libre », précise le jeune de 14 ans inscrit au Collège de Montréal. Quels sont les aspects négatifs ? « Le but de l’école, c’est pas juste d’apprendre, répond-il. C’est aussi d’être avec d’autres élèves pour ne pas se sentir seuls. Si on me disait que l’école recommençait, je serais vraiment content. Je suis quand même un peu déçu. »

Magalie Bousquet

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Magalie Bousquet

Magalie Bousquet, elle, n’est pas déçue du tout. « Moi, je trouve ça bien que les écoles restent fermées parce que je me suis adaptée au rythme des cours en ligne, précise-t-elle. Je me lève plus tard le matin, vers 8 h, 9 h. Avant, quand j’allais à l’école, je me réveillais à 5 h 30, 6 h. Ça me permet d’avoir mes huit heures de sommeil. » Autre avantage : les travaux à faire sont bien moins nombreux. Même chose pour les examens. Et surtout, ils ne déboulent pas tous en même temps. Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a indiqué que la charge allait augmenter d’ici la fin de l’année scolaire. Autrement dit, que les « vacances » étaient finies pour les élèves du secondaire. « C’est quand même moins stressant à la maison », dit Magalie, 15 ans, qui souffre d’anxiété. « Le seul côté positif, ç’aurait été de revoir mes amis. »

Éli Mathieu

Éli Mathieu, 13 ans, « trouve ça correct ». Il apprend autant que lorsqu’il allait en classe parce que ses parents sont professeurs. En plus, son école secondaire, Ozias-Leduc, à Mont-Saint-Hilaire, n’est pas un milieu propice aux mesures de distanciation physique. « On est deux par casier, les corridors sont minuscules et on est quand même beaucoup », souligne Éli, qui s’ennuie, lui aussi, de ses amis. Depuis le début du confinement, il ne les a revus qu’une ou deux fois, à vélo, et de loin.

Mhia Sosa

PHOTO FOURNIE PAR MHIA SOSA

Mhia Sosa

Mhia Sosa, 18 ans, s’était fait à l’idée que son école n’allait pas rouvrir avant septembre. Aussi n’a-t-elle pas été triste d’apprendre lundi que c’était le cas même si elle trouve difficile d’apprendre à distance, sans grand encadrement. « Ç’aurait été un peu irréaliste », admet l’élève de 5e secondaire de Québec. « Et même si on les avait rouvertes, je ne pense pas que j’aurais pu y aller parce que je vis avec mes grands-parents et que ç’aurait été un gros risque pour eux. » Ce qui rend Mhia triste, c’est surtout l’annulation de son bal de finissants. Elle se console en se disant qu’il aura lieu plus tard, sans doute dans un an. « Je suis contente. Je n’imagine même pas à quel point ça doit être dur pour ceux qui n’auront pas de bal ni de graduation. On attend ça depuis tellement d’années. »

Albert Masse

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Albert Masse

Albert Masse aurait préféré retourner en classe, mais estime que le gouvernement a fait le bon choix en maintenant les écoles secondaires fermées. « Je suis quand même déçu », reconnaît l’ado de 15 ans, qui fréquente l’école secondaire du Triolet, à Sherbrooke. « Je trouve que ça devient lassant de ne pas voir d’amis pendant le confinement, mais c’est sans doute la meilleure décision pour sauver des vies. Donc, je suis prêt à ne pas aller à l’école. » Ce qui lui manque, bien plus que les cours, ce sont les amis. Il consacre une à deux heures par jour aux études, comparativement à cinq heures dans le passé. Et passe, en moyenne, quatre heures par jour sur les réseaux sociaux. « Les bons côtés, c’est que je peux passer plus de temps avec ma famille et que j’ai d’autres passe-temps, comme faire des casse-têtes. Je pratique aussi plus de sport. J’ai plus de temps pour moi. Mais je travaille moins que si j’allais à l’école. Et j’apprends moins. »