Plusieurs pays qui envisagent des mesures de décloisonnement ne savent pas précisément quelle part de la population a contracté la COVID-19 et lancent des études épidémiologiques d’envergure pour ne pas être obligés d’avancer à l’aveugle. Le Québec est au nombre de ces États qui tentent d’y voir plus clair.

Aux États-Unis, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies infectieuses (CDC) viennent d’annoncer un projet visant à préciser le taux d’infection dans plusieurs villes durement touchées par la pandémie.

L’organisation a ajouté qu’elle entendait utiliser des tests sérologiques permettant de relever la présence d’anticorps liés au coronavirus pour détecter l’importance des cas asymptomatiques et avoir un portrait plus juste de sa propagation dans la population.

Une étude nationale, basée sur des échantillons sanguins provenant de plusieurs régions du pays, doit être lancée au début de l’été.

Un porte-parole des CDC a expliqué à une revue médicale spécialisée que ces initiatives permettraient d’avoir le portrait « réel » du niveau de transmission communautaire du coronavirus.

Les politiques de dépistage suivies depuis le début de la crise par plusieurs États ne permettent pas de recenser les cas asymptomatiques, alors que plusieurs études indiquent qu’ils représentent une fraction importante des cas de contamination et jouent un rôle important dans la transmission du virus.

Leur détection est importante, puisqu’elle permet d’avoir une idée précise du pourcentage de la population immunisée contre la COVID-19 et peut guider les choix sanitaires des autorités en vue d’éviter des vagues subséquentes d’infection.

Plus le pourcentage de personnes ayant déjà été exposées au coronavirus est important, plus les risques de flambée diminuent, le seuil d’immunité collective survenant lorsque le taux excède 60 ou 70 %.

Le ministre de la Santé de la France, Olivier Veran, qui entend intensifier les tests de dépistage pour avoir un portrait plus précis de la situation, a indiqué mardi « qu’aucun pays au monde » n’est capable actuellement de dire avec précision le pourcentage de la population qui a été contaminé et qui est immunisé contre le virus.

Il a précisé que des estimations préliminaires préparées par des scientifiques situaient ce taux autour de 10 % en France.

Au Québec

Le Québec ne dispose pas encore de données précises à ce sujet.

Le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique, a indiqué la fin de semaine dernière, sans préciser d’échéancier, que la province souhaitait mener des tests sérologiques « en grande quantité » dans la population pour combler cette lacune.

Il a déclaré qu’il était difficile pour l’heure de savoir « si c’est 10 %, 1 %, 20 % ou 30 % ou 40 % ».

Le ministère de la Santé et des Services sociaux n’a pas précisé mardi où en étaient les démarches à ce sujet.

La politique de dépistage actuelle du gouvernement, qui a été révisée la semaine dernière, exclut les cas asymptomatiques et les personnes présentant de faibles symptômes, ce qui donne un portrait très partiel du niveau de propagation.

Ce virus s’est transmis comme une traînée de poudre. Je suis certain que le niveau de contamination dans la population est plus important qu’on le pense et que le niveau d’immunité est conséquemment plus élevé.

Benoît Hébert, président de BioConsult

La firme BioConsult, que dirige M. Hébert, travaille notamment avec le distributeur local d’un test sérologique allemand évalué par Santé Canada.

Une indication préliminaire du taux d’infection pourrait venir de l’Université du Québec à Trois-Rivières, qui vient de lancer une étude visant à détecter la présence de cas asymptomatiques dans un échantillon de plusieurs centaines d’employés placés en confinement depuis la mi-mars.

La professeure Lyne Cloutier, qui chapeaute l’exercice, a indiqué par courriel que l’échantillon est suffisamment représentatif pour transposer les résultats à « une bonne partie de la population du Québec ».

Des données pourraient aussi venir d’Héma-Québec, qui propose de mener des tests sérologiques sur les dons de sang pour évaluer la prévalence du virus.

« Il y a des discussions avec la Direction de santé publique à ce sujet-là », a précisé mardi le porte-parole de l’organisation, Laurent Paul Ménard.