L’infirmière clinicienne Sara Najem devait retourner au chevet de ses patients atteints de la COVID-19 à l’Hôpital Sacré-Cœur, dimanche, lorsqu’elle a reçu la mauvaise nouvelle : sa grand-mère venait de succomber à la même maladie.

Souad Najem, 89 ans, était la troisième résidente à perdre sa bataille contre le coronavirus au Centre Les Cèdres, dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Plusieurs des aînés qui habitent dans cet établissement de la communauté libanaise continuent de lutter contre la maladie.

« Elle avait seulement le diabète, pas de problèmes pulmonaires, pas de problèmes cardiaques », a témoigné sa petite-fille. « Ce qu’on trouve difficile, c’est qu’elle n’aura pas de funérailles. […] Elle a eu une belle vie et tout, mais c’est difficile de savoir qu’on ne pourra pas lui dire un dernier adieu. »

Souad Najem a élevé ses neufs enfants dans des conditions difficiles au Liban, notamment à travers une guerre civile, avant d’immigrer à Montréal avec une partie d’entre eux.

Elle avait été déclarée positive à la COVID-19 une semaine avant de mourir, mais semblait se porter mieux dans les jours suivants. « J’ai dit à mon père qu’il fallait attendre jusqu’au septième jour » avant de se réjouir et de crier victoire, a dit sa petite-fille. « Souvent c’est au septième ou au huitième jour que ça va mieux ou ça empire ».

PHOTO FOURNIE PAR SARA NAJEM

Souad Najem

Sa prédiction s’est malheureusement avérée vraie. Sa situation a rapidement décliné dans la nuit de samedi à dimanche. Dans les circonstances, les proches de la dame n’ont pas pu être à son chevet pour l’accompagner dans ses dernières heures.

« Ils n’ont que nous »

Après avoir pris une journée pour encaisser la nouvelle, Sara Najem est retournée sur la ligne de front, aux soins intensifs de l’Hôpital Sacré-Cœur.

Elle a repris le collier dans la nuit de lundi à mardi pour un quart de travail bien spécial, à prendre soin de malades plongés dans la même situation périlleuse que celle où se trouvait sa grand-mère 48 heures plus tôt.

« C’était difficile. Ce n’est pas facile d’être en face de patients entre la vie et la mort, atteints de la COVID-19 et qui sont seuls. On travaille vraiment fort pour essayer de les sauver », a-t-elle expliqué par la suite.

« C’est ce que je garde en tête : un jour à la fois. On prend les petites victoires qu’on peut. Juste le fait qu’un patient ait passé la nuit et que son niveau d’oxygène n’ait pas diminué, ça c’est une petite victoire. »

En plus de sortir tout leur arsenal sur le plan médical, Mme Najem tente aussi d’adapter son approche face à ces patients isolés par les circonstances.

Depuis que sa famille a été éprouvée par la pandémie, « je prends plus le temps », a confiré Sara Najem. « Il n’y a personne pour eux à part nous. Ils n’ont que nous. On essaie d’humaniser les soins le plus possible. »