Tous se posent la même question cruciale : quand atteindra-t-on le sommet de la fameuse courbe ?

La réponse n’est pas facile, et le gouvernement Legault rendra publiques mardi ses prévisions lors de sa conférence quotidienne. Néanmoins, il est possible d’avoir une idée en regardant ce qui se passe ailleurs, notamment dans les pays où le virus a frappé plus tôt.

Or, bonne nouvelle, trois pays européens durement touchés ont vraisemblablement franchi le sommet de la pandémie et commencent enfin à voir le bout du tunnel. Il s’agit de l’Italie, de l’Espagne et possiblement de la Belgique.

Le meilleur guide pour prévoir le sommet semble être le nombre de morts par jour, si l’on se fie aux données du site Our World in Data, produit par des chercheurs associés à l’Université d’Oxford, au Royaume-Uni. L’organisme recense les données officielles de la plupart des pays. Pour rendre les données comparables, j’ai ramené le nombre de morts quotidiens en taux par million d’habitants.

Premier constat : l’Italie a probablement atteint son sommet le 29 mars, avec 14,2 morts quotidiens par million d’habitants. Depuis une semaine, ce taux est en baisse constante, et il était dimanche (5 avril) de 11,8 morts par million d’habitants.

Comme les premiers morts en Italie remontent au 24 février, il aura donc fallu cinq semaines, environ, pour atteindre le damné sommet, et il en faudra possiblement autant pour retomber à la normale, ce qui nous mènerait dans la semaine du 3 mai en Italie.

L’Espagne semble aussi avoir franchi son sommet, quoique plus récemment. Ainsi, le 3 avril, l’Espagne atteignait 19,8 morts quotidiens par million d’habitants, et ce taux, en recul depuis deux jours, est maintenant de 18,8. Espérons qu’il n’y aura pas, après cette baisse, un nouveau rebond. Dans leur cas, l’hécatombe a commencé autour du 6 mars, et le pic aurait donc été atteint après quatre semaines.

Enfin, la Belgique. Le 2 avril, le plat pays a enregistré une moyenne quotidienne de 14,7 morts par million d’habitants. Ce sommet est en baisse presque constante depuis, et le dimanche 5 avril, le taux était de 12,1. Le temps pour atteindre le sommet aurait été de trois semaines, ce qui apparaît très court.

Il est bien possible que ces situations ne se reproduisent pas ici, dans le contexte où nos mesures de confinement plus rapides pourraient avoir aplati – et donc allongé – la courbe, et repoussé l’arrivée vers le sommet.

Compte tenu de la virulence de la pandémie en Italie et en Espagne, on peut penser que les quatre ou cinq semaines pour atteindre le sommet seraient le délai minimum.

Les données sur le nombre de morts quotidiens au Québec sont encore trop peu nombreuses pour faire la comparaison sur cette base. Pour y arriver, il faut prendre l’ensemble canadien.

Le Canada a enregistré ses premiers morts à la mi-mars, il y a trois semaines, et il est maintenant à 1,3 mort quotidien par million d’habitants. La propagation canadienne est beaucoup moins rapide que dans la plupart des pays où les premiers décès sont aussi survenus il y a environ trois semaines, qu’il s’agisse de la Suède (taux comparable de 4,6 morts), des États-Unis (taux de 3,7 morts) ou même de l’Allemagne (taux de 2,8 morts).

Est-ce en raison de nos mesures de confinement plus sévères ? Rappelons que la Suède a été beaucoup plus laxiste dans ses interventions, tout comme les Pays-Bas, qui en sont à 9,2 morts quotidiens par million d’habitants aujourd’hui.

Toujours est-il que notre sommet canadien ne sera pas atteint avant deux semaines au minimum, si l’on se fie au cas italien, ce qui nous mènerait vers le 19 avril. Il est bien possible qu’il faille ajouter quelques jours, peut-être quelques semaines, si la courbe est réellement plus plate qu’ailleurs. Peut-on imaginer qu’on y parviendra avant la réouverture des commerces non essentiels, que le gouvernement du Québec a repoussée au 4 mai dimanche ?

Pour ma part, je parie que les chantiers de construction rouvriront vers la mi-mai au Québec et que les autres secteurs suivront, progressivement. Je continue à astiquer ma boule de cristal, cela dit, car il y a encore beaucoup de brouillard.