(Ottawa) Le gouvernement canadien prend une nouvelle série de mesures pour ralentir la propagation du coronavirus au pays.

Ottawa sert à tous les Canadiens une recommandation officielle, issue de l’Agence de la santé publique du Canada : ne voyagez pas à l’étranger, y compris aux États-Unis, à moins que ce ne soit essentiel.

>>> Abonnez-vous à notre infolettre

Le Canada interdit ses ports à tous les bateaux transportant plus de 500 personnes, jusqu’au 1er juillet.

Le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, travaille à un plan pour regrouper tous les vols internationaux dans quelques aéroports du pays afin d’y concentrer les ressources de détection de voyageurs infectés.

Devant tous les inconvénients que ces mesures et les décisions des provinces et des villes créent, Ottawa annoncera la semaine prochaine un plan de relance de l’économie et une série de mesures fiscales pour faciliter la vie aux citoyens en temps de pandémie.

« Nous savons maintenant que nous devons prendre des mesures additionnelles chaque jour », a prévenu la ministre fédérale de la Santé, Patty Hajdu, en conférence de presse.

« Nous savons que ces mesures vont causer des perturbations dans vos vies, mais nous savons aussi que ce sont des mesures absolument nécessaires pour protéger la santé et le bien-être de tous les Canadiens », a-t-elle ajouté.

« Il est important de se rappeler que si vous voyagez à l’étranger, vous pourriez être soumis aux mesures prises par les autres pays. Votre voyage d’une semaine pourrait être beaucoup plus long », a prévenu Dre Theresa Tam, administratrice en chef de l’Agence de la santé publique, après avoir noté qu’il y a maintenant plus de cas rapportés en Europe qu’en Asie.

Dre Tam, Mme Hajdu et cinq autres ministres ont détaillé les décisions prises par le gouvernement alors que le premier ministre Justin Trudeau, en isolement volontaire en raison de la maladie de sa conjointe, travaillait de chez lui.

De l’aide aux entreprises

En attendant un plan plus élaboré la semaine prochaine, le ministre fédéral des Finances a annoncé, vendredi, un programme pour les entreprises.

« Nous mettons en place notre programme de facilitation de crédit pour soutenir nos entreprises et stimuler l’économie. Cela mettra 10 milliards à la disposition des entreprises canadiennes », a annoncé le ministre Bill Morneau aux côtés du gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, et du surintendant des institutions financières, Jeremy Rudin.

La Banque du Canada abaisse son taux d’intérêt directeur d’un demi-point de pourcentage, à 0,75 %, en réponse à la pandémie de la COVID-19.

Le bureau du surintendant des institutions financières prend des mesures pour rendre disponibles, dans les banques, 300 milliards de prêts.

Trudeau au travail chez lui

« Nous voulons qu’aucun Canadien ne soit préoccupé par la capacité de payer le loyer ou de pouvoir nourrir (les) enfants ou s’occuper des aînés », a déclaré le premier ministre Trudeau, à un micro devant sa résidence, installé à une bonne distance des journalistes.

Il a confirmé que de l’aide financière serait annoncée dans les prochains jours.

Le premier ministre a assuré qu’il se sent « bien ». Et en l’absence de symptômes, ses médecins ne conseillent pas de test de dépistage de la COVID-19.

Sa conjointe Sophie Grégoire Trudeau, bien qu’elle présente des symptômes « faibles », restera en quarantaine « pour une durée indéterminée ».

Frontières ouvertes ou fermées

Alors que le voisin américain s’apprêtait à fermer ses portes aux voyageurs en provenance d’au moins 26 pays européens, les ministres canadiens maintenaient que les relations canado-américaines ne souffrent pas de la crise.

« Les leaders des États-Unis prennent les décisions pour les États-Unis. C’est les leaders du Canada qui prennent les décisions pour le Canada », a simplement offert la vice-première ministre Chrystia Freeland.

Jeudi soir, le bureau du premier ministre a publié un compte rendu d’un appel téléphonique entre Justin Trudeau et Donald Trump.

« Les deux dirigeants ont discuté des mesures qu’ils prennent […] face au virus COVID-19. Le premier ministre et le président ont salué l’étroite collaboration entre le Canada et les États-Unis dans la gestion de ce dossier, notamment en ce qui concerne la frontière canado-américaine. Ils ont tous deux indiqué vouloir rester en contact », a-t-on pu lire dans ce compte rendu.

Vendredi après-midi, dans le jardin de la Maison-Blanche, un journaliste canadien a demandé au président s’il avait discuté de la possible fermeture de la frontière canado-américaine avec le premier ministre.

« Nous n’avons pas discuté de la frontière », a assuré, deux fois plutôt qu’une, le président. L’appel, selon lui, n’avait pour objet que la ratification du nouvel accord de libre-échange.

Travaux suspendus

Le Parlement a suspendu ses travaux jusqu’à la semaine du 20 avril.

« Cette décision est prise pour assurer la sécurité et la santé de tous les Canadiens. Nous ne l’avons pas prise à la légère », a déclaré Pablo Rodriguez, leader parlementaire du gouvernement.

La décision a été prise à l’unanimité. Les conservateurs ont dit avoir accepté d’y souscrire après avoir reçu l’assurance que toute somme dépensée par le gouvernement en l’absence de travaux parlementaires sera examinée par le vérificateur général.

La motion prévoit le retour en Chambre, si nécessaire, en nombre limité, et avec l’accord de tous les partis.

On ignore si le budget fédéral pourra être déposé lors d’une pareille séance. Pour l’instant, on sait que le 30 mars, date prévue pour ce budget, a été rayé du calendrier.

« Nous aurons la possibilité de revenir en Chambre lorsque ce sera nécessaire […] si nous devons adopter des mesures d’urgence. C’est là-dessus que je me concentre en ce moment », a déclaré le ministre Morneau lorsqu’on a cherché à savoir quels sont ses plans pour un éventuel dépôt de budget fédéral.

Le Bloc québécois demande à ce que les deux semaines perdues soient reprises ultérieurement, pendant la période estivale ou à l’automne.

Yves-François Blanchet croit même qu’il y aura beaucoup plus de jours perdus à reprendre.

« Si, ironiquement, le Canada a du succès pour contenir la maladie, ça veut dire que la progression va durer relativement longtemps. Moi, je ne suis pas de ceux qui sont convaincus que le 20 avril on va siéger », a fait remarquer le chef bloquiste.

Les cas au Canada

En fin d’avant-midi vendredi, lorsque l’administratrice en chef de l’Agence de la santé publique a offert sa mise à jour, il y avait 157 cas confirmés au pays.

Une deuxième personne, rapatriée mardi de la croisière interrompue en Californie, a reçu un diagnostic de la COVID-19. Les deux Canadiens qui étaient passagers à bord du Grand Princess sont en quarantaine à la base militaire de Trenton, tout comme leurs 226 compagnons de voyage.

Jusqu’à maintenant, quelque 15 000 personnes ont subi le test pour détecter le nouveau coronavirus au Canada.

Un député bloquiste, Mario Simard, s’est mis en isolement en attendant le résultat de son test.

Les autorités de santé publique avertiront tous ceux qui ont été en contact avec Sophie Grégoire Trudeau depuis qu’elle est tombée malade. Mme Grégoire a remarqué les premiers symptômes mercredi soir et est en isolement depuis. Il n’est donc pas question de retracer les passagers à bord de l’avion qui l’a ramenée de Londres, le week-end dernier.