La pandémie est mondiale, mais les moyens pour lutter contre elle varient d’un pays à l’autre. Fermeture d’écoles, quarantaines, annulation des grands rassemblements publics : les mesures prises ici et ailleurs pour freiner la progression de la COVID-19 sont-elles efficaces ou exagérées ?

Quarantaines

Qu’elles soient à l’échelle nationale comme en Italie ou hyper locale comme dans une partie de la ville américaine de New Rochelle, les zones géographiques de quarantaine sont-elles justifiées ? « Quand il y a un certain seuil et que le virus se transmet dans la population, pour éviter que le virus aille ailleurs, il faut une quarantaine », explique la Dre Anne Gatignol, professeure-chercheuse en microbiologie au département de médecine de l’Université McGill. « C’est chaque pays qui voit en fonction de sa situation, mais pour la Chine, je pense qu’ils ont bien fait parce que les chiffres diminuent. Il y a moins de nouvelles infections. Pour l’Italie, ils n’avaient pas le choix parce que sinon, c’était les pays autour qui commençaient à fermer leurs frontières. »

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Isolement à domicile

Ottawa demande aux gens qui ont séjourné en Iran ou dans la province chinoise du Hubei de se soumettre à un isolement volontaire de 14 jours à domicile. Au Québec, cette mesure a été demandée à 146 personnes. Elle diffère des citoyens mis en quarantaine à la base militaire de Trenton. La Dre Gatignol pense non seulement que l’isolement à domicile devrait être élargi à des pays comme l’Italie ou la Corée du Sud, mais aussi que la quarantaine devrait être privilégiée au retour des pays les plus touchés. « Dès leur arrivée à l’aéroport, on devrait les mettre en quarantaine comme ceux que l’on a rapatriés de Wuhan et du Diamond Princess. Mais si l’on ne peut pas organiser ça, c’est mieux qu’ils soient en isolement chez eux. »

Rassemblements interdits

France, Belgique, Suisse, Danemark, Pologne, Roumanie : plusieurs pays interdisent désormais les rassemblements de plus de 1000 personnes. Au Canada, certains événements ont été annulés, mais aucune directive officielle n’a été émise. Le directeur national de la santé publique du Québec, le Dr Horacio Arruda, a expliqué mardi que pour l’instant, les autorités s’affairaient à retracer les pas et les contacts des personnes infectées. La province comptait mercredi neuf cas « confirmés ». « À un moment donné, on ne sera plus en mesure, et c’est comme cela dans toutes les épidémies, de faire des investigations au cas à cas. À un moment donné, on va se concentrer sur des approches populationnelles comme de dire de ne pas faire de rassemblements », a-t-il prévenu.

Nettoyage des transports

Désormais, les voitures du métro de Montréal seront lavées tous les sept jours ou moins, plutôt que toutes les cinq à six semaines. Le Réseau de transport de Longueuil, après avoir appris qu’une citoyenne infectée par le coronavirus avait pris la ligne d’autobus 88, a annoncé mercredi que les surfaces les plus exposées des autobus, comme les sangles, les poteaux et les poignées des fenêtres seront lavées plusieurs fois par semaine. Il s’agit d’une mesure importante à prendre, estime le virologue Benoît Barbeau. « Mais si, durant l’heure de pointe, vous êtes collés l’un contre l’autre, que quelqu’un se met à avoir une toux et qu’il y a des microgouttelettes qui circulent à travers le wagon et que vous êtes à proximité, si l’on parle d’une personne qui est infectée, alors vous avez des chances d’être infecté et ça finit là. »

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Fermeture des frontières

Des pays comme l’Australie ont décidé de fermer leurs frontières aux étrangers en provenance des pays les plus infectés comme la Chine ou l’Iran. D’autres vont plus loin. Mercredi, l’Inde a décidé de suspendre jusqu’au 15 avril l’attribution de tous ses visas de tourisme. La semaine dernière, le premier ministre Justin Trudeau a rejeté d’un revers de main l’idée de fermer les frontières à certains visiteurs. « De limiter l’entrée d’étrangers en provenance des pays les plus touchés… je pense qu’en ce moment, c’est une mesure qui est un peu exagérée », estime Benoît Barbeau, qui est aussi professeur au département des sciences biologiques de l’UQAM. « Je crois qu’il faut y aller progressivement, et c’est ce que le Canada fait. »

Fermeture d’écoles

France, Espagne, Pologne, Grèce, Italie, Roumanie, République tchèque, Ukraine : la liste des pays qui ont décidé de fermer une partie ou la totalité de leurs écoles s’allonge. À New York, la prestigieuse Université Columbia a suspendu ses cours. D’autres établissements universitaires ont décidé d’offrir des cours en ligne. Au Québec, le premier ministre François Legault a indiqué mercredi que les écoles devraient éviter les voyages éducatifs dans les pays les plus touchés. Les élèves de retour des pays les plus durement frappés devraient se placer en isolement volontaire de 14 jours même s’ils sont en bonne santé. « C’est une bonne chose pour la dissémination parce que les enfants peuvent être porteurs, mais ils ne développent pas la maladie très souvent, donc ils pourraient la transmettre », explique la Dre Anne Gatignol.

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À New York, la prestigieuse Université Columbia a suspendu ses cours.

Lavage des mains

Et si la mesure la moins spectaculaire était la plus efficace ? Les autorités de santé publique martèlent le même message depuis le début de la crise : lavez-vous les mains, lavez-vous les mains, lavez-vous les mains. Vous avez peut-être même entendu le conseil de les laver le temps de chanter la chanson « bonne fête » à deux reprises. L’entonner prendrait 20 secondes. Ce temps est suffisant, estiment Benoît Barbeau et Anne Gatignol. « C’est un virus enveloppé, donc le savon détruit l’enveloppe, contrairement par exemple au virus de la gastro qui n’est pas enveloppé et qui résiste beaucoup plus longtemps, explique la Dre Gatignol. N’importe quel savon ou alcool le détruit. »