Quand on regarde les résultats de l’élection partielle de Marie-Victorin, on comprend vite que la Coalition avenir Québec (CAQ) a gagné les prochaines élections le jour où elle a renoncé à sa promesse de changer le mode de scrutin.

Lundi dernier, près des deux tiers des électeurs qui se sont présentés aux urnes ont voté contre le parti au pouvoir… qui a néanmoins gagné le siège de Marie-Victorin avec un peu moins de 35 % des voix.

Ce qui a fait dire au leader du gouvernement, l’ineffable Simon Jolin-Barrette, que c’était un message clair à l’opposition de « cesser sa partisanerie ». Comme quoi le fait que les deux tiers des électeurs ont voté contre le gouvernement ne lui suggère aucune prudence.

Mais une chose est incontournable : ce résultat signifie qu’aux élections du 3 octobre prochain, la CAQ pourrait obtenir plus de 80 % des sièges à l’Assemblée nationale avec un peu moins de 40 % des voix.

Or, cette victoire de la CAQ doit entraîner un certain nombre de remises en question pour tous les partis de l’opposition. À commencer par le plus nouveau, le Parti conservateur du Québec (PCQ). Sa candidate, Anne Casabonne, a obtenu un peu plus de 10 % des voix, mais cela n’a pas empêché l’élection de la candidate caquiste.

Cela veut dire qu’à l’exception de la région de Québec, où le PCQ est plus populaire, la présence d’un parti à droite de la CAQ n’aura pas vraiment pour effet de lui nuire.

Bien au contraire, le PCQ contribue à la dispersion du vote de l’opposition. On pourrait dire : un vote de protestation qui a pour effet réel d’aider le parti au pouvoir. Ça veut dire, entre autres, que le PCQ va devoir se donner un autre message que la seule opposition aux mesures sanitaires s’il veut avoir une incidence dans la campagne électorale.

Pour le Parti libéral du Québec (PLQ), le résultat n’est rien de moins que catastrophique, à moins de 7 % des voix. Si on transpose ce résultat à des élections générales, le PLQ serait pratiquement rayé de la carte dans le Québec francophone.

Plusieurs analyses ont déjà été faites sur l’incapacité de sa cheffe, Dominique Anglade, à connecter avec les francophones du Québec. On me permettra d’en rajouter une : la recherche incessante de l’« effet wow ».

L’« effet wow » est connu en marketing. Avoir un produit, un étalage ou une idée qui séduit d’emblée. Le problème au PLQ, c’est que lorsqu’une idée est lancée et n’obtient pas d’emblée l’adhésion populaire, on l’abandonne et on passe à autre chose.

Un exemple : lors de son congrès, Mme Anglade lance l’idée de la nationalisation de la fabrication de l’hydrogène et présente cela comme aussi stratégique que la nationalisation de l’électricité dans les années 1960.

Mais comme ça n’a pas séduit d’emblée – il faut dire que c’est moins évident que l’électricité –, comme il n’y a pas eu d’effet wow, les libéraux sont vite passés à autre chose.

Il aurait été utile que Mme Anglade fasse la tournée des chambres de commerce en région, de Rouyn à Gaspé, pour susciter de l’intérêt et montrer les effets structurants, région par région.

Mais quand ça ne marche pas tout de suite, les libéraux ont tendance à passer à autre chose. Trop vite. Au risque de confondre les électeurs qui voient passer les nouvelles propositions du PLQ comme les wagons d’un train à grande vitesse.

Avec sa lettre publiée vendredi, Mme Anglade semble vouloir revenir à l’ADN du PLQ sur les droits individuels et l’économie. Ce sera peut-être porteur, mais on se demandera toujours pourquoi elle s’en est tant éloignée.

Pour Québec solidaire (QS), le résultat de Marie-Victorin est décevant et aucune des excuses fournies par le parti ne tient vraiment la route, surtout pas l’absence de bureaux de scrutin dans les cégeps. La réalité, c’est que QS traverse un passage à vide actuellement, et ne sait plus trop quel cheval enfourcher.

Ce fut longtemps la formule gagnante de QS de choisir un dossier et de ne pas le lâcher. Il y a bien assez de dossiers de gouvernance bancale de la part de ce gouvernement que ça doit se trouver. D’emblée, on pense au troisième lien, mais il y en a d’autres.

Enfin, le Parti québécois (PQ) a perdu de justesse ce qui était un château fort et avec le meilleur candidat – et de loin – sur le bulletin de vote. Dans les circonstances, c’est une défaite qui fait mal et qui ne laisse rien présager de bon pour le scrutin du 3 octobre.

Mais quelle que soit la tournure que prendra l’élection, si le PQ fait campagne sur « la nécessité de sortir du Canada » avec un référendum sur l’indépendance peu après son élection, il ne sera simplement plus dans le vif du débat public.