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On entend souvent dans les médias que 40 % de la population ne paie pas d’impôt. Est-ce vrai ?

Hugues Beauregard

Est-ce vrai que 40 % des Québécois ne paient pas d’impôt ? En un mot : non. Pas tout à fait.

En fait, 35 % des Québécois qui ont produit une déclaration de revenus en 2018 n’ont pas payé d’impôt provincial sur le revenu, selon les derniers chiffres du ministère des Finances du Québec, qui se base sur les chiffres de Revenu Québec.

Pour avoir le portrait réel, il faut toutefois faire quelques ajustements. Cette proportion de 35 % inclut tous les contribuables qui ont fait une déclaration de revenus… peu importe leur âge. On retrouve donc dans le lot des élèves au secondaire, des cégépiens ou des étudiants à l’université qui font leur déclaration de revenus pour toucher des crédits d’impôt ou accumuler des droits de cotisation REER. (Adolescents et jeunes adultes à l’écoute, c’est une bonne habitude à prendre.)

Si on prend seulement les 25 ans et plus — un échantillon plus représentatif, à notre avis —, c’est 31 % des contribuables qui ne paient pas d’impôt provincial. A contrario, 69 % des Québécois de 25 ans et plus paient de l’impôt sur le revenu. Le taux des Québécois qui paient de l’impôt monte de façon draconienne à partir de 25 ans, atteint 79 % dans la quarantaine, et diminue au début de la soixantaine.

(Petit bémol : pour toutes sortes de raisons, environ 3 % des adultes québécois ne remplissent pas de déclaration de revenus et ne sont donc pas considérés comme des contribuables. On ne sait pas si ces 3 % de Québécois paient de l’impôt ou non. Plusieurs n’en paient sans doute pas, mais en théorie, un salarié payant de l’impôt pourrait « oublier » de remplir sa déclaration et faire partie de ce groupe de 3 %.)

Est-ce seulement au Québec qu’on a environ le tiers des contribuables qui ne paient pas d’impôt ? Non. Au Canada (sans le Québec), il y a sensiblement le même pourcentage de contribuables qui ne paient pas d’impôt sur le revenu (36 % des contribuables en 2017). En Alberta, c’est 39 %, en Saskatchewan, 42 %.

7,5 % des plus riches = 46 % des impôts

Au Québec, le groupe des 7,5 % des contribuables les plus riches, ceux qui gagnent plus de 100 000 $ par an, paie 45,7 % de tous les impôts provinciaux sur le revenu.

Mais attention, le Québec ne se finance pas seulement avec l’impôt sur le revenu. Les contribuables paient aussi des taxes à la consommation. Québec offre un crédit d’impôt pour la solidarité sur la TVQ pour les contribuables à très faible revenu.

À partir de 3098 $ de consommation taxable, un adulte québécois paie de la TVQ et contribue donc au Trésor public.

Votre question nous en a inspiré une autre : à partir de quel niveau de revenu un Québécois est-il un « contributeur fiscal net » (il paie plus d’impôt et de cotisations qu’il ne reçoit de crédits d’impôt sur les taxes à la consommation, de primes fiscales au travail et de prestations fiscales pour enfants) ?

La Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke a fait ces calculs pour nous, en comptant à la fois le fédéral et le provincial.

Résultat : une personne seule est un « contributeur fiscal net » dès qu’elle gagne comme salariée 21 833 $ par an. Pour une famille monoparentale avec un enfant âgé de 6 à 16 ans, le seuil de revenu pour devenir un « contributeur fiscal net » est de 40 171 $ par an. Pour un couple avec deux enfants de 6 à 16 ans (les deux membres du couple gagnent le même revenu) : le couple devient un « contributeur fiscal net » à partir d’un revenu de 30 473 $ par an par membre du couple.

On ne vous apprend sans doute rien quand on vous dit que le Québec est l’un des États de l’OCDE où l’impôt sur le revenu des particuliers est le plus lourd. À ce chapitre, le Québec se classe au 3e rang sur 39 États, selon une compilation de la Chaire en fiscalité et en finances publiques. En comptant tous les types d’impôts et de taxes, le régime fiscal du Québec est au 9e rang des plus lourds.

Même si 31 % des Québécois de 25 ans et plus ne paient pas d’impôt provincial sur le revenu.