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Malgré toutes les mesures économiques des pays membres de l’OTAN, on ne voit pas d’effet sur la Russie et encore moins sur leur guerre. […] Il serait très intéressant que votre équipe s’attarde à documenter les impacts des mesures économiques sur la Russie.

Jacques Tremblay

Avec le transfert d’armes aux forces ukrainiennes, les sanctions forment l’ossature principale de l’arsenal mis de l’avant par les alliés de l’Ukraine en réaction à l’invasion de l’Ukraine. Mais quelle est leur efficacité ? Votre question est cruciale.

Commençons par constater que l’imposition des sanctions n’est pas une lubie des démocraties occidentales. Elles sont jugées nécessaires par l’Ukraine.

Il y a tout près de deux semaines, lorsque le président ukrainien Volodymyr Zelensky a profité du Forum économique mondial de Davos pour s’adresser au reste du monde, il a réclamé à la fois plus d’armes et des sanctions « maximums » contre Moscou.

Il importe, pour lui, de durcir les sanctions « pour que la Russie et tout autre agresseur potentiel qui veut conduire une guerre brutale contre son voisin connaissent clairement les conséquences immédiates de leurs actions ».

Encore faut-il, justement, que les conséquences se fassent sentir...

Les sanctions ont été mises en place de façon très graduelle depuis le début de l’invasion. L’objectif est d’en arriver à étouffer l’économie russe, mais ça ne se fera pas du jour au lendemain.

Certains indicateurs démontrent que l’économie russe est affectée. On vient d’apprendre, par exemple, que la production industrielle en avril a chuté de 8,5 % par rapport au mois précédent. Elle a par ailleurs baissé de 1,6 % par rapport à la même période l’an dernier.

« Tant que les hydrocarbures ne seront pas touchés, on ne touchera pas le cœur de l’économie russe », explique Sophie Marineau, doctorante en histoire des relations internationales à l’Université catholique de Louvain et spécialiste de la question.

Les alliés de l’Ukraine en sont vraisemblablement conscients. D’ailleurs, le 2 juin, l’Union européenne a approuvé de nouvelles sanctions qui comprennent un embargo sur le pétrole russe. En vertu de cette entente, les importations de pétrole chuteront d’environ 90 % d’ici la fin de l’année.

Cet accord a été obtenu à l’arraché et il faudra voir maintenant si les membres de l’Union européenne voudront et pourront s’entendre au sujet des importations de gaz en provenance de Moscou. Tout comme on rapporte que Washington est actuellement le théâtre de débats pour savoir jusqu’où l’administration américaine peut encore aller. C’est qu’à partir d’un certain point, on estime que c’est l’économie mondiale qui pourrait aussi se gripper.

Le Canada, comme ses alliés dans ce dossier, a continué au cours des dernières semaines de déployer de nouvelles sanctions, si bien qu’environ 1500 personnes ou entités russes sont désormais ciblées.

Et il y en a – notamment l’interdiction d’exporter certaines marchandises et technologies – qui sont justement conçues pour avoir des répercussions sur la guerre. On pense ici, entre autres, à des produits issus du secteur canadien de l’aérospatiale qui pourraient être utilisés par Moscou pour l’équipement militaire.

Découvrez la liste des sanctions canadiennes

Cela dit, croire que les sanctions adoptées contre Moscou vont pousser le régime russe à hisser le drapeau blanc serait faire preuve d’un optimisme excessif, selon Sophie Marineau. « Les sanctions ont des impacts, mais est-ce qu’ils vont être suffisants pour mettre fin à cette guerre-là ? Il y a peu de chances », dit-elle.

En revanche, si les alliés de l’Ukraine demeurent solidaires et continuent d’accroître la pression, il viendra peut-être un moment où Vladimir Poutine comprendra qu’il a tout avantage à opter pour une solution négociée à ce conflit.

Lisez le texte d’Hélène Baril publié samedi sur les impacts des sanctions économiques sur la Russie Vous avez des questions ? Écrivez-nous