La langue française évolue à une vitesse folle. Chaque semaine, notre conseillère linguistique décortique les mots et les expressions qui font les manchettes ou qui nous donnent du fil à retordre.

Les noms de pays nous font souvent hésiter. Féminin ou masculin ? Quelle préposition employer ? Pourquoi ?

L’usage est parfois flottant et il n’y a pas toujours d’explication simple. Si on veut en savoir plus, il faut alors prendre le temps de se plonger dans l’histoire d’un pays ou dans l’étymologie de son nom.

Cela nous rappelle une collègue pressée qui nous avait demandé : « Donc, les noms de pays qui finissent par un a sont féminins ? » « Oui, comme la Canada », avions-nous répondu pour plaisanter. Angola et Guyana sont masculins et Cuba, féminin.

Comment s’y retrouver ? En consultant la Banque de dépannage linguistique (BDL) de l’Office québécois de la langue française. On y trouve des fiches sur les noms de pays, qui indiquent notamment le genre et l’emploi de la préposition et de l’article. Par exemple, Érythrée est un nom féminin et s’emploie avec en ou avec l’. Je visiterai l’Érythrée. J’irai en Érythrée. Bahreïn est un nom masculin et s’emploie sans déterminant. Je visiterai Bahreïn. J’irai à Bahreïn. Le Grand Prix automobile de Bahreïn (et non du Bahreïn).

D’autres fiches donnent des explications détaillées. « On emploie la préposition en devant les noms de pays de genre féminin et devant tous les noms qui commencent par une voyelle (ou un h muet) », précise la BDL. En Ukraine, en Jordanie, en Angola, etc. Le nom Sierra Leone est souvent mis au masculin, mais il est bien féminin. La Sierra Leone.

« Pour les noms de genre masculin et qui commencent par une consonne (ou un h aspiré), on emploie au, c’est-à-dire à + le. » Au Danemark, au Japon, au Sénégal, etc.

Le cas des îles est plus complexe ; cela dépend, entre autres, du point de vue et de la taille de l’endroit. Maurice est féminin. Haïti est le plus souvent masculin et au journal, on préfère écrire en Haïti plutôt qu’à Haïti. Je visiterai la Jamaïque et la Barbade. J’irai en Jamaïque et à la Barbade. Je visiterai les Bahamas (nom féminin pluriel). J’irai aux Bahamas.

Courrier

La graphie du nom de Vladimir Poutine

Est-ce que l’utilisation de la graphie Poutine au lieu de Putin, lorsque vous écrivez le nom du président russe, est un geste politique ?

Réponse

Non, pas du tout. Cette graphie n’a rien de nouveau – on écrit aussi Raspoutine. On l’employait déjà en 1999, l’année où Vladimir Poutine est devenu le chef de l’État russe à la suite de la démission de Boris Eltsine (dont le nom s’écrit Yeltsin en anglais). Que le nom poutine désigne aussi au Québec le plat qu’on connaît n’y change rien.

C’est par ailleurs la graphie que l’on trouve dans les dictionnaires français, dans les médias du monde francophone et dans les nombreux ouvrages qui lui sont consacrés : Un Russe nommé Poutine, La Russie de Poutine en 100 questions, Poutine, l’itinéraire secret, etc.

On respecte donc les règles de la translittération du russe vers le français. La translittération est la transcription en caractères latins des sons d’une langue qui ne s’écrit pas en caractères latins. C’est le cas du russe, qui s’écrit en caractères cyrilliques.

La translittération se fait selon le système phonétique de la langue d’arrivée, donc le français, bien sûr, pour La Presse. Comme on l’a vu, les sons ne se transcrivent pas de la même manière en français et en anglais. On écrit Brejnev en français, mais Brezhnev en anglais. Pour rendre le son ou, on écrit Putin en anglais et Poutine en français.

Vous avez des questions sur la langue française ? Posez-les à notre conseillère linguistique. Elle répondra à une question chaque dimanche.