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Q. « L’accès aux soins de santé est un droit fondamental au Québec, mais ne pourrait-on pas voter une loi pour que les non-vaccinés, sans raison médicale valable, paient pour le coût des traitements et médicaments s’ils sont atteints de la COVID ? Cela éviterait que la collectivité paie pour des choix individuels… »

Réal Bilodeau

R. La question s’est posée à quelques reprises depuis le début de la pandémie. Notre collègue Francis Vailles, citant un rapport de l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), a rappelé dans une chronique qu’un patient hospitalisé pour la COVID-19 coûte 15 000 $, facture qui grimpe à 50 000 $ lorsque des soins intensifs sont requis. On parle d’une facture d’hospitalisation quatre fois plus élevée que celle d’un séjour moyen à l’hôpital.

Lorsqu’on la pose à des médecins, comme l’a déjà fait notre collègue Patrick Lagacé dans nos pages, leur réponse semble sans équivoque : ils choisissent de soigner l’humain avant tout, peu importe ses croyances et ses décisions.

Lisez la chronique de Patrick Lagacé

De manière plus large, bien sûr, il y a des principes éthiques qui guident la décision des médecins. Et en prêtant le serment d’Hippocrate, ils s’engagent à sauver des vies, peu importe qui se retrouve devant eux.

Singapour a malgré tout choisi d’adopter cette voie. Dans un reportage diffusé le mois dernier, le journaliste de Radio-Canada Philippe Leblanc expliquait qu’à compter du 8 décembre prochain, les personnes non vaccinées devront assumer la facture de leurs soins et de leurs frais d’hospitalisation.

C’est la solution qu’a choisie cette ville-État d’Asie du Sud-Est, qui compte environ 6 millions d’habitants, pour convaincre tout le monde de se faire vacciner.

À noter que Singapour n’est pas à la traîne en matière de vaccination : avec 94 % de taux de vaccination chez les 12 ans et plus, elle figure parmi les endroits dans le monde où on retrouve la plus grande proportion de personnes vaccinées. Un quart de la population aurait déjà reçu une troisième dose.

Quand on regarde les hospitalisations, on note que les non-vaccinés y sont surreprésentés.

Les 6 % de non-vaccinés comptent pour 60 % des hospitalisations, observe un médecin interviewé par le journaliste de Radio-Canada.

Mais, car il y a un mais… Le système de santé de Singapour est fort différent du nôtre. Il fonctionne déjà sur le modèle de l’utilisateur-payeur, en partie subventionné par l’État. Les personnes atteintes de la COVID-19 étaient exemptées de ces frais. On exempte donc les non-vaccinés de cette exemption.

Le système de santé québécois a choisi d’offrir des soins à tout le monde y compris les fumeurs et tous les gens qui refusent d’obéir aux recommandations de leur médecin. Ouvrir la porte à une modulation des soins au cas par cas nous apparaît une pente glissante qu’il vaut mieux ne pas emprunter.