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Q : Les bâtiments des écoles publiques tombent-ils en ruine au Québec ? Quel est l’état général ou le portrait de la situation ?

Pierre Rousseau

R : Ne mâchons pas nos mots : de nombreuses écoles publiques sont dans un état pitoyable.

Vous avez deux options pour le constater.

Premièrement : visiter un de ces établissements. Notre collègue Marie-Eve Morasse, au cours de l’été, a fait le portrait de l’école secondaire Sophie-Barat, dans Ahuntsic. Une partie a carrément été condamnée parce qu’elle était dangereuse !

Découvrez le reportage

Deuxièmement : parcourir le plus récent Plan québécois des infrastructures.

Vous en aurez la preuve, c’est écrit noir sur blanc.

On y a classé les établissements scolaires de la province par cote de vétusté. Et ce classement est démoralisant pour quiconque pense que nos enfants doivent étudier là où les conditions sont favorables à l’apprentissage.

Au total, 54 % des infrastructures du réseau de l’éducation sont jugées en mauvais ou très mauvais état, donc sont cotées respectivement D ou E.

« Cette situation s’explique principalement par une période de sous-investissement dans les années 1990 et au début des années 2000 », y lit-on.

Le ministère de l’Éducation nous a fait part des chiffres les plus récents en ce qui concerne uniquement les bâtiments où se trouvent des élèves. Pour 2020-2021, 48,2 % ont été jugés dans un état satisfaisant.

Mince consolation : ça s’est un peu amélioré. Une année plus tôt, en 2019-2020, 47,5 % de ces bâtiments étaient dans un état satisfaisant.

Il faut dire qu’à Québec, on prend enfin la chose au sérieux.

Encore plus, semble-t-il, depuis un rapport cinglant du bureau du Vérificateur général du Québec en 2019.

Imaginez, on partait de tellement loin qu’on ne connaissait pas véritablement, alors, l’état réel du parc immobilier dans le secteur de l’éducation.

D’ailleurs, les données ne sont pas encore à jour. On termine actuellement la cinquième et dernière année d’une nécessaire inspection des bâtiments du réseau.

Et bien sûr, plus ce travail avance, plus le nombre d’écoles délabrées qu’on découvre augmente.

Heureusement, on n’a pas attendu que ce soit terminé pour injecter des sommes massives afin de redresser la barre.

À la CAQ, on se targue d’avoir déjà investi en trois ans, pour la construction et la rénovation des écoles du Québec, « plus que les gouvernements précédents en huit ans ». On parle d’une somme de 8,3 milliards de dollars.

Mais c’est un travail de longue haleine qui vient de s’amorcer. Et année après année, peu importe les fluctuations économiques et les nombreux besoins dans de multiples secteurs, le défi pour Québec sera de garder le pied sur l’accélérateur.

En fait, il faudrait même appuyer un peu plus fort.

Au Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), on signale que le budget destiné à faire disparaître le déficit de maintien d’actifs du parc immobilier demeure insuffisant.

Il se chiffre à 173 millions pour 2021-2022. Or, le CSSDM estime qu’il devrait s’élever en moyenne à 390 millions par année à partir de 2023-2024 pour que tous les bâtiments soient dans un état satisfaisant en 2030.

C’est comme dans la fable de Jean de La Fontaine. On a vécu trop longtemps comme la cigale qui chantait tout l’été au lieu de se comporter comme la fourmi qui travaillait dur pour assurer son avenir.

Le réseau de l’éducation paiera encore le prix de cette complaisance pendant de nombreuses années.