Vous avez des questions sur nos éditoriaux ? Des interrogations sur les sujets chauds de l’actualité ? Chaque semaine, l’équipe éditoriale répond aux lecteurs de La Presse.

Q : Est-ce vrai que les employés des restaurants ne sont pas obligés d’être vaccinés ? Si oui, il est possible que la personne qui vous demande votre passeport vaccinal ne soit pas vaccinée. C’est incohérent…

Gaëlle B.

R : Vous avez raison, les employés dans le milieu de la restauration n’ont aucune obligation à être vaccinés.

La raison principale est d’ordre légal. Voici ce que dit la CNESST à ce sujet : « Dans le contexte de la COVID-19, l’employeur doit adopter les mesures de prévention nécessaires pour protéger les travailleuses et les travailleurs contre les risques de contamination. Le choix des moyens visant à respecter cette obligation lui appartient.

« Quant au travailleur, il lui appartient de prendre les mesures nécessaires pour protéger sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique et de veiller à ne pas mettre en danger la santé, la sécurité ou l’intégrité physique des autres personnes qui se trouvent à proximité des lieux de travail, selon l’article 49 de la [Loi sur la santé et la sécurité au travail].

« La question d’imposer une obligation aux travailleurs au regard de la vaccination est une question délicate qui implique des droits qui sont protégés par la Charte des droits et libertés de la personne, notamment le droit à l’intégrité physique. »

Le ministre du Travail, Jean Boulet, qui a longtemps œuvré dans le domaine du droit du travail, a déjà expliqué que le statut vaccinal « ne peut pas être un facteur de discrimination à l’embauche » et ne peut pas « servir de justification pour congédier quelqu’un ».

Donc, à moins d’un décret gouvernemental comme celui qui vise les intervenants de la santé et des services sociaux, un employé non vacciné peut continuer à travailler dans un restaurant, qu’il soit ou non en contact avec le public.

Tout ce que peut faire un employeur, c’est d’encourager ses employés à se faire vacciner.

Notons aussi que tous les employés des restaurants sont censés appliquer les règles d’hygiène recommandées par la Santé publique, en plus de porter un masque ou une visière qui couvre la bouche.

Cela dit, l’entrée en vigueur du passeport vaccinal dans les bars et les restaurants pourrait bien avoir eu un effet positif sur la vaccination des travailleurs dans ce secteur.

Comme nous le fait remarquer Martin Vézina, directeur, affaires publiques et gouvernementales à l’Association Restauration Québec, le personnel qui travaille en restauration est assez jeune. « Après le travail et dans leurs temps libres, eux aussi souhaitent fréquenter les restaurants et les bars. Or pour ce faire, on doit être en mesure de montrer son passeport vaccinal. C’est un incitatif à se faire vacciner. »

Les plus récentes statistiques tendent à donner raison à M. Vézina. Alors que les bars et les restaurants étaient responsables de la majorité des éclosions de cas de COVID au début du mois de septembre, on observe une nette diminution du nombre de cas dans ce secteur un mois plus tard.

« Au début septembre, nous avions environ 200 cas par semaine liés à des gens ayant visité un bar ou un restaurant. Nous sommes maintenant à moins de 50 cas par semaine, note Jean Nicolas Aubé, conseiller-cadre aux relations médias au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.

« Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut baisser la garde, ajoute-t-il. Il est donc important, si vous fréquentez ces lieux, de continuer à respecter les règles de base telles que le lavage des mains, la distanciation et d’éviter d’être plusieurs à boire dans le même verre. »

Cela peut sembler incohérent à première vue, mais quand on examine le problème sous tous ses angles, difficile de mettre dans la balance le droit de travailler d’un individu d’un côté, et le privilège de fréquenter un restaurant de l’autre.

Et comme dans bien des situations, le risque zéro n’existe pas.