Que peut-il y avoir de pire qu'un cancer du sein? C'est le drame qui frappe de plein fouet Lucie, personnage incarné par Florence Foresti dans De plus belle, et pourtant, elle souffre d'un mal plus profond. Lucie ne s'aime pas, ne se trouve pas jolie, et sa mère quelque peu tyrannique et négative (jouée par Josée Drevon) ne l'a jamais beaucoup encouragée à s'accepter, tuant même dans l'oeuf son rêve de faire de la danse quand elle était plus jeune.

«Je me suis sentie proche du personnage très vite, explique Florence Foresti en entrevue téléphonique. L'émotion était vraiment palpable à la lecture du scénario, ce qui est très rare. J'ai vraiment pleuré en le lisant. Ce personnage m'intéressait parce qu'il a des failles avec lesquelles je me suis trouvé des ressemblances, notamment le rapport au corps et aux complexes.»

Dans De plus belle, la question de la beauté est fondamentale. Draguée par le charmant Clovis (Mathieu Kassovitz), Lucie devra apprendre à se laisser aller un peu, à croire en son propre charme, malgré le fait qu'elle n'a plus de cheveux, qu'elle doit porter des perruques et qu'on devra lui enlever les seins.

«Lucie est une femme comme j'en connais beaucoup, confie Florence Foresti. C'est-à-dire que c'est une femme qui est cassée par les événements. Qui est cassée, à mon avis, plus par sa mère que par la maladie. Je crois que la maladie n'était qu'un prétexte pour traiter un problème plus large, un problème d'identité, de confiance. Cette femme m'a touchée parce que je la connais, j'ai l'impression que j'en connais des tas, des femmes qui se sous-estiment. C'est un trait très féminin. Là où les hommes affichent parfois une assurance démesurée, les femmes ont tendance à se dévaloriser. Et c'est ce contre quoi j'essaie de me battre dans mes spectacles.»



Tyrannie de la beauté

Pour Florence Foresti, le culte de la beauté fait beaucoup de mal dans nos sociétés. «On remarque socialement que quelqu'un de beau réussit plus, et c'est horrible! Je trouve que c'est la plus grande des injustices. Quelqu'un qui est beau va avoir des facilités dans la vie qui sont délirantes. Et ce n'est pas forcément souhaitable d'avoir une vie facile. C'est chouette d'avoir à se battre. Ça crée des humoristes, par exemple, qui sont de grands complexés qui ont développé d'autres talents de séduction. On accorde une importance incroyable à l'apparence et je le comprends, parce que moi-même je le fais. Je me suis retrouvée parfois à devoir embaucher des gens et à embaucher la personne la plus jolie en me disant qu'elle serait mieux. C'est dingue! C'est curieux qu'on en soit encore là. On le sait tous en grandissant que la vraie beauté est intérieure, mais ça continue à peser sur la société malgré tout.»

Et particulièrement sur les femmes, qui se jugent sévèrement. On n'apprend pas à s'aimer seulement dans le regard d'un homme, c'est un apprentissage qui se fait aussi de mère en fille. «Je suis tout à fait d'accord, répond Florence Foresti. C'est vraiment quelque chose qu'on s'impose et c'est à nous peut-être d'être moins exigeantes envers nous-mêmes.»

Accepter la vulnérabilité

Pour ce film, Florence Foresti a fait totalement confiance à une débutante - il s'agit d'un premier film pour Anne-Gaëlle Daval, qui est costumière de métier - alors qu'elle joue dans un drame, un registre nouveau pour celle qui fait rire les Français depuis des années, et que le rôle exige une mise à nu physique et émotive. «Oui, j'ai ce défaut, je fais confiance, avoue-t-elle. Dans un projet, je préfère y aller sans aucun doute plutôt que d'y aller à moitié.»

Elle convient que dans sa carrière d'humoriste, elle n'a jamais vraiment misé sur son apparence, mais elle a quand même trouvé difficile parfois de se voir dans certaines scènes. «Je me suis trouvée belle et laide à la fois dans le film. Je pense que ça m'a aidée d'un point de vue personnel à m'accepter comme je suis. À l'écran, il faut accepter de se voir comme ça, sans maquillage, sans cheveux ou avec des perruques ignobles. J'ai trouvé ça courageux de ma part. Je me suis dit: c'est bien, ma fille...»

PHOTO FOURNIE PAR MK2 | MILE END 

Florence Foresti dans De plus belle

Il y avait quand même un baume intéressant: jouer avec le beau Mathieu Kassovitz. C'est d'ailleurs Florence Foresti qui l'a suggéré dans le rôle du charmeur qui redonne confiance à Lucie. Pourquoi est-il aussi irrésistible? «Parce qu'il est intelligent! lance-t-elle spontanément. Ça rend beau. Mathieu, c'est quelqu'un de bien, une des personnes les plus généreuses que j'ai jamais vues. C'est un petit secret, mais il peut arriver le matin sur le plateau avec un mec qui a dormi dans sa voiture. Il le ramène pour lui trouver un boulot. Je pense qu'il est tellement beau à l'intérieur que ça se voit à l'extérieur. Et il sait jouer de son petit charme, aussi. Il connaît très bien la caméra, lui!»

De plus belle montre une Florence Foresti qu'on n'a jamais vue, dans un drame poignant qui lui a demandé d'exposer sa vulnérabilité. «Je me sens très novice dans le drame et très experte en comédie. Ça peut paraître prétentieux, mais la comédie est un domaine que je maîtrise totalement. Le drame, j'ai l'impression que c'est un cadeau qu'on me fait. C'était un vrai défi. Un domaine très inconnu et très nouveau pour moi. J'ai appris que je pouvais être douce parfois, et que c'est pas mal. Ce n'est pas mon tempérament, mais c'est une émotion intéressante à connaître.»

De plus belle prendra l'affiche le 30 juin.

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Florence Foresti et Mathieu Kassovitz dans De plus belle