Johnny Depp mis à part, Geoffrey Rush est le seul acteur des Pirates des Caraïbes à tenir un rôle important dans tous les épisodes. Alors que vient de sortir le cinquième volet de l'une des plus populaires franchises de l'histoire du studio Disney, le célèbre interprète du capitaine Barbossa fait le point avec La Presse.

Quand il a eu l'appel lui annonçant un projet de cinquième épisode de la série Pirates of the Caribbean, Geoffrey Rush n'a pas du tout été surpris. Après tout, les quatre premiers chapitres des aventures menées par le capitaine Jack Sparrow ont généré des recettes de 3,7 milliards de dollars sur la planète. Mais au-delà des chiffres, cette franchise constitue aussi pour l'acteur australien une occasion de renouer avec le pur plaisir du jeu, en compagnie de partenaires d'exception, à commencer par Johnny Depp.

«Ce qu'il a fait de son personnage est absolument incroyable, a-t-il fait remarquer au cours d'un entretien accordé à La Presse à la faveur d'une rencontre de presse organisée la fin de semaine dernière dans la Cité des anges. Le succès de cette série lui est dû en grande partie, car il a façonné Jack Sparrow à sa manière. Aussi, quand je pense à tous les grands acteurs et grandes actrices qui se sont joints à nous pour des participations spéciales dans l'un ou l'autre des films, je n'en reviens pas de la chance que j'ai eue. J'ai pu donner la réplique à des gens comme Ian McShane, Penélope Cruz, Chow Yun Fat, Bill Nye et, cette fois, Javier Bardem, dans un cadre complètement ludique et grandiose. C'est plutôt rare comme phénomène au cinéma.»

Geoffrey Rush n'aurait jamais pu croire au départ à un tel parcours pour la bande de pirates. Personne d'autre non plus, à vrai dire. Le producteur Jerry Bruckheimer se plaît d'ailleurs à raconter que tous les intervenants de l'industrie prédisaient la fin de sa carrière quand il a eu l'idée de remettre au goût du jour un genre présumé perdu à jamais. Au moment où le rôle du capitaine Barbossa lui a été proposé, au début des années 2000, Geoffrey Rush était un acteur déjà reconnu, bien sûr. Grâce à sa remarquable composition dans Shine, un film de Scott Hicks dans lequel il prêtait ses traits au pianiste David Helfgott, il a en outre obtenu un Oscar.

«Après Shine, les portes du cinéma se sont ouvertes, mais j'ai tourné essentiellement des films indépendants, précise-t-il. J'ai joué aussi dans quelques productions hollywoodiennes qui n'ont pas marché. Quand tu participes à un film comme Pirates of the Caribbean, tu peux assez rapidement te faire une idée de ce à quoi ressemble un film à succès. Parce que les gens t'écrivent. Au début, je recevais surtout des messages de jeunes femmes du Japon ou d'hommes d'Allemagne. Je n'ai jamais su comment interpréter cela, ni trop ce que cela veut dire!

«Maintenant, poursuit-il, ça vient vraiment de partout, y compris de la Chine. D'ailleurs, j'adore lire ce que les fans m'envoient, voir leur perception de l'affaire. Ce qu'on remarque, c'est qu'il existe un phénomène universel d'identification avec ces pirates, même si ce sont des criminels. On aime leur irrévérence, leur liberté totale de faire et de dire. On est aussi attirés, je crois, par l'espèce de confrérie qui s'installe entre eux. Il y a de très belles ramifications psychologiques liées à tout ça. Comme si ces personnages nous permettaient d'exalter ce qu'il y a de plus libre en nous-mêmes.»

Des histoires inventives

L'acteur loue aussi la qualité des scénarios de la série. Les changements de réalisateurs au fil des épisodes apportent également à ses yeux de nouveaux éléments, même si les ingrédients de base restent les mêmes. À cet égard, la réalisation de Pirates of the Caribbean: Dead Men Tell No Tales est signée par le tandem norvégien Joachim Rønning et Espen Sandberg, lequel compte notamment dans sa filmographie Kon-Tiki, cité aux Oscars dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère en 2013.

«Au fil de la série, les scénaristes ont été très inventifs, explique Geoffrey Rush. Les personnages sont des archétypes, bien sûr, mais ils ne sombrent quand même pas dans les stéréotypes. En tant qu'acteur, cela nous permet de forcer le trait un peu, sans extraire du personnage sa part d'humanité. Les auteurs ont aussi exploré la mythologie de façon sérieuse, en respectant l'univers maritime du XVIIIe siècle. L'âpreté de la réalité, liée à des éléments surnaturels et au charisme du personnage qu'incarne Johnny avec tant de talent, assure le succès de cette franchise, à mon avis. Honnêtement, je me suis demandé ce qu'ils pouvaient bien trouver cette fois. Et ils sont arrivés avec des idées formidables, qui fonctionnent à merveille en 3D!»

Hommage aux enseignantes

Quand on lui demande d'évoquer son parcours d'acteur, un métier qu'il a commencé à exercer par accident, Geoffrey Rush rend hommage à toutes ses enseignantes qui, alors qu'il était adolescent, ont su déceler chez lui un beau potentiel.

«À cette époque, il n'y avait pratiquement rien en Australie, rappelle-t-il. On ne pouvait pas trop rêver à une carrière dans les arts. Mais j'ai eu la chance d'avoir des enseignantes inspirantes - toujours des femmes - qui, avec beaucoup de dévotion, m'ont fait aimer la musique, le théâtre, la littérature. Au point où j'ai délaissé mes études en sciences et en maths pour me diriger vers l'art dramatique.

«Le jour où j'ai eu mon diplôme, j'ai pensé que je finirais probablement enseignant ou annonceur radio. Mais une compagnie de théâtre a été fondée à Brisbane et on m'a offert un contrat. Tout est parti de là. J'avais 20 ans. Quand Shine est arrivé, j'étais déjà bien installé dans ma carrière d'acteur au théâtre et dans ma vie. Je crois que cela a été un avantage.»

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Pirates of the Caribbean: Dead Men Tell No Tales (Pirates des Caraïbes - Les morts ne racontent pas d'histoires en version française) est actuellement à l'affiche.

Les frais de voyage ont été payés par Disney Pictures.