Le cinéaste français Yann Gozlan est allé à la meilleure école du thriller, celle d'Alfred Hitchcock. Son deuxième long métrage, Un homme idéal, s'en inspire, en plus d'être porté par un acteur doué, Pierre Niney (Yves Saint Laurent).

Un homme idéal de Yann Gozlan a fait près de 700 000 entrées en France. Un score impressionnant pour un deuxième film, dans un genre, le thriller, qui ne suscite plus l'engouement des financiers français.

Évidemment, le cinéaste a pu compter sur la jeune vedette d'Yves Saint Laurent (Pierre Niney), mais il misait aussi sur sa maîtrise des codes créés par le plus grand des cinéastes de genre, Alfred Hitchcock.

«C'est sans doute l'un des plus grands metteurs en scène, comme D.W. Griffith, soutient Yann Gozlan. Il a créé le langage cinématographique d'une certaine manière. Il a créé les notions de suspense, tension, surprise. Il a toujours innové. Vous ne pouvez pas faire de thriller sans vous poser la question: comment Hitchcock aurait fait ça?»

Il dit avoir trouvé chez Hitchcock la façon d'aborder une scène, la façon de la raconter et le souci d'efficacité. Les techniques du célèbre réalisateur de Psycho l'ont aidé à «mieux toucher le public» avec cette histoire de Mathieu, apprenti écrivain de 25 ans, homme apparemment «idéal».

«Le cinéma et le mensonge, ça marche très bien. On peut filmer quelqu'un qui est en contradiction avec ce qu'il vit. C'est formidable. Le mensonge crée des situations dramatiques très intéressantes.»

Financement

Le cinéaste est aussi coscénariste de cette histoire de vol de manuscrit qui permet au jeune auteur, jamais publié, de connaître la gloire, l'amour et la fortune. Cette histoire qui tournera mal en est une qui a failli ne pas se tourner.

«J'ai mis un peu de temps à trouver le financement du film. J'avais un scénario beaucoup plus long. Le début du film était très différent, j'ai dû repartir en écriture. Le thriller en France, ça marche moins bien que les comédies et les drames. Les financiers sont plus frileux.»

Puis, coup de chance, Pierre Niney, l'interprète d'Yves Saint Laurent dans le film de Jalil Lespert, embarque dans le projet.

«J'ai eu la chance que Pierre aime le scénario et accepte de le tourner. Artistiquement, c'était génial, le film n'étant raconté que du point de vue du personnage principal. J'avais besoin d'un comédien virtuose, capable d'incarner la duplicité, de jouer sur plusieurs niveaux, mais qui dégage une certaine empathie.»

Un personnage complexe qui est presque de tous les plans du long métrage. Un personnage que l'on aime autant qu'on le déteste.

«Le personnage commet des actes répréhensibles. Le défi était de continuer de le suivre, malgré tout ce qu'il fait. Je ne tente pas de l'excuser, mais de le comprendre. À partir du moment où il vole ce manuscrit, il a un côté faustien. Il fait un pacte avec le diable et il va vivre un cauchemar. C'est une ordure, mais parce qu'il vit des conflits intérieurs, vous voulez qu'il s'en sorte.»

Littérature

Voici également l'un de ces rares films qui parlent de littérature, du milieu vorace de l'édition française, de la machine implacable du succès.

«J'aime beaucoup cette partie du film où il invente son personnage d'écrivain. Il va chercher une entrevue très ancienne de Romain Gary [écrivain qui possédait son propre double, Émile Ajar, et que Pierre Niney vient de jouer dans un film d'Éric Barbier! ]. On est comme dans un laboratoire avec ce personnage qui a un instinct de survie un peu animal.»

Le Mathieu joué par Pierre Niney reste mystérieux d'un bout à l'autre. Ce qui est clair, c'est qu'il aime les livres et cette jeune femme, Alice (Ana Girardot, aucun lien de parenté avec Annie), rencontrée à un lancement.

«Ce n'est simplement pas un type motivé par la célébrité pour la célébrité, ça ne m'aurait pas intéressé de raconter son histoire. Je ne m'y serais pas reconnu. Lui, il est mû par quelque chose de sincère.»