C'est sans scénario qu'Olga Kurylenko a amorcé le tournage de To the Wonder de Terrence Malick. Sans scénario, mais après beaucoup de lectures et de discussions avec un réalisateur aux méthodes uniques.

Jointe à Londres où elle faisait la promotion de son «autre» film, Oblivion de Joseph Kosinski, Olga Kurylenko admet sans ambages avoir été surprise quand elle a vu To the Wonder pour la première fois. Elle est pourtant de presque toutes les scènes du film. Mais Terrence Malick «tourne tellement que le résultat ne représente qu'une fraction de ce qu'on a filmé», dit la comédienne et mannequin qui incarne ici Marina, une Française qui suit l'homme qu'elle aime (Ben Affleck) en Oklahoma. Où leur relation se détériore.

Dit simplement, c'est cela. Mais c'est beaucoup plus. Façon Malick. Et pour véhiculer ce beaucoup plus, Olga Kurylenko, qui a auditionné à Paris devant le directeur de casting du long métrage puis au Texas en présence du réalisateur, a eu à se préparer. Énormément.

«Je n'ai pas eu de scénario entre les mains, jamais, poursuit-elle au bout du fil, voix vibrante et énergie contagieuse. Mais avant que nous ne commencions le tournage, il m'a demandé de lire Anna Karénine, Les frères Karamazov et L'idiot.» De ces oeuvres monumentales, elle avait pour devoir d'extirper six personnages féminins et d'en modeler un seul qui deviendrait Marina. À qui le réalisateur a donné des racines slaves, pour le coller davantage à son actrice née en Ukraine.

Maintenir l'étonnement

Une fois ces lectures faites, «je n'avais plus besoin de scénario», pouffe-t-elle. Par contre, toujours avant le tournage et, par la suite, sur une base très régulière, elle a parlé de Marina avec Terrence Malick. «Je connaissais son histoire, je la connaissais, elle, mais j'en savais très peu - presque rien, en fait - sur les autres personnages. Et j'ignorais tout de la fin.» Ce qu'elle voit comme une manière, pour le réalisateur, de reproduire le sentiment de vie, de vérité, de naturel: nous marchons tous vers l'inconnu et nous ne savons des autres que ce qu'ils veulent bien nous dire d'eux.

C'est pour cela, ajoute-t-elle, que chaque acteur avait ses moments en tête-à-tête avec le réalisateur. Jamais de discussions de groupe. «Je pense qu'il avait une histoire différente pour chacun de nous», confie-t-elle. Puisque personne ne voit ni ne vit les choses de la même manière.

«Et c'était vraiment excitant. Le matin, il nous donnait un genre de pensée du jour. Une journée, je savais que j'allais jouer et rire sur l'herbe. Le lendemain, que j'allais me disputer avec Ben. Mais j'ignorais ce que la réaction de Ben devait être.» Une situation qui les empêchait tous deux d'avoir toute préméditation dans le jeu.

Mais à l'arrivée, To the Wonder est le film d'Olga Kurylenko plus que celui de Ben Affleck. Qui ne prononce qu'une dizaine de mots dans les deux heures que dure le long métrage. Et qui est souvent filmé de dos. Ou dont on n'aperçoit que le bas du visage. «Je ne pense pas que Terry ait dit aux autres acteurs à quel point ils seraient ou ne seraient pas dans le produit final, mais je sais que pour Ben, ça a été frustrant d'être cet homme froid.» D'être seulement cela, puisqu'il était aussi autre chose dans les innombrables scènes mises en boîte.

On se souviendra que Sean Penn avait également été déçu de son passage dans The Tree of Life. C'est la méthode Malick. Et, comme ses films, on adore ou on déteste.

To the Wonder prend l'affiche le 26 avril.