Alain Chabat rêvait de porter le «petit animal» au grand écran avant même qu'on lui offre de se pencher sur les aventures du «petit Gaulois». Dix ans après Astérix et Obélix: mission Cléopâtre, voici Sur la piste du Marsupilami. Par Toutatis, Alain Chabat peut crier: «Houba! Houba!» Il le fait, d'ailleurs. Conversation.

Alain Chabat sait qu'il est chanceux, et il n'a aucun problème à le reconnaître: il a eu l'immense honneur de rencontrer le «vrai» Marsupilami et de travailler avec lui. Même si le petit animal a un sacré caractère, «il n'y a rien qu'on ne puisse obtenir avec des bisous», dit-il en rigolant. Heureusement, l'acteur-scénariste-réalisateur, que La Presse a joint à Paris, a eu l'aide de l'entreprise d'effets spéciaux BUF pour le seconder quand le Marsupilami décidait de prendre congé pour aller pêcher le piranha.

Après avoir exploré l'humour de Goscinny dans Astérix et Obélix: mission Cléopâtre, Alain Chabat s'est donc penché sur celui de Franquin. Deux univers qu'il connaît depuis l'enfance, et dont il savoure aujourd'hui le second niveau, qui lui échappait quand il était plus jeune. Du premier, il aime la vastitude: «L'univers du Petit Nicolas n'est pas celui de Lucky Luke, d'Iznogoud ou d'Astérix.» Du second, il apprécie «l'univers un peu plus politique, les positions sur l'armée ou l'écologie, par exemple, et le fait qu'il était aussi un dessinateur. Il maîtrisait le mouvement comme peu d'autres.»

Si le bédéiste mort en 1997 possédait une facette plus sombre, que connaissent les lecteurs d'Idées noires, il a aussi signé des albums aux couleurs flamboyantes dont font partie ceux qui mettent en scène le Marsupilami. Le petit animal d'environ un mètre de hauteur, au pelage jaune tacheté de noir, à la force herculéenne, glouton, au caractère enjoué mais qui peut devenir féroce si on s'en prend aux siens, est doté d'une spectaculaire queue de huit mètres.

Un petit animal mis en scène, donc, mais pas nécessairement en vedette, autant dans certains albums que dans Sur la piste du Marsupilami, dont Alain Chabat a coécrit le scénario (avec Jeremy Doner), qu'il réalise et où il tient l'un des rôles principaux aux côtés de Jamel Debbouze. «Franquin a toujours dit que le Marsu devait être un personnage central, mais pas principal. Il est formidable quand il est en réaction à ce qui se passe autour de lui, mais moins intéressant en tête de distribution. Je suis parti de ça pour le scénario», explique Alain Chabat.

Un «buddy movie»

Comédie d'aventures destinée à la famille, Sur la piste du Marsupilami, qui a connu un très grand succès en Europe, présente le petit animal comme «la cible de tous les enjeux» et rebondissant (au propre comme au figuré) d'un personnage à l'autre.Ces personnages, ce sont Dan Geraldo (Alain Chabat), reporter envoyé dans une dictature sud-américaine, la Palombie, où, en quête d'un scoop, il fera équipe avec Pablito (Jamel Debbouze), guide local plein de ressources. Ensemble, ils vont pénétrer dans la jungle palombienne, affronter un dictateur impitoyable (Lambert Wilson), un botaniste diabolique (Fred Testot), la mystérieuse tribu Paya. Et ils vont faire la plus formidable des découvertes: le Marsupilami existe!

«C'est un buddy movie», résume Alain Chabat qui s'est installé pendant deux mois au Mexique, où une très grande partie du film a été tournée. C'est là qu'il a travaillé avec le «vrai» Marsupilami dont il a rapporté de formidables images qu'il fallait «synchroniser» avec celles, de synthèse, créées par l'équipe de BUF. Gros travail. «Le processus de création a été assez long. Parfois, je trouvais le design du personnage trop animal ou trop cartoonesque. Il fallait que ce soit un vrai petit animal, pas Garfield ou Roger Rabbit. Que l'effet soit celui, réaliste, du King Kong de Peter Jackson. Un petit King Kong.»

La discipline de Jamel

Trouver la voix du personnage a aussi été un défi. «J'ai utilisé un enregistrement d'une demi-heure de Houba! Houba! réalisée par Franquin lui-même. J'en ai enregistré d'autres, j'ai ajouté du phoque, du chat, des bébés.» Et il a mixé tout cela. À la plus grande satisfaction du véritable Marsupilami, on ne peut plus ravi de s'éclipser du plateau et de la salle de postproduction.

On s'en doute, le petit animal est un électron libre. À l'image de Jamel Debbouze? Rires au bout du fil. «Jamel est plus discipliné et sérieux qu'on l'imagine. Il est très bosseur et extrêmement précis. Mais sa manière de se concentrer avant une prise, c'est de dire des conneries et de sauter partout. C'est super, non? Moi, j'adore travailler dans cette ambiance.»

En fait, Alain Chabat adore ça à un point tel qu'il a écrit le rôle de Pablito pour Jamel Debbouze, qu'il avait dirigé dans Mission Cléopâtre. «Nous avions une envie commune de faire un duo à l'écran, de créer une histoire où deux mecs qui se détestent vont devoir partager une aventure.» Pour le meilleur et surtout pour le pire, car avant les «Houba! Houba!», il y aura pas mal de «Houlala-Houlala!»

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Sur la piste du Marsupilami prend l'affiche le 10 août.