Il a de la gueule, Nicolas Canuel. Silhouette nerveuse, mâchoire carrée, cheveu coupé court, tout est précis dans l'allure du comédien. Hasard ou coïncidence, les réalisateurs l'imaginent souvent dans des rôles de durs : «mercenaire» dans Le dernier tunnel, prêtre trouble dans Sur le seuil, et même voleur, dans le succès surprise de l'été, Bluff.

Dans Bluff, Nicolas Canuel est Chuck, une petite frappe qui réalise un faux cambriolage avec Marc Messier, délinquant débonnaire. Encore un voleur, «mais c'est pas un tueur, c'est un malfaisant», nuance le comédien. Un spectateur de Québec l'a un jour interpellé: «Toi, si t'étais pas comédien, tu serais voleur!»

Ni voleur ni comédien, sa mère l'aurait vu avocat. Nicolas n'a pas écouté Lucille Papineau, sa comédienne de mère, ni Yvan Canuel, son comédien de père. Son frère Érik est devenu réalisateur. Et lui, Nicolas, est devenu comédien. De théâtre, d'abord, puis de cinéma.

Avec son père, metteur en scène, Nicolas Canuel apprend les ficelles du métier. «J'ai joué avec lui pendant des années», se souvient-il. Très tôt, il trouve dans le jeu «une résonance». Nicolas Canuel étudie à Sainte-Thérèse, avant de revenir vers le théâtre familial.

Son parcours n'a rien de l'itinéraire d'un enfant gâté. Nicolas Canuel a connu ses galères. Après une période de vaches maigres, il a même tout quitté pour s'installer à la campagne. Éric Tessier est venu le chercher pour Sur le seuil. «J'ai appris qu'il faut savoir lâcher prise dans la vie», énonce-t-il.

Depuis, les choses vont comme elles viennent. Au cinéma, il y a eu Nez Rouge, Le dernier tunnel, La rage de l'ange, et même Bon Cop Bad Cop, le film de (presque) tous les records réalisé par Érik. «C'est mon frère, on se comprend. Avec lui, c'est facile en tant que comédien de rendre compte de sa vision des choses», note-t-il.

Ce printemps, la petite entreprise porno de son personnage dans Ma fille, mon ange, faisait le malheur de Michel Côté, papa éploré de Karine Vanasse. «Ce personnage est perçu comme la bête noire du film. C'est un séducteur, un brillant homme d'affaires. Et c'est probablement le personnage le plus intègre du film», défend-il.

En ce moment, les tournages se succèdent, et c'est tant mieux. Il y a Les Lavigueur, une nouvelle série télé, et aussi, le prochain long métrage de Denis Côté, Elle veut le chaos. Face à Laurent Lucas, il sera un «mauvais garnement». Là encore, le physique joue. «J'essaie toujours de donner des marques physiques à mes personnages», plaide-t-il.

En amoureux du cinéma, le comédien n'aime rien tant que les atavismes du comédien. «J'aime beaucoup les gars qui surprennent, qui prennent des risques», dit-il. Lui aussi pourrait surprendre: après un passage dans la musique, Nicolas Canuel ferait bien quelque chose qu'on voit peu, un film d'amour.

«Ce sont des films qui marquent», estime-t-il. Lui-même s'est trouvé complètement bouleversé par Fanfan, le film du romancier romantique Alexandre Jardin. «Bon, c'est un peu à l'eau de rose, mais ça a remis en question mon couple à l'époque. Je suis en total accord avec son approche de l'être aimé», dit-il. Son couple n'a d'ailleurs pas survécu au film.

La trentaine passée, Nicolas Canuel s'est assagi, vit avec sa compagne et vient d'être papa. «J'ai appelé mon gars Eliott. Deux mois après, on me proposait un rôle dans la série Les soeurs Eliott», dit-il. La vie est comme ça, pleine d'imprévus. «C'est ce qui est merveilleux. Finalement, les choses se placent.»