Philip Pullman a confié le destin des personnages d'À la croisée des mondes au réalisateur Chris Weitz. Mais le romancier a toujours été là à titre de conseiller. Tout en continuant à écrire. Portrait de l'impact de cet homme sur ceux qui ont adapté son livre pour le cinéma et survol de son oeuvre.

Alors qu'À la croisée des mondes - La boussole d'or de Chris Weitz trône au sommet du box-office nord-américain, Philip Pullman, auteur de la trilogie dont le film s'inspire, se fait discret. Il n'était pas des entrevues auxquelles des journalistes des quatre coins de la planète ont été invités, récemment à Londres. Il n'était pas non plus par-dessus l'épaule du réalisateur quand celui-ci s'est attelé à la scénarisation du premier volet de la trilogie.

Rappelons que l'histoire en question gravite autour du personnage de Lyra, qui vit dans un monde où chaque humain est attaché par un lien invisible à un daemon qui est la représentation physique, sous forme animale, de son âme. Lyra, donc, est entraînée dans une quête quand son meilleur ami est enlevé. Elle poursuivra les kidnappeurs. Sa route croisera celle de gitans, de sorcières, d'ours en armure, etc.

«J'ai fait ma part. J'ai confié le livre à Chris et à son équipe et je sais que mon histoire se trouve entre bonnes mains», a-t-il déclaré récemment aux médias britanniques.

Mais il a été présent, au besoin. Pour l'équipe de production, le réalisateur, les acteurs. «Il nous a conseillé de nous coller à Lyra, de ne pas nous laisser distraire par les pistes secondaires du récit», a indiqué la productrice Deborah Forte. «Nous avons décidé de déplacer les trois derniers chapitres du roman au début du deuxième film. Je ne l'aurai pas fait sans l'approbation de Philip», a noté Chris Weitz.

Quant à Nicole Kidman, qui interprète l'énigmatique Mrs. Coulter, elle affirme que le romancier l'a aidée à mieux comprendre son personnage «grâce à cette scène magnifique qu'il m'a écrite». Une scène où elle gifle son daemon avant de le serrer dans ses bras. «C'est dire combien je m'aime et me déteste en même temps», a ajouté la comédienne.

Eva Green, qui joue le rôle de la sorcière Serafina Pekkala, était inquiète de la réaction du romancier. «Je lui en ai fait part et, après avoir vu le montage presque final du film, il m'a écrit une lettre très belle dans laquelle il m'a félicitée», a-t-elle raconté.

Le fantôme de Philip Pullman planait donc sur ces rencontres de presse. L'homme, lui, travaillait à son prochain roman, qui s'intitulera The Book of Dust. Pas la suite d'À la croisée des mondes, mais un complément, où il en dit plus sur cette mystérieuse «Poussière» qui occupe une place importante dans cette trilogie qui, si elle est l'oeuvre la plus connue de l'écrivain, n'est pas la seule à être issue de son imaginaire foisonnant.

Les autres livres de Pullman

Ceux qui voudraient découvrir une autre facette du talent de Philip Pullman devraient se plonger dans la série Sally Lockart quatre polars qui se déroulent à l'époque victorienne et mettent en scène une jeune détective privée. Elle vieillit de tome en tome, devient même mère, et a dénoué des intrigues d'un suspense consommé.

Dans un autre genre, impossible de passer à côté du génial J'étais un rat. Là, un vieil homme et une vieille femme qui rêvent d'avoir un enfant en trouvent un, un soir, devant chez eux. Un garçon qui affirme avoir été un rat. Et... c'est vrai. Mais il serait péché de révéler quel rat en particulier.

Enfin, pour en savoir plus sur l'homme lui-même, Nicolas Tucker a écrit Rencontre avec Philip Pullman. Un portrait bien fait de celui qui, en entrevue à La Presse au moment de la sortie du troisième tome d'À la croisée des mondes, avait dit: «Le Seigneur des anneaux est une histoire intéressante, mais je ne trouve pas qu'elle m'ait dit quoi que ce soit. Les chroniques de Narnia, elles, m'ont dit des choses intéressantes, mais que je n'ai pas aimées.»

Cela donne une petite idée du personnage...

____________________________________________________
L'oeuvre de Philip Pullman est, en français, publiée chez Gallimard. Les frais de voyage de ce reportage ont été payés par Vivafilm.