À l'origine de Be Kind Rewind, il y a un rêve. Une utopie qui vit en Michel Gondry depuis l'adolescence. «Dénicher un vieux cinéma abandonné et trouver un système pour réunir les gens du quartier, leur donner une caméra, les laisser faire leurs propres films qu'ils projetteraient la semaine suivante, récoltant un peu d'argent pour en réaliser un autre la semaine d'après», explique le réalisateur joint au téléphone à Toronto où, il y a une dizaine de jours, il faisait une autre tournée promotionnelle pour ce long métrage mettant en vedette Jack Black et Mos Def.

Pour l'homme derrière Eternal Sunshine of the Spotless Mind et La science des rêves, il ne fait aucun doute que «les gens s'amusent plus à regarder les choses qu'ils ont faites eux-mêmes que celles que l'on a faites pour eux». Et il a écrit un scénario qui, sous des dehors ludiques, mène à cela: après avoir effacé par accident toutes les cassettes VHS de leur club vidéo, les personnages de Be Kind Rewind vont «refaire», sans moyens, les films les plus populaires auprès de leurs clients. Puis, vont finalement tourner le leur, en propre. Toujours avec «les moyens du bord». Pourquoi pas.

Bien sûr, la promotion du long métrage est faite autour des longs métrages que les deux complices refont selon la technique du sweding. De Sweden. Suède. «J'ai choisi ce mot au hasard et Jack Black a improvisé dessus», fait le réalisateur natif de Versailles qui vit aujourd'hui à New York et écrit ses scénarios «en anglais, mais avec l'aide d'une amie qui m'aide un peu à formuler mes phrases. Je n'ai pas la prétention d'être un super écrivain, surtout en anglais, mais quand j'ai une idée, je sais exactement comment l'exécuter - et ça, c'est pas mal!»

Et des idées, il fallait en avoir pour sweder King Kong, Rush Hour et autres Driving Miss Daisy. Mais pas Back to the Future, que Michel Gondry aime particulièrement et aurait voulu utiliser: «Steven Spielberg et Robert Zemeckis ont refusé de nous accorder les droits parce qu'ils ont l'idée d'en faire un musical et ils ont craint que ça nuise à leur projet.»

Ils auraient pu faire confiance à l'imaginaire foisonnant et intelligent de Michel Gondry. À sa façon de détourner des objets afin d'exprimer beaucoup plus que ce qui pourrait sembler à première vue. Parce qu'au-delà du principe très amusant du sweding, Be Kind Rewind parle aussi d'embourgeoisement des quartiers et, surtout, de création. Ce, à plusieurs niveaux.

Ainsi, ce n'est pas pour rien si Michel Gondry a fait que les protagonistes du film enregistrent leurs oeuvres sur la bande même où se trouvait le produit original. «Je voulais faire un commentaire sur le remake», reconnaît le réalisateur pour qui, visiblement, le rêve n'est pas du n'importe quoi. C'est une science.