De toutes les questions qu'on lui a posées en carrière, il y en a une qui a vite devancé toutes les autres. Bon an, mal an, elle revenait. Inlassablement. De tous côtés. «Dites, c'est pour quand la suite de Cruising Bar

Pour Michel Côté, soyons francs: la prise deux n'était d'emblée pas très attrayante.

«Tout de suite après le succès du film, ça ne me tentait vraiment pas. Replonger dans l'univers de la drague... bof. J'avais d'autres projets, d'autres envies.»

Les années ont passé, les gens ne se sont pas lassés. Toujours et encore, ils redemandaient le ver de terre, le taureau, le paon et le lion sur grand écran. L'idée a fait son chemin dans la tête de celui qui les incarnait. Le «non» s'est mu en «peut-être». Un beau matin, l'idée maîtresse était là: tiens, si on retrouvait les quatre lurons 20 ans plus tard, toujours en mode séduction...

«On a décidé de le faire maintenant, avant de regretter de ne pas l'avoir fait, dans 10 ans d'ici.»

À partir de là, le projet s'est mis en branle et tout s'est enchaîné rondement. Dans une petite semaine, le deuxième épitre des quatre zigues au coeur mal luné défilera dans tous les cinémas du Québec. Dire qu'il est attendu est un euphémisme. Savoir comment il sera reçu reste un mystère. Le pari était grand et le milieu du septième art québécois a changé en presque 20 ans. Côté le sait et le dit. «Je ne suis pas du genre à vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. C'est difficile d'anticiper l'accueil qui sera fait au film. Nous, on s'est lancés dans l'aventure pour se faire plaisir et pour faire plaisir aux gens qui souhaitaient une suite.»

Drôles de moineaux

Les retrouvailles avec les quatre moineaux qu'il a mis au monde il y a près de deux décennies ont été heureuses. Pas trop ampoulées. C'était comme renouer avec de vieux potes.

«Avec Broue, j'ai gardé l'habitude d'incarner plusieurs personnages très typés. Ma disquette n'était pas trop rouillée. J'imaginais très bien Patrice, Gérard, Serge et Jean-Jacques, quelques années en plus. Ce qui leur arrive s'inscrit en continuité avec ce qu'on connaît déjà d'eux. On change beaucoup, de 10 à 30 ans, mais entre 30 et 50, pas tant que ça. Ils sont donc fidèles à eux-mêmes.»

Avec, en prime, un côté un brin plus pathétique. Parce que se retrouver dans les bars en quête de l'âme soeur à 50 ans a quelque chose d'un peu plus triste, note le comédien qui, pour les besoins du film, a fait la tournée des grands ducs. Question de voir ce qui avait changé.

Son constat: rien.

«C'est pareil! La musique est aussi forte, les gens sont toujours dans ce jeu de séduction où les yeux travaillent fort et s'intéressent plus à l'apparence de la marchandise qu'au reste. La seule chose qui est différente, c'est qu'il n'y a plus de fumée dans les bars.»

Et que les clubs ont maintenant un féroce concurrent dans le fabuleux monde du virtuel: ils sont nombreux à se faire les yeux doux sur Internet. Avec plus ou moins de succès, c'est selon.

«Internet a changé les règles du jeu, mais est-ce qu'il a changé la vie pour le mieux? Non. J'ai vécu le avant, le après, et les gens ne sont pas plus heureux. Or, c'est ça l'important dans la vie: être heureux.»

Sur le versant du bonheur, lui se trouve fortuné comme peu le sont.

«J'ai su me fabriquer une vie heureuse avec mes enfants, ma femme, ma carrière. Je souhaite que tout ça continue. Simplement.»