Dans Polytechnique, le personnage joué par Sébastien Huberdeau, Jean-François, ne meurt pas sous les balles de Marc Lépine, mais c'est tout comme. À sa façon, il représente l'archétype de tous ces étudiants qui s'en sont voulus profondément de n'avoir rien pu faire pour empêcher la mort de leurs consoeurs d'études.

Jean-François nage dans l'impuissance. Il a vu les cadavres des étudiantes dans la classe et dans les couloirs, il a couru à gauche et à droite pour alerter les secours, toujours avec cette angoisse de tomber sur le tueur.

Une fois les événements passés, le jeune homme «rongé par le remords et la culpabilité» s'enferme dans le silence et le désarroi. «Il devient lui-même une certaine victime de Polytechnique», indique son alter ego à l'écran.

«Mon personnage n'arrive pas à s'affranchir (de ce qu'il a vécu), poursuit Huberdeau. Tout est à l'intérieur, ça reste pogné. Des millions de fois, il s'est posé les mêmes questions : «Qu'est-ce que j'aurais dû faire? Qu'est-ce que je n'ai pas fait? Pourquoi suis-je sorti de la classe? Pourquoi n'ai-je pas été capable de l'arrêter? Pourquoi je ne lui ai pas sauté dessus?» Il devient une victime de cette incompréhension. Qui aurait pu dire, lorsque le tueur est entré dans l'école, que ses tirs étaient sélectifs?»

Tension perpétuelle

Pendant la durée du tournage (un mois et demi), le défi de Sébastien Huberdeau consistait à conserver une «tension perpétuelle» à son personnage, toujours en action. «Il est comme dans une course à relais. Il court avertir les secours, il revient s'occuper des blessées, il y a une espèce d'essoufflement. Il fallait que je demeure toujours on the edge. À la fin du tournage, j'étais brûlé...»

Pour avoir vu trois fois le film, Sébastien Huberdeau est fier du travail accompli. «À moins d'être de mauvaise foi, on ne peut pas dire que le film est tombé dans les pièges. C'est fait avec sobriété et justesse. À la limite, Denis (Villeneuve) a même rendu ça poétique. Ceux qui vont aller le voir vont être touchés.»