Après avoir ouvert la 59e Berlinale jeudi, le nouveau thriller politico-financier du réalisateur allemand Tom Tykwer, dont les têtes d'affiche sont Clive Owen et Naomi Watts, s'apprête maintenant à prendre d'assaut les écrans nord-américains. Qui aurait pu deviner que The International serait autant d'actualité?

Au moment où les artisans se sont lancés dans le projet, The International (L'internationale en version française) faisait déjà preuve d'une certaine ambition. Le réalisateur allemand Tom Tykwer (Cours Lola, cours, Le parfum) voyait dans cette histoire une occasion d'élaborer un thriller à grand déploiement, dont le propos pourrait aussi stimuler le spectateur sur le plan intellectuel.

«L'actualité nous a rattrapés, expliquait le cinéaste au cours d'une rencontre de presse tenue à Los Angeles la semaine dernière. Notre ambition reste la même, dans la mesure où The International demeure un film à suspense d'abord et avant tout, mais il est certain que la crise financière mondiale lui donne maintenant une nouvelle couleur, une nouvelle pertinence. Jamais nous n'aurions pu imaginer un tel contexte!»

Qu'on en juge. L'intrigue du film s'articule autour des efforts que mettent un agent de l'Interpol (Clive Owen) et une procureure du ministère public américain (Naomi Watts) pour poursuivre en justice les dirigeants d'une banque délinquante. De Berlin à Istanbul, en passant par Lyon, Milan et New York, les deux partenaires partent à la chasse de financiers peu scrupuleux. Impliqués jusqu'au cou dans des activités illégales dont les résultats ont des répercussions partout sur le globe, ces derniers n'hésitent d'ailleurs pas à utiliser tous les moyens dont ils disposent pour arriver à leurs fins, y compris les plus ignobles.

«Il était clair dans notre esprit que nous voulions faire un film très contemporain, mais avec l'influence du grand cinéma des années 70, explique Tykwer. Particulièrement les thrillers réalisés par Alan J. Pakula (All the President's Men) ou Francesco Rosi (Main basse sur la ville, L'affaire Mattei). Des films comme Marathon Man ou Three Days of the Condor nous ont aussi inspirés.»

Si la trame de The International est complètement fictive, le scénariste Eric Warren Singer s'est néanmoins basé sur une affaire bien réelle pour élaborer le récit. Dans les années 70, la Bank of Credit and Commercial International, fondée au Pakistan, a fait scandale en élaborant diverses fraudes et des détournements de fonds douteux, et surtout, en offrant des services de trafic d'armes et de mercenariat. Le financement d'organisations terroristes figurait aussi dans le cahier des charges de l'institution. Démasquée 20 ans plus tard, cette banque «internationale» a dû cesser ses activités. Les artisans de The International ont ainsi imaginé comment une telle société pourrait fonctionner au XXIe siècle.

«C'est l'aspect qui m'intéressait le plus dans cette histoire, concède le cinéaste. L'appétit des banques n'a aucune limite, aucune morale. L'influence des grands financiers est planétaire. Ces derniers possèdent sur nous un pouvoir encore plus grand que les gouvernements. Et ils font toutes leurs activités à notre insu, derrière des portes closes!»

L'indignation pour moteur

De son côté, Clive Owen affirme sans ambages que le personnage qu'il campe dans ce film d'action est l'un des plus exigeants de sa carrière. «Ce tournage fut très intense, car cet agent est mû par une indignation qui ne se dément jamais, explique-t-il. Il faut mettre ce genre d'énergie dans chaque scène, sans répit, sans ne jamais pouvoir lever le pied. Et puis, il s'agit d'un homme en qui on ne trouve pas la moindre trace de vanité non plus. Il n'a aucune conscience de son apparence physique. À vrai dire, il s'en fout complètement. Seule compte sa mission.»

Tant pour l'acteur que pour le cinéaste, la mise en place de scènes d'action à l'intérieur même du célèbre musée Guggenheim de New York fut le temps fort du tournage.

«Déjà, à la lecture, il était clair que cette scène allait être immense!» commente Clive Owen.

Du script à la réalisation, il y a pourtant un pas qu'il aura fallu franchir en faisant une planification très rigoureuse.

«Le musée nous a donné la permission de tourner les scènes extérieures sur place, explique Tom Tykwer. Cela dit, il n'était pas question de nous installer à l'intérieur du vrai musée et de tout saccager! Pas avec le nombre d'oeuvres inestimables qui s'y trouvent.»

Avec les yeux d'un enfant à qui on offre un magasin de bonbons, Tykwer explique alors qu'une réplique pratiquement exacte du célèbre édifice, conçu par Frank Lloyd Wright, fut construite en deux parties dans un hangar des studios de Babelsberg, en banlieue de Berlin.

Le cinéaste a par ailleurs tenu à tourner son film dans les vrais endroits où l'intrigue se situe. «Je me suis notamment attardé à l'architecture que l'on retrouve dans chaque ville. Parce qu'elle révèle habituellement quelque chose d'important sur l'état d'esprit d'une société. Ou, à tout le moins, sur ceux qui ont fait construire ces édifices. Dans le film, les institutions financières investissent souvent des immeubles ultra modernes, tout en verre. Comme pour donner l'illusion de la transparence. En réalité, ce sont elles qui nous observent!»

The International (L'internationale en version française) prend l'affiche le 13 février. Les frais de voyage ont été payés par Columbia Pictures.