Pour jouer dans un film intitulé Le plaisir de chanter, il faut aimer et savoir... chanter, du moins un peu. Ce que Jeanne Balibar sait faire, comme en font foi ses deux albums. Ce qui ne l'empêche pas de parler de son personnage comme quelqu'un qui n'avait pas nécessairement à avoir la note parfaite, bien au contraire.

«C'est ça qui était chouette : je pouvais chanter comme je voulais, n'importe comment si je le désirais. Mon personnage avait la liberté de tout faire, de bien chanter mais aussi de mal chanter, n'importe quoi, même de la variété mal traduite en français. (...) Mais quand je chante sur mes disques, j'essaie de bien chanter, de faire quelque chose qui me convienne.»

En entrevue au Soleil, le mois dernier, à Paris, à l'occasion des Rendez-vous du cinéma français, Jeanne Balibar parle avec une certaine retenue de son personnage de Constance, dans la cynique comédie d'espionnage d'Ilan Duran Cohen, à l'affiche au Clap la semaine prochaine.

En ce début d'avant-midi, l'actrice vue dans Va savoir, de Jac-ques Rivette (et compagne à la ville du chanteur Philippe Katerine) semble plus ou moins dans l'ambiance opération charme, alors que débute pour elle une longue série d'entrevues avec des journalistes étrangers.

Sur un ton très réservé, Jeanne Balibar qualifie de «personnel et très rigolo» ce film au ton très particulier, où elle se glisse dans la peau de Constance, la veuve d'un trafiquant d'uranium assassiné. Propriétaire d'une compromettante clé usb convoitée par un couple d'agents secrets (Marina Foïs et Lorànt Deutsch), l'aspirante et naïve chanteuse entraînera sans le vouloir une galerie de personnages à son cours d'art lyrique et, par la bande, dans sa vie plutôt bizarre.

«Avec ce personnage, poursuit-elle sur le même refrain, je pouvais m'amuser à mal chanter. Constance, on n'est pas obligé de penser qu'elle chante bien. C'est ça qui est drôle, elle croit à tout ce qu'elle fait même si elle ne sait pas le faire...»

Une femme-mec...

Si Marina Foïs n'a pas à chanter dans le film de Duran Cohen (La confusion des genres), elle doit par contre aligner les scènes et les réparties audacieuses, face à son camarade espion qu'elle ne cesse de poursuivre de ses avances, tout en le vouvoyant... La comédienne de 39 ans considère comme une belle occasion d'être tombée sur ce film «contemporain qui pose un regard très juste» sur les gens de sa génération.

De son personnage de Murielle, une prédatrice à la recherche constante de rapprochement sexuel et animée d'un fort désir d'enfant, Marina Foïs croit qu'il renferme davantage d'attributs propres aux hommes. «Il est écrit comme s'il s'agissait d'un homme. Murielle, au fond, c'est un mec. D'ailleurs, on me l'avait carrément présentée comme un pédé pour parler de sa consommation sexuelle. C'est intéressant parfois de switcher les clichés.

«Le film aborde aussi, poursuit-elle, la notion de séduction qui est partout, tout le temps. Je trouve que c'est un leurre. Dans le film, tous les personnages sont séduits par le même mec (Julien Baumgartner). Je trouve cela un peu suspect, car vous et moi sommes différents, forcément on ne peut pas être séduit par la même personne. Aujourd'hui, on a une liberté sexuelle obligée qui est certainement pesante.»

Les frais de déplacement et de séjour à Paris ont été payés par Unifrance.