André Téchiné imagine l'histoire derrière un mensonge qui a secoué la France, durant l'été 2004. Fausse victime d'une agression inventée, Marie L. avait alors créé un vrai scandale médiatique et politique. Autour de Michel Blanc, Catherine Deneuve et Émilie Dequenne, Téchiné remonte aux racines du mensonge dans La fille du RER.

«Ce qui m'a intéressé, c'est d'épurer ce mensonge de toute la boue médiatique et de connaître ce qui a poussé cette fille à inventer cette fiction», dit le cinéaste. À la mythomanie d'une fille en manque d'attention s'est ajoutée la fiction des médias. «Cette pure chimère fait réfléchir sur l'état du monde», croit Téchiné.

Avec le style romanesque qui marque ses films, André Téchiné divise le film en deux chapitres: les circonstances et les conséquences. Jeanne (Émilie Dequenne) vit en banlieue avec sa mère (Catherine Deneuve). En plein déclassement social, le couple mère-fille voit le RER (le train de banlieue) presque traverser son jardin.

Jeanne «est un personnage qui, je crois, a une aspiration au bonheur. Elle est rieuse, solaire, elle n'est pas armée pour affronter la réalité. Elle n'arrive pas à faire partie de la réalité», estime Téchiné, qui cosigne le scénario avec Odile Barski et Jean-Marie Besset.

Amoureuse d'un jeune garçon fort en gueule (Nicolas Duvauchelle), Jeanne se laisse entraîner dans un travail aux limites de la légalité. Quand l'expérience tourne mal et que Franck la rejette, Jeanne s'écroule et invente une agression. «C'est une manière de pousser un cri, de revendiquer sa souffrance», dit le réalisateur.

Rapidement, l'affaire atteint le sommet de l'État en passant par tous les médias de France et de Navarre. Jeanne implique aussi un célèbre avocat juif et ancien prétendant de sa mère, Me Bleistein, dans son mensonge. Le film quitte la banlieue de Jeanne pour la campagne, où se retrouvent l'avocat, sa famille, Jeanne et sa mère.

On s'étonne alors que le film, qui peignait volontiers le climat social dans lequel naît le mensonge (chômage, agressions antisémites), se développe ensuite presque coupé du monde. «Je ne fais pas de sociologie: c'est l'histoire d'un mensonge. Je veux essayer de comprendre pourquoi cette fille a puisé dans la réalité. C'est un mensonge qui dit la vérité», répète André Téchiné.

C'est la première fois que Téchiné tourne avec Émilie Dequenne, révélée dans Rosetta, en 1999. «Ce qui m'a plu, c'est sa puissance dramatique, sa spontanéité. J'avais envie d'une actrice qui ne soit pas dépressive ou mélancolique. Elle a, en plus, une présence très forte», dit-il.