Ses films ont été vus dans une cinquantaine de festivals dans plus de 20 pays du monde. Le MoMA en a acquis trois. Il a aussi gagné une vingtaine de prix internationaux, en plus d'un Juno pour la direction photo.

François Miron ne court ni les concours ni les prix. Ses courts métrages voyagent bien, très souvent seuls, mais loin.

«Dans un festival, sur un écran derrière un groupe de rock psychédélique, dans une classe universitaire, sur le plafond d'un rave, dans une galerie d'art ou un sous-sol humide de banlieue...» écrit-il avec humour sur son site web.

Grand efflanqué à l'air désinvolte, on lui donnerait 20 ans de moins s'il n'avait pas de cheveux gris. Plus de 20 ans de carrière, il n'arrive pas à le croire lui-même. Il a étudié à Concordia en même temps qu'Érik Canuel et Pierre Gill.

«Quand j'y étais, raconte-t-il, tous les étudiants en réalisation se mêlaient entre eux, peu importe que l'on s'intéresse à la fiction, au documentaire ou à l'expérimental. On était dans le même édifice que les étudiants en arts visuels. C'était fascinant.»

Expérimental, le mot est lâché. Un bien grand mot pour dire une chose simple: le cinéma peut être un art visuel au même titre que la peinture ou la sculpture. Le film ne raconte plus d'histoire ou ne se colle pas au réel. Le film, en pellicule.

«Elle est là pour durer, je crois. J'ai tourné un film de danse pour le réseau Bravo en numérique, mais je préfère la pellicule. J'ai besoin de l'élément organique des grains qui bougent.»

Surimpressions de négatif et positif, de couleurs s'entrechoquant, ses films disent la gravité et la violence du monde moderne avec des titres évocateurs comme The Evil Surprise, Crepitus ou The Ultra World.

Frôlant l'abstraction, ses courts métrages sont sensations. Il a tout de même «commis» un long métrage de fiction il y a deux ans.

«C'est un concours de circonstances et un drôle de monstre, dit-il avec franchise. Je voulais faire quelque chose d'assez pété mais à part deux ou trois comédiens, le jeu n'est pas bon. C'est bancal. Je suis content des images avec toutes les références aux films d'horreur des années 70.»

Après son baccalauréat à Concordia, il a fait sa maîtrise à l'école du célèbre Art Institute of Chicago, puis travaillé à San Francisco.

Une route tout en slalom qui l'a fait croiser Nine Inch Nails, Gus Van Sant et Arcade Fire, collaboration qui lui a donné un Juno pour Neon Bible. Il enseigne la production depuis plusieurs années au sein de son alma mater.

«Il y a eu une espèce de cult following. Plusieurs nouveaux cinéastes ont pris mes cours. Certains se sont découverts et ont développé un bon corpus déjà. J'aurais peut-être dû garder certains secrets pour moi», fait-il en riant.

Malgré une anthologie DVD en préparation pour le début de 2010, aucun musée montréalais ne lui a consacré de rétrospective jusqu'ici.

Mais le vent semble tourner. La SODEC vient de lui accorder une aide financière pour continuer un long métrage documentaire sur le cinéaste américain Paul Sharits, décédé en 1993.

«C'était un personnage particulier, pour ne pas dire «fucké». On m'a raconté toutes sortes d'histoires à son sujet. J'ai eu accès à sa correspondance. Quand j'ai vu ses films à New York, il y a longtemps, ça a déclenché quelque chose. Wow, je me suis dit, il y a des gens qui font des films comme ça. J'ignorais que ça existait. J'ai voulu essayer.»

EN UN MOT

Artiste visuel cinématographique

MONTRÉAL, C'EST

«Culturellement, une ville fantastique. Il se passe tellement de choses en ville. C'est inspirant.»

QUE DIT-ON DE MONTRÉAL AILLEURS?

«Abordable et sécuritaire. Ils savent qu'on peut y être éméché à 4h du matin et rentrer sans se faire attaquer.»

QUE MANQUE-T-IL À MONTRÉAL?

«Une meilleure compréhension du cinéma en tant qu'art en dehors de l'ONF. Prenez ARTV, ils présentent la peinture, la danse, la sculpture mais pas un film qui en fait. Et ça s'appelle ARTV!»

À VOIR SUR LE WEB

filmgrafix.com