Pour son premier long-métrage, le réalisateur Daniel Grou, alias Podz, n'a pas choisi de rester dans sa zone de confort. L'adaptation du roman de Patrick Senécal, Les sept jours du talion, l'a conduit dans les recoins sombres de l'âme humaine, où se côtoient pêle-mêle pédophilie, meurtre d'enfant, vengeance, douleur, violence clinique et... rédemption.

En entrevue téléphonique avec Le Soleil, cette semaine, une douzaine d'heures après son retour du Festival de Sundance, où son film était projeté en première mondiale, le réalisateur de Minuit, le soir savourait encore le «bon buzz» autour de ce premier film. Une firme de distribution a déjà acquis les droits de 7 Days pour une diffusion sur les écrans américains.

À la première lecture du roman de Senécal, dont les livres Sur le seuil et 5150, rue des Ormes ont déjà fait l'objet d'adaptations au cinéma, Podz a tout de suite su qu'il allait en tirer un film. «Il y a quelque chose qui me parlait dans ce roman. C'était un vrai thriller psychologique avec des idées et une profonde réflexion sur les conséquences de nos actes.»

Les sept jours du talion tire son nom de la loi du talion, celle qui pousse à faire le mal pour se venger d'un mal subi. Le fameux oeil pour oeil, dent pour dent. Un père de famille bouleversé par le viol et l'assassinat de sa fillette (Claude Legault) fera sienne cette maxime.

Après avoir enlevé et séquestré le meurtrier, il lui fera vivre pendant sept jours le martyr, histoire de lui faire payer son crime. Un enquêteur, Hervé Mercure (Rémy Girard), un veuf qui peine à se remettre du meurtre de sa femme, tente de le retrouver. Pour éviter le pire, mais surtout pour sauver l'âme de ce père détruit qui s'apprête à perdre ce qui lui reste d'humanité.

Réflexion sur la violence

Dans le contexte d'une société qui a trop souvent tendance à banaliser la violence, surtout au cinéma américain, le cinéaste croit qu'un film comme Les sept jours du talion s'impose. D'autant plus que les meurtres et les disparitions d'enfants connaissent une couverture médiatique exponentielle, entraînant dans son sillage le retour de la peine de mort ou, le cas échéant, de l'instauration de la torture pour les coupables...

«C'est normal de vouloir se venger dans les circonstances. Si j'apprenais que quelqu'un a vengé le meurtre de sa petite fille, je ne pourrais pas lui en vouloir, mais en même temps, je ne l'accepterais pas. Au cinéma, les actes de violence sont souvent traités de façon cavalière. Le film pousse à réfléchir sur la violence et sur les conséquences de nos actes. Faire payer quelqu'un pour son crime, c'est s'enlever son humanité, il faut le dire. Seven [de David Fincher] posait d'ailleurs la même question : malgré toutes les atrocités, l'humanité mérite-t-elle d'être sauvée? Je crois que oui.»

Du roman, Podz avoue avoir con-servé l'essentiel. Il souhaitait surtout garder la même finale ouverte qui renvoie le spectateur à ses propres doutes et interrogations. «Lorsque j'ai lu le livre, je me suis dit qu'il fallait que le film se termine ainsi, ça s'imposait. Pour le reste, on a enlevé quelques "distractions", comme les flash-back de la petite fille.»

Mise en scène sobre

Le processus de sélection des deux comédiens qui allaient s'affronter dans ce huis clos macabre, malgré ce qu'on pourrait croire, n'a pas duré très longtemps. Claude Legault, que Podz a appris à connaître dans la télésérie Minuit, le soir, s'est imposé d'emblée. «Dès le départ, c'était lui. D'abord parce que j'aime travailler avec lui; ensuite, parce c'est un grand comédien, capable d'amener le personnage dans ces zones-là.»

Même sentiment de certitude lors-que Podz s'est retrouvé devant Martin Dubreuil. «C'est un gars qui n'a pas peur. En audition, il a torché. C'était lui et il l'a eu [le rôle].»

Les sept jours du talion n'est pas un film bavard. Pas plus qu'il ne donne dans les artifices, décision justifiée par la délicatesse de son sujet. Podz a voulu un film le plus sobre possible. «Je ne voulais pas de distraction ni d'échappatoire, comme de la musique. Pourquoi mettre de la musique, de toute façon il n'y en a plus dans la vie de Bruno Hamel [Legault]...»