Cette année, pas moins de deux Québécois sont cités dans les catégories «esthétiques».


Si l’on a beaucoup parlé de Patrice Vermette, directeur artistique de Jean-Marc Vallée pour The Young Victoria, la présence de Monique Prudhomme pour The Imaginarium of Dr Parnassus serait presque passé inaperçue, n’eût été la bienveillance de l’une de ses anciennes voisines. Il faut dire que la Montréalaise vit à Vancouver depuis des décennies.


Au téléphone, la gaieté de la voix de Monique Prudhomme séduit. Elle répond d’un tonitruant «This is Monique», ponctue ses phrases d’éclats de rire et demande parfois si elle a choisi le bon mot en français. Apparemment, les chichis de l’industrie du cinéma, dans laquelle elle travaille depuis plusieurs années, n’ont pas eu raison de sa simplicité.


Alors, cette nomination aux Oscars? «Ça m’a beaucoup surprise, avoue Monique Prudhomme. Notre film est un peu obscur et il n’a pas fait tant de recettes au box-office, mais je suis très honorée d’être reconnue par le milieu du cinéma pour mon travail. J’espère que cela va m’ouvrir d’autres horizons.»


La carrière artistique de Monique Prudhomme l’a menée en Angleterre, où Terry Gilliam a tourné une partie de The Imaginarium of Dr Parnassus. «Ç’a été une expérience assez phénoménale. Je l’appelle une odyssée», dit-elle.


Le film, dans lequel deux mondes sont mis en scène – un monde réel, et un monde fantasmé, l’«imaginarium» – a défrayé la chronique en raison de la mort de l’acteur Heath Ledger entre le tournage à Londres et le tournage à Vancouver, à l’hiver 2008.


À Londres, se souvient-elle, «c’était des conditions difficiles, il faisait très froid, on tournait de nuit, mais il y avait une atmosphère de solidarité et de joyeux travail». Les difficultés du tournage n’ont pas entamé la ferveur de Monique Prudhomme. La costumière n’a que de bons mots pour le réalisateur Terry Gilliam. «Le plaisir et le défi de travailler avec lui, c’est d’être aussi mobile que lui, d’être ouvert aux associations d’idées et aux images.»


L’univers du film, plutôt baroque, a laissé beaucoup de place à l’imagination et à l’inventivité de Monique Prudhomme.
«Il y a un mélange constant de vêtements de Chine, d’Inde, d’Europe de l’Est. C’était le principe de base. Il y a trois parties dans les costumes: le show, le théâtre et après, la partie de l’imaginarium.»


Costumes de friperie
Les costumes, Monique Prudhomme les a trouvés autant dans les friperies que chez des spécialistes du costume d’époque. Autodidacte, l’artisane se laisse inspirer par les costumes anciens et par ses trouvailles. «En fait, c’est ce que j’appelle la méthode chasseur-cueilleur: on part à l’aventure et on amasse des tas de choses, après, on fait du montage.»


Monique Prudhomme a appris son métier «dans les tranchées»: jeune fille, elle se destinait à l’enseignement avant de quitter à grandes enjambées ce milieu pour celui du cinéma. «J’avais des amis dans le milieu et j’ai pris une chance: je me suis proposée pour faire un stage. C’est comme ça que j’ai commencé. J’ai appris mon métier en le faisant.»


En 1982, elle quitte Montréal pour Vancouver, pour un homme qui lui a, selon elle, «offert la lune»: «Je suis partie m’installer sur un bateau à voile, à Vancouver», dit-elle. Elle travaille alors à des productions cinéma ou télé. En 2007, le film de Jason Reitman, Juno, lui vaut une nomination aux Costume Designer Awards.


Le secret des costumes réussis? «Le costume ne remplace pas l’acteur, au contraire. Mais il doit supporter le personnage. S’il est bien dans son costume, cela va l’aider à ancrer le personnage et soutenir la narration. Finalement, ça aide à raconter l’histoire», dit Monique Prudhomme.