Barry Pepper est né à Vancouver; a grandi sur un bateau; est devenu acteur «grâce» à Johnny Depp; a tourné avec Spielberg, Eastwood, et dans True Grit, les frères Coen. Rencontre avec un homme qui incarne le proverbial «Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage».

Quand il est arrivé à Los Angeles, au milieu des années 90, Barry Pepper a été victime d'un monumental mal du pays. «J'arrivais d'une petite ville canadienne et je me retrouvais dans cette mégalopole, je n'arrivais pas à m'y faire», racontait-il lors de l'entrevue qu'il a accordée à La Presse dans un hôtel de Los Angeles, afin de parler de son expérience dans la peau de Lucky Ned Pepper dans True Grit de Joel et Ethan Coen.

Mais il était impossible, auparavant, de ne pas jeter un oeil sur le parcours très particulier de celui qui, à première vue, n'était pas destiné à être acteur et qui a gardé une sincérité rarement observée sur la planète Hollywood. Ainsi, ce mal du pays est souvent évoqué par ceux qui décident de tenter le rêve hollywoodien - en particulier quand ils ne parviennent pas à faire leur place... ou qu'ils l'ont «trop» bien faite et jettent un regard (faussement) attendri sur leurs racines.

Barry Pepper, lui, a commencé à travailler immédiatement, apparitions ici et là, avant d'attirer l'attention de plusieurs «grands»: Steven Spielberg l'a engagé pour Saving Private Ryan, Clint Eastwood pour Flags of Our Fathers; il tourne présentement avec Terrence Malick et a goûté au travail avec les frères Coen - «ces génies qui sont sur toutes les listes A: acteurs, réalisateurs, producteurs... tout le monde est impressionné par eux».

N'empêche. Travail ou pas - et, en fait, il travaille beaucoup - il a décidé que sa fille grandirait entourée de ses grands-parents, de ses oncles et de ses tantes et, bien sûr, de ses parents. C'est pour cela que Barry Pepper fait constamment des allers-retours entre Los Angeles et Vancouver. Où il a un «semblant» de racines: en effet, il est né à Campbell River, sur l'île de Vancouver, mais n'avait que 5 ans quand ses parents, ses deux frères aînés et lui sont montés sur un voilier. La famille a sillonné les océans pendant cinq ans, avant de jeter l'ancre dans une autre île située au large de la Colombie-Britannique.

Barry Pepper a ainsi grandi dans une communauté d'artistes. C'est quand il s'est installé à Vancouver que le métier d'acteur s'est mis à vraiment l'intéresser. «Dans ma rue et partout où j'allais dans la ville, je tombais sur des tournages de 21 Jump Street», se souvient-il. La vedette de cette série télévisée n'était pas encore la star qu'elle est maintenant, mais elle a un peu influé sur le parcours de Barry Pepper: «Oui, rigole-t-il, on peut dire que je suis devenu acteur grâce à Johnny Depp... et de cinq ou six années d'études. On oublie trop souvent de dire que ce métier s'apprend, s'étudie.» Là, le ton est plus sérieux.

Comme quand il parle de ses rôles. Celui de Lucky Ned Pepper, le chef du gang qui a accueilli le meurtrier recherché par Rooster Cogburn (Jeff Bridges), Mattie Ross (Hailee Steinfeld) et le ranger LaBoeuf (Matt Damon), par exemple: «Je l'ai créé à partir du scénario des Coen, qui était remarquable. Après, j'ai lu le roman de Charles Portis. Je me suis servi des deux textes pour me préparer à l'audition, utilisant le fait que Ned Pepper avait reçu une balle dans le visage. Je me suis dit que sa mâchoire avait dû être brisée et qu'il devait lui manquer une partie de ses dents.» D'où la «voix» qu'il a trouvée, avant, bien avant qu'une fois le rôle dans la poche, les maquilleurs ne travaillent cette partie de son visage.

Et si, comme dans Casino Jack de George Hickenlooper, il joue ici les méchants, Barry Pepper est toujours à la recherche de scénarios «dont l'histoire rejoint ma sensibilité et ce que je veux dire au monde... même si mon personnage ne porte pas obligatoirement ce discours-là. Dans Casino Jack, je joue un gredin, mais le film dénonce ce qui se passe aujourd'hui encore à Washington, parle de notre société qui est menée par l'avidité et la cupidité des grandes entreprises et, ce faisant, donne des clés concernant ce qu'il faudrait faire pour mieux diriger le navire».

Et de rêver, ainsi, d'un autre genre de beau voyage...

True Grit (Le vrai courage) prend l'affiche aujourd'hui.

Les frais de voyage ont été payés par Paramount Pictures.