Alors que les projections en direct du Metropolitan Opera remportent un succès fou, d'autres grandes maisons d'opéra se lancent dans l'aventure du cinéma. C'est en 3D que le Royal Opera House de Londres a choisi de présenter le très populaire Carmen de Bizet, qui arrive sur nos écrans ce week-end.

Selon le réalisateur, Julian Napier, c'est la première fois que la technologie 3D est utilisée pour tourner un film d'opéra pour le grand écran. «Carmen était le meilleur choix possible pour cette première, car il s'agit certainement de l'opéra le plus populaire et le plus accessible du répertoire», a-t-il souligné lors d'un entretien téléphonique avec La Presse.

«À mon avis, le 3D permet de reproduire encore plus fidèlement l'expérience d'assister en personne à l'opéra, et de mieux transmettre toute l'intensité dramatique et les émotions», a-t-il ajouté.

Pour cette production, Carmen est interprétée par la mezzo-soprano Christine Rice, Don José par le ténor Bryan Hymel, Micaëla par la soprano Maija Kovalevska, et Escamillo, le torero, par le baryton grec Aris Argiris. L'orchestre du Royal Opera House est dirigé par le maestro Constantino Carydis. La mise en scène est traditionnelle.

Défis techniques

Faire un film en 3D est déjà techniquement plus complexe, en soi, qu'un film conventionnel. Mais les choses se compliquent davantage lorsqu'il s'agit de filmer un spectacle devant un auditoire.

«Il faut deux fois plus de caméras qu'à l'habitude avec le 3D, mais, en plus, vous ne pouvez pas, comme pour un tournage conventionnel, arrêter l'action et recommencer les prises, car le spectacle continue», dit Julian Napier.

De plus, pour obtenir un bon résultat avec le 3D, il faut filmer les sujets de très près, explique-t-il. «Pour les gros plans, il faut venir tellement près des sujets qu'il y a un risque d'apercevoir une autre caméra dans les prises de vue, dit-il. Il faut donc que tout soit chorégraphié avec minutie.»

Les caméras sur scène étant bien visibles des spectateurs du Covent Garden, ceux-ci ont été prévenus du tournage et on leur a vendu les billets d'entrée au rabais. Par ailleurs, le tournage ayant été réalisé en trois soirs, le résultat final comporte une bonne part de montage. Il ne s'agit pas d'une projection en direct comme pour les opéras du Met.

Bien qu'il apprécie l'opéra, Julian Napier, spécialiste du 3D, avoue qu'il n'avait jamais assisté à une représentation avant d'être embauché pour Carmen.

«Dans un sens, c'est un avantage, car je suis très représentatif de notre auditoire cible, dit-il. Nous visons des gens qui sont attirés par l'opéra mais qui n'ont jamais eu la chance d'y aller.»

Les critiques

Présenté depuis quelques semaines aux États-Unis et en Europe, Carmen 3D a suscité des critiques très variées. Le Washington Post a jugé la performance des interprètes «assez bonne, mais sans plus» et l'emploi de la technologie 3D superflu. Le critique du London Evening Standard a jugé le film «rafraîchissant», lui attribuant trois étoiles, tandis que le Los Angeles Times a qualifié le résultat «d'étrange et sensationnaliste».

Au New York Times, on a déploré l'absence de véritables stars internationales de l'art lyrique dans la production, arguant que s'il faut amener l'opéra au cinéma, on devrait présenter des noms qui attirent les foules. Quant à l'usage du 3D, on a jugé qu'il faisait ressembler les chanteurs à des hologrammes, et que cette technologie convient mieux aux films de science-fiction.

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Carmen 3D, 26 et 31 mars, 3 et 11 avril dans 30 salles au Québec avec sous-titres français à l'exception du cinéma AMC Forum 22 (s.t. anglais). Horaires détaillés et liste des salles: www.vivafilm.com