Le film Cellule 211 de l'Espagnol Daniel Monzon a beau avoir remporté huit prix Goya l'an dernier - l'équivalent des Oscars espagnols -, dont ceux du meilleur film, réalisation et acteur principal, son réalisateur garde les pieds sur terre.

«Mon prochain projet est assuré, annonce-t-il en entrevue téléphonique depuis Madrid. Mais c'est le fait que les gens ont adoré le film qui m'a davantage touché. Certains sortaient de la salle en applaudissant.»

Adapté d'un roman de Francisco Perez Gandul, le long métrage décrit une journée dans une prison espagnole telle que vécue par un jeune gardien qui se présente à son nouveau travail une journée à l'avance. Il sera pris entre deux feux lorsqu'éclate une émeute menée par des prisonniers déchaînés.

«C'est le pire qui peut arriver à ce futur papa très heureux en ménage. Cette histoire ressemble à une tragédie grecque. Le héros se trouvait tout en haut de la roue de la fortune et un tour du destin fait en sorte que sa vie bascule complètement. Et tout ça était dans le roman.»

Ce qui n'y était pas, par contre, est la décision de filmer la mutinerie un peu à la façon d'un documentaire avec une caméra portée à l'épaule, mais sans être hyperactive.

«Je déteste ces mouvements de caméra brusques et constants qui sont devenus comme une mode, explique le cinéaste. J'ai cherché à composer des plans réalistes, pour qu'on ait accès à l'expression et à l'intimité des personnages.»

La qualité de l'interprétation a valu aux deux acteurs principaux d'être aussi récompensés aux Goya: le jeune Argentin Alberto Ammann en gardien de prison et celui que la presse a qualifié de «Robert de Niro» espagnol, Luis Tosar, en leader des émeutiers.

«Luis est un grand acteur, estime le réalisateur. Il était très enthousiaste pour ce rôle dans lequel il a accepté de sortir de sa zone de confort. Il a travaillé pendant des semaines à se forger une voix spéciale, dure, rocailleuse pour jouer son personnage de Malamadre. J'avais peur qu'il s'abîme les cordes vocales.»

De vrais prisonniers agissent également comme acteurs dans certaines scènes du long métrage qui a été tourné à Zamora, dans une prison désaffectée depuis une dizaine d'années.

«Ces lieux se sont avérés importants pour le film, estime Monzon. La prison nous a aidés à mieux comprendre, autant à l'équipe technique qu'aux acteurs. Pour les prisonniers acteurs, certaines scènes relevaient de la catharsis. Ils ont pu tout briser pour recréer la mutinerie dans le film.»

Mais au-delà du drame qui ne cesse de s'épaissir à mesure que le récit avance, accompagnant le pire et le meilleur de l'humain qui émerge dans des situations extrêmes, une relation presque amicale se développe entre les deux personnages principaux.

«Comme être humain, le désespoir ne m'intéresse pas, dit Daniel Monzon. Ces deux personnages opposés, l'un au début de sa vie professionnelle, comblé, et l'autre, criminel endurci et violent, vont finir par se respecter et, oui, s'aimer .»

Le réalisateur de 43 ans ne veut tout de même pas suggérer que la vie en prison est une partie de plaisir, au contraire.

«Tous les faits présentés dans le film sont documentés. La prison où nous avons tourné ne sert plus, heureusement, mais la réalité des détenus reste difficile, violente. Des changements ont été apportés depuis quelques années, mais je mentirais si je disais qu'il n'y a plus de problèmes dans les prisons espagnoles.»

Cellule 211 (Celda 211) prend l'affiche vendredi prochain.