Dans un entrepôt anonyme planté en bordure de la rue Notre-Dame et de l'autoroute 20, l'équipe du film L'affaire Dumont est en effervescence sur le plateau où est recréé le décor d'une prison.

Dans le brouhaha des artisans se trouve un jeune homme de bonne taille, épaules carrées, coupe Longueuil et visage tuméfié. Qui est-ce? Une seconde passe, puis deux, puis trois. C'est Marc-André Grondin! Avec ses éraflures et son faciès fermé, le comédien est méconnaissable.

«On tourne plusieurs scènes aujourd'hui, dont celle où je me fais péter la gueule par les autres détenus qui viennent d'apprendre que j'ai été condamné pour le viol d'une femme, explique le comédien en entrevue. Ce n'est pas le premier film où je suis passé à tabac, mais c'est toujours un bon défi de rendre le personnage crédible.»

L'affaire Dumont est basée sur une histoire vraie survenue au Québec. Celle de Michel Dumont, un homme sans histoire qui est un jour accusé et condamné pour une affaire d'agression sexuelle. En cours de procédures, ce père de famille monoparentale rencontre Solange Tremblay, une femme déterminée qui s'éprend de lui et entreprend une longue démarche pour le faire acquitter. Ce qu'elle réussira.

Réalisé par Podz (Les 7 jours du talion, 10 ), le film est scénarisé par Danielle Dansereau et produit par Nicole Robert de Go Films. La comédienne Geneviève Brouillette, qui a eu l'idée originale, est productrice associée en plus de jouer le rôle d'une avocate.

«Faire un film avec Podz, c'est du bonheur. Il est talentueux et généreux, dit Nicole Robert. Que ce soit dans les effets visuels ou dans les émotions, on est renversé par ce qu'il vient chercher. Une personne sur le plateau a fait remarquer qu'il est comme un tsunami. Il est une vague qui prend tout sur son passage.»

Le réalisateur s'étonne un brin lorsqu'on évoque la force de ses images.

«On me dit souvent qu'elles sont belles, dit-il. Moi, mon seul but, c'est de mettre la caméra à la bonne place. Les questions d'esthétique, ça me dépasse un peu.»

Et qu'en est-il de ses thèmes? L'affaire Dumont, 10 , 19-2 et Xanadu en France... Podz est-il en train de devenir le cinéaste de l'underground et des mondes parallèles?

«Je suis simplement attiré par des sujets en dehors de la normalité, répond-il. Je suis curieux de découvrir ce qui se passe chez ces êtres.»

Erreur judiciaire

Pour lui, L'affaire Dumont est une histoire d'injustice. «Elle nous montre comment une personne peut être facilement broyée par le système. Parfois, nos vies tranquilles ne tiennent pas à grand-chose.»

Marc-André Grondin partage les mêmes sentiments. «L'histoire nous montre que ce genre d'erreur peut arriver à n'importe qui. Et les gens moins nantis ont peu de moyens pour se protéger. Michel Dumont a eu cette chance extraordinaire de rencontrer Solange.»

Dans le film, Solange est interprétée par Marilyn Castonguay, jeune comédienne qui en est à son tout premier long métrage. «C'est une dame forte qui ne se laisse pas intimider et qui sait où elle s'en va, dit-elle. Elle ne s'est pas apitoyée sur son sort.»

Le vrai Michel Dumont

Michel Dumont et Solange Tremblay sont très proches du projet. Ils vont même être figurants dans le film. Hier, ils étaient sur le plateau de tournage. L'un et l'autre sont enchantés du résultat.

«C'est impressionnant d'assister au tournage. J'ai l'impression de voyager dans le temps», dit Mme Tremblay. «Podz met parfaitement en valeur ce qui s'est passé», enchaîne Michel Dumont. L'un et l'autre revivent des scènes de leur vie avec de grandes émotions.

Emprisonné en 1994, Michel Dumont a été libéré dans l'attente d'un second procès en 1997. Après avoir participé à l'émission Enjeux à Radio-Canada, tout a déboulé. Il a fini par être acquitté et a engagé des procédures judiciaires dans l'espoir d'obtenir un dédommagement de l'État. Son appel vient d'être entendu.

Le tournage de L'affaire Dumont se poursuit jusqu'au 24 novembre. Le film prendra l'affiche en 2012.