Ils ont entre 11 et 15 ans. La plus jeune est en sixième année. Le plus vieux en quatrième secondaire. Ils sont heureux et souriants. Ils ne se connaissaient pas avant le tournage. Ils gardent «un peu» le contact depuis celui-ci. Ils ont des goûts et des intérêts différents. Mais ils sont unanimes sur deux choses: une expérience concluante sur le plateau et leur estime du réalisateur Philippe Falardeau. Qui sont-ils? Cinq des jeunes comédiens du film Monsieur Lazhar.

L'entrevue s'achève. Depuis une demi-heure, nous avons parlé de leur expérience sur le plateau. De l'école. Du temps des Fêtes. Du fait que des gens les reconnaissent dans la rue.

Et puis, nous demandons à cinq de la vingtaine des jeunes qui ont participé au tournage du film Monsieur Lazhar de nous dire ce qu'ils pensent du réalisateur Philippe Falardeau.

C'est comme si nous avions branché un sapin de Noël. Un beau sapin décoré et enneigé qui s'illumine soudainement de mille feux.

«Philippe, il est très drôle et très gentil, dit Sophie Nélisse (Alice dans le film), les yeux pétillants. Il est comme un bébé. Ben... un adulte-bébé.»

«Il aimait jouer avec nous. Il faisait des petites blagues, des niaiseries avec nous, précise Marie-Ève Beauregard (Marie-Frédérique). Parfois, avant les prises, on pouvait aller faire la claquette. Personnellement, j'ai adoré travailler avec lui. Il était à l'écoute de tout le monde. Il savait toujours quoi dire. Il a le sens des mots.»

«Il était toujours là pour nous aider», ajoute Vincent Millard (Victor).

Ce qu'affirment les enfants est confirmé par les parents. Alors que les jeunes comédiens se faisaient photographier, ils confient leur satisfaction quant aux conditions de tournage. «Sur le plateau, il n'y avait pas de vedette, dit l'un d'eux. À la pause repas, tout le monde mangeait chaud et ensemble. On n'isolait pas les jeunes ayant les rôles-titres des figurants.»

«C'était vraiment enrichissant, dit Marie-Ève. Philippe était à l'écoute de tout le monde. Nous étions tous égaux. Même si on ne connaissait pas, il y avait un bel esprit de groupe. On le ressent dans le film.»

Inquiétudes et célébrité

Mettant en vedette Fellag dans le rôle d'un immigrant qui remplace au pied levé une enseignante décédée dans des circonstances très pénibles, Monsieur Lazhar connaît une carrière fulgurante depuis sa première mondiale au Festival de Locarno, l'été dernier. Lauréat de nombreux prix, le film de Falardeau représente le Canada dans la course pour une place de finaliste dans la catégorie du meilleur film étranger en vue des Oscars.

Le tournage s'est échelonné sur plusieurs mois, mais plusieurs scènes se déroulent en hiver. De quoi donner quelques... sueurs à la production. Comme le tournage des scènes en classe a eu lieu après la fin de l'année scolaire par une chaleur extrême, tous les jeunes acteurs ont reçu un flacon de crème solaire «écran total». «Ils ne devaient pas bronzer», dit un parent, hilare.

«On craignait aussi que nos enfants grandissent et que les voix muent», dit un autre.

Du tournage, nos jeunes invités retiennent que la classe de Monsieur Lazhar ressemble à celle qu'ils fréquentent. «Une vraie classe, c'est un peu pareil, dit Sophie. Il y en a qui niaisent. D'autres qui se lancent des gommes sur la tête. Ou des papiers.» «La réaction des élèves avec l'arrivée d'un remplaçant, c'est plutôt véridique», lance Marie-Ève.

Comme dans le film, leurs classes sont multiculturelles. «Il y a une pluriculturalité grandissante au Québec», lance Seddik Benslimane (Abdelmalek). «Moi, j'ai constaté que les classes étaient plus multiculturelles lorsque j'ai quitté le primaire que lorsque j'y suis entré», dit Vincent.

Sophie Nélisse et Émilien Néron (Simon) sont les deux principaux personnages chez les enfants. Durant l'automne, ils ont participé à quelques événements promotionnels. Et avec tous leurs amis, ils sont allés à la première québécoise au cinéma Impérial. Qu'en ont-ils retenu?

«Il y avait des lumières avec lesquelles ont pouvait jouer», lance Seddik, déclenchant l'hilarité générale. Ce dernier évoquait l'installation lumineuse du Quartier des spectacles tenue cet automne.

«C'est sûr que la première fois où tu vois le film, tu penses à regarder tes défauts et à ce que tu n'as pas bien fait», lance Marie-Ève, ce que tous les autres acquiescent avec un grand «ouuuuuui!!!»

Depuis la sortie du film, ils ont goûté à une certaine célébrité. «Il m'est arrivé plusieurs fois d'être reconnu dans des magasins», lance Émilien. «L'autre jour, des gens m'ont reconnu dans le métro, enchaîne Sophie. Et il y a deux jours, lorsque je suis allée chercher ma soeur à son école, il y avait tout un groupe autour de moi.»

Selon les parents, leurs enfants font peu de cas de cette popularité. «Vincent n'en parle jamais», dit sa mère. «Mes parents parlent du film à tout le monde dans la famille», dit Seddick d'un ton détaché.

Goûts arrêtés

Ces jeunes sont représentatifs de la génération Facebook. Ils ont chacun leur compte et s'envoient des messages de temps à autre. «Ils ont leur propre compte pourvu qu'on soit leur ami», précise le père de l'un d'eux.

Ils ont déjà franchi l'étape télé jeunesse et ont basculé dans le monde des adultes. L'une écoute 30 vies. Plusieurs autres écoutent Canal D, Évasion, ABC Family ou les comédies sur Fox.

«Moi, j'aime l'émission Seul contre la nature à Évasion, évoque Émilien. Ils te montrent par exemple comment survivre sur le mont Kilimandjaro.»

Émilien est le seul - et l'affirme clairement - à exprimer son appréciation pour la série Harry Potter. «Comme la majorité de ma classe, je tripe pas mal sur ces films», dit-il.

«Moi, j'aime les comédies et les films avec beaucoup d'action», propose Vincent, dont le long métrage préféré est Date prévue.

Ils ont de 11 à 15 ans. Ils sont souriants et heureux. Et ils sont attachants comme tous les enfants du monde. Pendant les Fêtes, ils font comme tous les jeunes d'ici. Ils jouent dehors, fêtent dans la famille, flânent au lit («J'adore dormir», lance Seddik qui fait rire tout le monde).

Sophie: «Nous irons en Beauce chez mes grands-parents. On se construit des forts. On fait des batailles de boules de neige.»

Émilien: «Ça c'est cool!»

Avant d'être comédiens, ils sont des enfants.